A Versailles, un Cendrillon de toute beauté par les Ballets de Monte-Carlo
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Versailles. Opéra Royal. 12-V-2017. Cendrillon. Chorégraphie: Jean-Christophe Maillot. Musique: Sergueï Prokofiev. Scénographie: Ernest Pignon-Ernest. Costumes: Jérôme Kaplan. Lumières: Dominique Drillot. La Fée: Mimoza Koike. Cendrillon: Alessandra Tognoloni. Le Prince: Francesco Mariottini. Le Père: Jaeyong An. Et les danseurs des Ballets de Monte-Carlo.
Repris dans l'écrin doré de l'Opéra royal de Versailles, Cendrillon de Jean-Christophe Maillot brille de mille feux. Dans un équilibre subtil, le chorégraphe parvient à préserver l'esprit du conte tout en en modernisant l'esthétique. Il lui confère une profondeur supplémentaire en approfondissant le thème de la perte de la mère.
Jean-Christophe Maillot n'a pas son pareil pour mettre en valeur les jambes des femmes… et leurs pieds. Fétichiste des pieds, Jean-Christophe Maillot ? Peut-être mais les amateurs de ballet ne lui en tiendront pas rigueur ! Qui n'a admiré le pied cambré d'une danseuse, n'a regardé avec délice le galbe du bas de jambe et l'attache fine qui relie la cheville au pied, ne s'est extasié devant un joli cou-de-pied ?
Cendrillon, avec tous ses développements autour de la pantoufle de vair et du pied qui pourrait y pénétrer, représente l'argument tout trouvé pour rêver autour du pied de la danseuse. Seule danseuse du ballet à ne pas porter de pointes, les pieds nus de Cendrillon sont ses principaux atours. La métamorphose de Cendrillon pour le bal, grâce à la bonne fée, se résume à enduire ses pieds et ses mollets d'une poudre d'or. Les pieds dorés, irisés de Cendrillon rendront fou le prince et captivent les yeux des spectateurs.
Dans ce ballet, créé pour les Ballets de Monte-Carlo en 1999, Jean-Christophe Maillot transpose Cendrillon dans un univers et une esthétique modernes et dépouillés mais qui parlent néanmoins à l'imagination, grâce à l'inventivité des décors et de la scénographie d'Ernest Pignon-Ernest et des costumes de Jérôme Kaplan. Loin des dorures et moulures du décor d'un palais, le bal se déroule une salle matérialisée par des panneaux blancs amovibles. Le grand escalier du haut duquel descendent les prétendantes est un panneau blanc ondulé et désaxé. La dissymétrie est présente dans les costumes également, qui dans le bal sont une variation sur le thème de la robe à panier. Les deux sœurs possèdent toutes les deux un demi panier. La poudre d'or qui tombe du ciel sur le couple du prince et de Cendrillon suffit à nous emmener dans la féérie du conte de fée.
Ce décor posé, l'histoire de Cendrillon est là: le remariage du père avec une femme dure et ses deux filles qui tyrannisent la douce Cendrillon, la fée et la transformation de Cendrillon qui se rend au bal malgré l'interdiction de sa belle-mère et la rencontre avec le prince; la disparition et la quête de Cendrillon, autour non de sa pantoufle mais de son pied même. Toutefois, exit le folklore du conte. Maillot approfondit le thème de la perte de l'être cher. L'ombre de la mère plane sur tout le ballet. Le désespoir du père qui ne parvient pas à oublier sa première femme est particulièrement travaillé et remarquablement interprété par Jaeyong An. Néanmoins, Maillot ne cherche pas la noirceur et les amateurs de happy ending ne seront pas déçus. La mère réapparaît dans le personnage de la fée. Ainsi, au couple heureux du prince et de Cendrillon qui vient de se former se superpose celui, retrouvé, de la mère et du père.
Maillot dépouille le conte de toute naïveté et explore une vaste palette de registres, du comique avec la parodie de Cendrillon qui permet une mise en abyme du conte, au grotesque des Surintendants du plaisir et des deux sœurs, de la cruauté de la marâtre et sa sensualité brutale à l'amour pur et vrai de Cendrillon. Le duo avec le Prince au bal- sublimé par les accents pleins et vibrants de la somptueuse musique de Prokofiev- est une merveille de liberté et d'envol qui donne à voir le bonheur des amants qui se reconnaissent immédiatement dans l'Autre. Jean-Christophe Maillot montre à quel point il sait, comme un orfèvre, sublimer la beauté des femmes. Les ombres chinoises des Exotiques sont une exquise trouvaille qui crée un tableau orientalisant très visuel.
Enfin, il faut saluer la qualité des danseurs des Ballets de Monte-Carlo. Les solistes – Alessandra Tognoloni en Cendrillon dont le travail des jambe est superbe de délicatesse et l'interprétation tout en nuances, Francesco Mariottini en Prince qui sait évoluer du jeune homme fanfaron et insouciant à l'amoureux véritable, Mimoza Koike en Fée qui s'impose comme le fil conducteur du ballet- mais aussi le corps de ballet, très précis et incisif dans les ensembles.
Crédits photographiques: © Alice Blangero
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Versailles. Opéra Royal. 12-V-2017. Cendrillon. Chorégraphie: Jean-Christophe Maillot. Musique: Sergueï Prokofiev. Scénographie: Ernest Pignon-Ernest. Costumes: Jérôme Kaplan. Lumières: Dominique Drillot. La Fée: Mimoza Koike. Cendrillon: Alessandra Tognoloni. Le Prince: Francesco Mariottini. Le Père: Jaeyong An. Et les danseurs des Ballets de Monte-Carlo.