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Paris. Opéra Bastille. 20-III-2018. Hector Berlioz (1803-1869) : Benvenuto Cellini, opéra en deux actes et quatre tableaux sur un livret de Léon de Wailly et Auguste Barbier. Mise en scène : Terry Gilliam. Décors : Terry Gilliam, Aaron Marsden. Costumes : Katrina Lindsay. Lumières : Paule Constable. Vidéo : Finn Ross. Chorégraphie : Leah Hausman. Avec : John Osborn, Benvenuto Cellini ; Maurizio Muraro, Giacomo Balducci ; Pretty Yende, Teresa ; Audun Iversen, Fieramosca ; Marco Spotti, le Pape Clément VII ; Michèle Losier, Ascanio ; Vincent Delhoume, Francesco ; Luc Bertin-Hugault, Bernardino ; Rodolphe Briand, Pompeo ; Se-Jin Hwang, le cabaretier. Chœur de l’Opéra national de Paris (chef des chœurs : José Luis Basso), Orchestre de l’Opéra national de Paris, direction : Philippe Jordan
Le magnifique Benvenuto Cellini de Berlioz n'avait plus été donné à l'Opéra de Paris depuis 1993 ! Avec cette production invitée, venue tout droit de l'English National Opera et datant de 2014, une mise en scène brillante et une distribution étincelante, la « grande boutique » répare enfin son indifférence.
La version choisie est un mélange des différentes moutures que le divin Hector a apportées à sa partition, avec dans le programme de salle une indication honnête des coupures opérées. Certaines d'entre elles sont d'ailleurs assez surprenantes, car elles ôtent du caractère plus qu'elles ne suppriment des longueurs.
Terry Gilliam, ex Monty Python, signe une mise en scène « énoorme », plus que réjouissante, qui fait la part belle au carnaval du Mardi gras, jour où se situe l'action. C'est une débauche de masques, d'acrobates, de confettis tombant des cintres. La joie se mêle au grotesque, sans toutefois sacrifier les moments pathétiques. Et surtout, surtout, ce délire est organisé au cordeau, et dans le respect total de la musique : le déplacement du moindre figurant est en phase avec un accord, une phrase, une note. C'est du grand art, justement applaudi au moment des saluts.
Il est dommage que l'orchestre ne suive pas cette liesse. Toutes les notes sont jouées, et fort bien, mais sans verve, sans pétillant, sans fantaisie. On dirait que Philippe Jordan n'est pas intéressé par l'exubérance et la jeunesse berlioziennes, et qu'il se contente de suivre la partition, sans l'incarner. Les chœurs, en revanche sont un miracle d'engagement, d'unité et de beau son.
Dans le rôle-titre, John Osborn comble toutes nos espérances. Longueur du souffle, perfection du phrasé, soin de la prosodie, variété des couleurs, ce Cellini est idéal. La vedette lui est cependant quasi-volée par l'Ascanio exemplaire de Michèle Losier, plus que crédible en travesti, magnifique de timbre et de ligne. Elle possède à son répertoire Nicklausse et Siebel. Comme on y aimerait l'y entendre !
On attendait la Teresa de Pretty Yende, plus habituée des récitals prestigieux. Elle est absolument délicieuse, énergique dans son jeu scénique, d'une souplesse et d'un goût absolu dans les fioritures. Elle incarne à merveille la jeunesse et l'amour.
On sera plus réservée en ce qui concerne les voix graves masculines. Audun Iversen incarne un Fieramosca plutôt drôle et bien chantant, mais on lui a coupé ses meilleures répliques, ce qui l'empêche de construire un vrai personnage. Maurizio Muraro est un Balducci sans rondeur, sans humour, à la voix terne et étouffée. Dans le rôle du Pape entouré de cardinaux dansants, Marco Spotti fait sensation, mais ne semble pas tout à fait à l'aise dans la tessiture. En seconds rôles, Vincent Delhoume, Luc Bertin-Hugault et Rodolphe Briand font honneur à l'école française.
Crédit photographique : © Agathe Poupeney / Opéra national de Paris
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Paris. Opéra Bastille. 20-III-2018. Hector Berlioz (1803-1869) : Benvenuto Cellini, opéra en deux actes et quatre tableaux sur un livret de Léon de Wailly et Auguste Barbier. Mise en scène : Terry Gilliam. Décors : Terry Gilliam, Aaron Marsden. Costumes : Katrina Lindsay. Lumières : Paule Constable. Vidéo : Finn Ross. Chorégraphie : Leah Hausman. Avec : John Osborn, Benvenuto Cellini ; Maurizio Muraro, Giacomo Balducci ; Pretty Yende, Teresa ; Audun Iversen, Fieramosca ; Marco Spotti, le Pape Clément VII ; Michèle Losier, Ascanio ; Vincent Delhoume, Francesco ; Luc Bertin-Hugault, Bernardino ; Rodolphe Briand, Pompeo ; Se-Jin Hwang, le cabaretier. Chœur de l’Opéra national de Paris (chef des chœurs : José Luis Basso), Orchestre de l’Opéra national de Paris, direction : Philippe Jordan
« La version choisie est un mélange des différentes moutures que le divin Hector a apportées à sa partition, avec dans le programme de salle une indication honnête des coupures opérées. Certaines d’entre elles sont d’ailleurs assez surprenantes, car elles ôtent du caractère plus qu’elles ne suppriment des longueurs. » …
Il est tout de même REGRETTABLE que l’on continue à défigurer de quelque manière que ce soit « le seul opéra romantique français » sous le prétexte de sa (LAMENTABLE) « chute » de 1838-39 due au public « louis-philippard » (c’est tout dire !) de l’époque et à une cabale montée contre le compositeur !!! Or, Benvenuto Cellini version originale (avec les « corrections » de 1839), c’est Berlioz, « héros romantique » absolu dans l’exubérance et l’audace de sa jeunesse !!! Cela, Paris et la France ne l’on JAMAIS compris !!!
Malgré la Damnation, malgré (ou à cause ? ) le classicisme des Troyens (sauf en sa première partie qu’est la chute de Troie), JAMAIS PLUS Berlioz ne retrouvera cette fulgurance, ce défi aux « règles » de ce « Benvenuto » ridiculisé par les feuilletonistes parisiens stériles et jaloux !!!
Enfin un commentaire qui remet les choses à leur place et questionne toutes ces critiques aigries : et si, au fond, le public français avait (encore ?) du mal avec la grandeur berliozienne, et notamment dans ce Benvenuto Cellini ?
J’ai, pour ma part, la désagréable impression que ces personnes n’ont pas compris la mise en scène ou qu’elle va à l’encontre de ce qu’ils imaginaient de l’oeuvre : un opéra romantique plan plan comme le XIXe siècle nous en a fourni des kilomètres. Alors oui, les extravagances d’Hector projetées sur Benvenuto viennent totalement à l’encontre de ce conservatisme. Et forcément, ce qui va à leur encontre est inabouti, terne, mauvais, « infondu », parce qu’ils ne comprennent pas l’essence de cet opéra : le PANACHE ! C’est ce courage facétieux qui permet au protagoniste de transcender toutes les épreuves, c’est aussi ce qui lui donne ce caractère aussi subversif dans une France toujours travaillée par l’ordre et la morale. A ce titre, le dévoilement de l’anatomie de la statue est la plus parfaite illustration du bras d’honneur fait par Gilliam (et Berlioz ?) à toute la bonne société !
Quant aux critiques sur Jordan, il est quand même incroyable que ceux qui dénoncent une mise en scène trop forte en facéties ou clowneries réclament une direction d’orchestre plus folle… Comme si tout devait encore une fois rentrer dans les catégories qu’ils avaient imaginées avant de venir (Berlioz = folie, ou même hystérie)… Je n’ai pas trouvé sa direction si mauvaise que ça (peut-être qu’à l’avant-première jeunes il y avait plus de relâchement) et qu’elle a le mérite de la cohésion et des couleurs. Je l’ai perçue comme une tendresse envers ce compositeur si peu joué dans son pays…
Enfin, l’Opéra de Paris a une culture de la coupure qui est ancrée depuis des siècles, et quand on voit que le Boris Godunov qui sera bientôt joué ne sera que de 2h sans entracte, je me dis que cette censure a de beaux jours devant elle !
Le Boris Godounov de 2 heures sans entracte n’est autre que la version originale intégrale de 1869 qui a déjà été donnée à Paris au Théâtre des Champs-Elysées en novembre 1997 dans l’orchestration originale avec Gergiev et le théâtre Mariinski (également sans entracte). Cette version présente la particularité de recentrer le drame sur le personnage principal dont le rôle est ici plus développé que dans les versions ultérieures..