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Mélisande à la Ruhrtriennale, Hannigan et elle seule

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Bochum. Jahrhunderthalle. 3-IX-2017. Claude Debussy (1862-1918) : Pelléas et Mélisande, opéra d’après la pièce de Maurice Maeterlinck. Mise en scène : Krzysztof Warlikowski ; décor et costumes : Małgorzata Szczęśniak ; vidéos : Denis Guéguin. Avec : Barbara Hannigan (Mélisande) ; Phillip Addis (Pelléas) ; Leigh Melrose (Golaud) ; Franz-Josef Selig (Arkel) ; Sara Mingardo (Geneviève)… Bochumer Symphoniker ; direction : Sylvain Cambreling.

est une Mélisande passionnante, mais elle est bien seule.

Pelleas et Melisande, Ruhrtriennale

Premier intendant de la Triennale de la Ruhr nouvellement créée en 2002, Gérard Mortier avait fait d'une ancienne halle industrielle de Bochum le centre du festival, notamment pour les productions d'opéra : un vaste gradin de près de 900 places y est placé dans un espace qui reste entièrement modulable. Le lieu, sans doute, est impressionnant ; mais qu'y entend-on ?

C'est le premier problème de la soirée : , grand spécialiste de l'œuvre, n'est certainement pas en cause ; ce qu'on entend de l'orchestre placé au fond de la très vaste scène est pourtant constamment insatisfaisant. L'orchestre de Bochum ne semble pas à la hauteur de l'œuvre, mais les problèmes acoustiques, ceux de la salle et ceux d'une sonorisation qui ne peut résoudre tous les problèmes, sont tout aussi embarrassants. Pelléas sans orchestre, ou parfois avec des cuivres aussi criards, cela paraît fort long.

La rebelle et les bourgeois

La mise en scène de , elle, se laisse suivre avec intérêt, mais elle porte la marque de la suractivité du metteur en scène, qui aura enchaîné trois productions en à peine plus de trois mois, avec Les Stigmatisés à Munich, déjà un peu survolés, et le Don Carlos promis début octobre à l'Opéra de Paris. Ce que Warlikowski crée pour Mélisande, avec l'aide de cette actrice et chanteuse véritablement créatrice qu'est , est passionnant, d'autant qu'elle est la seule de la soirée à vraiment respecter les valeurs rythmiques de la partition – , qui pourrait être une belle Geneviève, retire à force d'imprécision toute force à la scène de la lettre.

Pelleas et Melisande, Ruhrtriennale

 

Et les autres, alors ? La famille d'Arkel, dans les parquets et les lambris impeccables du luxe bourgeois, dans les rites quotidiens du bon ton (le concert, le repas familial), offre certes un contraste bienvenu à défaut d'être inédit avec les lumières interlopes d'un bar de nuit ; mais Golaud étouffe dans sa barbe de père de famille 1900, et , pour ses débuts dans ce rôle, se contente d'une interprétation toute extérieure du personnage – un comble. Hannigan, Mélisande donc, y fait irruption moins comme « un oiseau qui n'est pas d'ici » que comme une tempête, qui s'empare de Golaud en véritable prédatrice. Cette force du désir féminin, qui a de quoi perturber le clan Arkel, se rencontre avec l'étrangeté d'un Pelléas décalé dans son milieu (, à la peine), mais la déchéance en est l'aboutissement – la dernière scène de l'acte IV, la dernière rencontre, dans la froideur du bar, caméra sur Hannigan, regard fixe et clope au bec, sans contact physique ou visuel, est déchirante. Hannigan, admirable actrice, admirable musicienne, est au cœur du spectacle, et c'est tant mieux – mais ni la mise en scène, ni ses partenaires, ni l'orchestre ne lui offrent un environnement à sa mesure.

La Ruhrtriennale tient sa force des liens avec le passé industriel de la région : ici, à vrai dire, le bénéfice du genius loci est inopérant, et il aurait bien mieux valu créer cette production dans un des nombreux théâtres qui font aussi partie du patrimoine local, pour des raisons acoustiques d'abord, mais aussi pour donner à la mise en scène de Warlikowski la densité qui lui fait défaut.

Crédit photographique : © Ben van Duin/Ruhrtriennale 2017

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Bochum. Jahrhunderthalle. 3-IX-2017. Claude Debussy (1862-1918) : Pelléas et Mélisande, opéra d’après la pièce de Maurice Maeterlinck. Mise en scène : Krzysztof Warlikowski ; décor et costumes : Małgorzata Szczęśniak ; vidéos : Denis Guéguin. Avec : Barbara Hannigan (Mélisande) ; Phillip Addis (Pelléas) ; Leigh Melrose (Golaud) ; Franz-Josef Selig (Arkel) ; Sara Mingardo (Geneviève)… Bochumer Symphoniker ; direction : Sylvain Cambreling.

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