A Salzbourg, Strauss et Bruckner par Blomstedt et les Wiener Philharmoniker
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Salzbourg. Großes Festspielhaus. 20-VIII-2017. Richard Strauss (1864-1949) : Metamorphosen, étude pour 23 cordes solistes op. 142 ; Anton Bruckner (1824-1896) : Symphonie n°7 en mi majeur WAB 107. Wiener Phiharmoniker, direction : Herbert Blomstedt.
Sa récente chute en aurait arrêté ou transformé plus d'un, mais à 90 ans, Herbert Blomstedt est encore au pupitre et n'a ni le regard ni le geste triste. Il reste au contraire vaillant pour développer les sonorités des Wiener Philharmoniker, sublimes de la première à la dernière note, d'abord à vingt-trois dans les Métamorphoses de Richard Strauss, puis à plus de cent pour la Symphonie n° 7 de Bruckner jouée dans la dernière édition critique au sein de la Bruckner Gesamtausgabe, surprenante dans certaines nuances et soli de bois et mettant particulièrement bien en avant le thème de l'Adagio que le maître de Linz redéveloppera ensuite dans sa Huitième.
Lui qui dirigeait encore toutes les répétitions debout seulement un an plus tôt doit maintenant rester assis au pupitre pendant les concerts. Même si cela semble légèrement influencer le son en le concentrant et en lui ôtant quelque peu de la douceur de caractère si évidente sous sa baguette depuis plus d'une décennie, cela ne rend pas pour autant le chef sombre. Il aurait pourtant pu profiter des terribles Metamorphosen, pièce qu'écrit à la fin de sa vie un Richard Strauss très touché moralement pendant la guerre, pour noircir le propos. Mais Herbert Blomstedt n'est pas de ce genre-là, à l'image du sourire radieux sur son visage, présent dès son entrée sur scène et encore lors des applaudissements, longs et chaleureux, d'une salle debout qui a pourtant attendu plus de 30 secondes avant d'oser le moindre bruit après le dernier accord de la symphonie.
Écrites pour vingt-trois cordes solistes, les Métamorphoses sont dirigées par cœur par Blomstedt, sans qu'aucune erreur de mise en place ni de reprise n'apparaisse en près de 30 minutes d'un malheur contenu et ramené à une pensive réflexion plus qu'à une véritable méditation. Le chef développe dans cette œuvre une longue ligne sans jamais jouer totalement la déploration ni appuyer trop sur la répétitivité de l'accord tiré de la Cinquième Symphonie de Beethoven, ni encore moins en cherchant le pathos dans celui issu de la Marche Funèbre de la Troisième. Les musiciens du Philharmonique de Vienne, avec tous les premiers chefs de pupitres de cette fantastique formation, donnent des variations de nuances et de couleurs absolument irréprochables, à commencer par celles portées par le premier violon et le premier alto.
Dans Bruckner, qu'il a tant dirigé, le chef a apporté la partition sur le pupitre, pour se rassurer plus que pour s'en servir, puisque le petit livre bleu ne sera jamais ouvert pendant la représentation. Les premières notes aux cordes montrent déjà la puissance de concentration du son des Wiener, dense sans jamais chercher à être compact, jamais sombre là non plus, même dans les passages en mode mineur de l'Adagio. La première flûte magnifie chaque instant de sa partition, presque égalée par la première clarinette et le premier hautbois, tandis que les cuivres déploient avec splendeur chacune de leurs interventions, la sonorité des cors viennois s'alliant particulièrement à celui des tubas wagnériens.
En 1h10, le chef s'attèle à décrire l'instant continu sans pour autant vouloir créer un arc global, comme le recherchait un Celibidache par exemple. Il profite de la qualité de ses cordes pour demander un délié toujours présent et toujours très fin. Avec un tel ensemble, il a pu se permettre un cinquième cor de soutien qui n'intervient qu'aux codas du premier et du dernier mouvement, ainsi qu'un second timbalier pour doublonner sur la troisième timbale son confrère à un seul moment de la symphonie, lors des ultimes instants du Finale !
Évidemment le résultat s'en ressent et présente un concert quasi parfait, pour lequel Herbert Blomstedt reçoit à la fin un grand bouquet de fleurs aux couleurs de la Suède, ainsi qu'une exhortation de Madame Helga Rabl-Stadler à être encore présent pour diriger dans trois ans, lorsque l'on fêtera le centenaire du Festival.
Crédit photographique © Salzburger Festspiele / Marco Borrelli
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Salzbourg. Großes Festspielhaus. 20-VIII-2017. Richard Strauss (1864-1949) : Metamorphosen, étude pour 23 cordes solistes op. 142 ; Anton Bruckner (1824-1896) : Symphonie n°7 en mi majeur WAB 107. Wiener Phiharmoniker, direction : Herbert Blomstedt.