Plus de détails
Genève. Victoria Hall. 22-IV-2016. Camille Saint-Saëns (1835-1921) : Introduction et Rondo capriccioso pour violon et orchestre op. 28. Maurice Ravel (1875-1937) : Tzigane, Rhapsodie de concert pour violon et orchestre. Sergueï Prokofiev (1891-1953) : Extraits de Roméo et Juliette op. 64. Renaud Capuçon (violon). Orchestre de la Suisse Romande, direction : Osmo Vänskä.
Précédé de la réputation de ses interprétations captivantes, le chef d'orchestre Osmo Vänskä enthousiasme le public genevois en mettant en valeur un Orchestre de la Suisse Romande subjugué.
En ouverture de concert, le violoniste Renaud Capuçon offre une époustouflante démonstration de sa technique dans un endiablé Rondo cappriccioso de Camille Saint-Saëns. La sonorité de son violon Guarnerius del Jesù « Panette » est somptueux de rondeur et de puissance. À ses côtés, l'Orchestre de la Suisse Romande admirablement contrôlé par le chef finlandais Osmo Vänskä occupe attentivement l'espace musical. Dix minutes d'une musique impressionnante ne laissant que peu de place à l'émotion.
Dans la Tzigane de Ravel, l'introduction de Renaud Capuçon nous est apparue particulièrement sophistiquée et maniérée (et pas toujours très juste !). Dans le Rondo, le violoniste français démontre une fois de plus sa maîtrise totale de l'instrument se jouant avec élégance de la diabolique difficulté de l'exercice. Mais, où est l'émotion ?
Il a fallu attendre la Mélodie de Gluck (tirée de Orfée et Eurydice, transposée par Jasa Heifetz) jouée a capella et attaquée avec un splendide pianissimo pour apprécier un moment de pure authenticité artistique.
Cette soirée concertante s'annonçait d'une bonne tenue, l'Orchestre de la Suisse Romande jouant bien, le chef dominant l'ensemble romand avec précision. Tout était sous contrôle, la machine se mouvait sans grincements aucuns. Quand, tout à coup, par on ne sait quel véritable miracle, les premières notes de Roméo et Juliette de Prokoviev voient un Orchestre de la Suisse Romande totalement transformé. Soudain, le son de l'orchestre prend du volume, de la consistance, du relief, des couleurs éclatantes. Certes la musique du compositeur russe possède une fascination extraordinaire. Les rythmes, les stupéfactions musicales scellées au cœur de ce génial ballet opèrent une étonnante magie tant sur l'auditeur qui l'entend que sur les musiciens qui la joue. Encore faut-il qu'un lecteur de cette partition fasse vivre ces notes du papier au son. C'est l'admirable tour de force que réalise Osmo Väskä au pupitre.
Devant un Orchestre de la Suisse Romande transformé, le chef finlandais respire la musique, l'élève, enveloppe la musique de Prokoviev. Elle semble n'avoir aucun secret pour lui. Être partie de lui-même. Il porte cette musique en lui et l'imprime aux pupitres de l'orchestre qui la lui renvoient avec un volume sonore incroyablement mesuré tout autant que démesuré. Et pourtant, Osmo Väskä semble serein quand bien même il sollicite ses musiciens avec une discrète autorité. Les chapitres du ballet s'enchaînent sans pauses, la tension restant à son paroxysme. L'Orchestre de la Suisse Romande survolté offre alors un véritable feu d'artifice. Au point que la fameuse « Danse des Chevaliers » soulève des exclamations et des applaudissements spontanés dans le public, cassant quelques instants la continuité imposée par la direction impliquée du chef finlandais. On goûte à la tension merveilleusement glaciale des stridences modulées des violons du « Cortège funèbre de Juliette ». On vibre à la puissance extraordinaire soudain interrompue de la « Mort de Juliette ». Après de courts instants de silence, le public gagné par la torpeur des accents tragiques de cette musique, enfin se libère pour ovationner comme il se doit cette formidable interprétation.
Rarement, l'Orchestre de la Suisse Romande a été aussi impliqué. Rarement, il a si bien joué le jeu du chef. Ce soir, avec Osmo Väskä, il a trouvé un maître, un guide au service entier du compositeur.
Crédit photographique : © DR
Plus de détails
Genève. Victoria Hall. 22-IV-2016. Camille Saint-Saëns (1835-1921) : Introduction et Rondo capriccioso pour violon et orchestre op. 28. Maurice Ravel (1875-1937) : Tzigane, Rhapsodie de concert pour violon et orchestre. Sergueï Prokofiev (1891-1953) : Extraits de Roméo et Juliette op. 64. Renaud Capuçon (violon). Orchestre de la Suisse Romande, direction : Osmo Vänskä.