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Guide de l’opéra russe par André Lischke

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Guide de l’Opéra Russe. André Lischke. Fayard « Les indispensables de la musique ». 780 pages. 38€. Dépôt légal : avril 2017.

 

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signe une imposante somme sur l'opéra russe, dont le caractère très analytique n'exclut pas la grande perspective. Grâce à une subjectivité assumée, elle permet d'y voir plus clair sur le cheminement et la richesse de ce répertoire pas si fréquenté par les maisons d'opéra occidentales. 

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À l'heure de Wikipedia, la question d'un guide d'analyses d'opéras se pose, et il faut avoir une bonne réponse. Face à un projet encyclopédique où l'écriture est collective et s'attache à être la plus neutre possible, apporte une réponse en près de 800 pages écrites serré, qui dessine une interprétation personnelle et parfois subjective : tout l'opéra russe vu par un seul regard. Cet ouvrage est le fruit d'une vie de travail, ainsi une partie des notices sont issues des numéros de l'Avant-Scène Opéra, revue pour laquelle l'auteur a collaboré depuis plusieurs…. décennies. Encore lui a-t-il fallu une année de mise en disponibilité pour mener à bien cette tâche immense.

Les notices des grands opéras sont fortes de plusieurs dizaines de pages (40 pour le seul Boris Godounov), et la plupart comportent en plus d'un synopsis et d'un commentaire (très) détaillés, une discographie et une toujours intéressante description des types vocaux des différents rôles. L'analyse reste accessible à tout mélomane éclairé, et le niveau de précision ravira les plus analytiques d'entre eux.

L'Histoire de l'opéra russe est découpée en neuf sections, commençant de manière simple par les vaudevilles du XVIIIe siècle (I. L'éclosion de l'opéra russe) puis concentrant ses plus grands développements aux classiques (337 pages pour Tchaïkovski, Moussorgski, Borodine, le moins connu Eduard Napravnik et , lequel représente près de la moitié de cette section VI. Au plus haut). Après cette période faste, tout se complique, en correspondance étroite avec l'arrivée de la modernité et celle de la révolution soviétique qui déclenche elle-même exils (Stravinski, Rachmaninov, Prokofiev…), modernité (Chostakovitch, Mossolov), et académisme imposé (Prokofiev) ou choisi (Khrennikov). La dernière section, « L'opéra en URSS. La prégnance de l'idéologie » inclut curieusement tous les opéras depuis les années 20 jusqu'à nos jours, y compris le tout récent Coeur de chien d'Alexander Raskatov, qui bénéficie ainsi d'une mise en valeur exceptionnelle comme opéra qui s'inscrit dans la grande histoire de l'opéra soviétique (parce que Raskatov est né dans les années 1950 ?) et de la Russie.

Tout au long de l'ouvrage, prend parti et donne son point de vue sur la portée des œuvres et des compositeurs, ce qui rend cet ouvrage vivant et le sauve d'une froideur musicologique. La subjectivité pourra toutefois surprendre, comme lorsque l'auteur se félicite que ait été contraint, à la suite du scandale orchestré par Staline contre Lady Macbeth du District de Mzensk, de renoncer à son projet de composer d'autres opéras sur le sort de la femme russe. Etrange hommage à la mainmise de la politique sur l'artistique. On s'étonne aussi du soin que Lischke prend à prêter différentes mesquineries à Chostakovitch et à son entourage, en se reposant notamment sur l'ouvrage de Témoignages, dont le sérieux et l'intégrité sont fortement contestés. Le fait que Lischke ait été le traducteur en français du livre de Volkov explique plus qu'il n'excuse cette partialité. Ceci dit, Lischke met bien en valeur les opéras du compositeur et les œuvres qui ont compté pour ce dernier comme Le violon de Rothschild de (complété par Chostakovitch) ou La Passagère de son ami , et c'est dans ce registre-là que l'on préfère le musicologue.

D'une incontestable science, toujours engagé et parfois jusqu'à la partialité, subjectif et analytique, précis et vivant, le Guide de l'opéra russe brosse une fresque à la mesure de ce répertoire et donne envie de pouvoir mieux le découvrir à la scène.

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