George Balanchine, maître de la danse néoclassique
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Si vous aimez la musique country ou le rock’n roll, ce dossier n’est pas fait pour vous. La « art music » des Etats-Unis, éclectique et audacieuse, a su s’imposer au siècle dernier comme un vivier de personnalités revendiquant un style musical affranchi des influences européennes. Pour accéder au dossier complet : Danse et Musique américaines
Sous la houlette de Benjamin Millepied, l'Opéra de Paris jette les pleins feux sur les chorégraphes américains, et fait la part belle à George Balanchine. Trois de ses pièces, Thèmes et Variations, Duo concertant et Brahms-Schönberg Quartet, sont programmées pour la saison 2015-2016 et quatre autres pour la saison 2016-2017, dont plusieurs entrées au répertoire. L'occasion nous est donnée de revenir sur la carrière du grand maître de la danse néoclassique et de nous interroger sur son apport à la danse du XXè siècle et sur son héritage.
Origine
Georgi Melitonovitch Balanchivadze est né à Saint Pétersbourg le 22 janvier 1904, d'une mère russe et d'un père compositeur géorgien. C'est Serge Diaghilev qui, en 1924, occidentalise le nom de celui qui devient George Balanchine.
Le jeune Balanchine est formé à l'école impériale du Théâtre Mariinski, où il entre en 1913. Une fois diplômé de l'école en 1921, Balanchine entre au Conservatoire national de musique de Petrograd, où il forge le projet de devenir pianiste et acquiert une solide culture musicale.
La rencontre avec Serge Diaghilev marque le véritable début de la carrière de Balanchine et initie sa collaboration artistique avec Igor Stravinsky. D'abord engagé comme danseur dans la troupe des ballets russes en 1924, Balanchine est ensuite nommé chorégraphe à 21 ans, après le départ de Bronislava Nijinska. Lorsqu'intervint le décès brutal de Diaghilev en 1929, Balanchine a 25 ans et bénéficie déjà d'une renommée internationale.
Cette période des Ballets russes a vu émerger les premiers chefs-d'œuvre de Balanchine. Apollon musagète, créé en 1928 sur une musique de Stravinsky et Le Fils prodigue, créé en 1929 et interprété par Serge Lifar, posent les jalons du style balanchinien.
C'est en 1933 que George Balanchine quitte l'Europe pour les États-Unis, sur invitation du mécène Lincoln Kirstein. En 1935, Balanchine et Kirstein fondent leur propre compagnie au Metropolitan Opera, l'American Ballet. Les années 1940 sont fertiles. Malgré les difficultés financières, Balanchine chorégraphie le Concerto Barocco (1941) sur une musique de Bach, Thèmes et variations (1947), Symphonie en C, Les Quatre Tempéraments (1946) et Orpheus (1948).
En 1948, la compagnie de Kirstein et Balanchine prend le nom de New York City Ballet (NYCB) et devient la compagnie résidente du New York City Center.
Maturité
C'est dans le milieu des années 1950, vingt ans après son arrivée aux États-Unis, que Balanchine parvient à obtenir une reconnaissance plus large. L'installation du NYCB dans le Lincoln Theater, en 1964, permet de toucher un public plus diversifié et la réputation de Balanchine atteint son apogée. C'est à cette période que sont créées les pièces qui perdurent dans le répertoire de la compagnie: La Valse (1951), Casse Noisette (1954), Western Symphony (1954), Agon (1957), Stars and Stripes (1958), Songe d'une nuit d'été (1962), Joyaux (1967) et Union Jack (1976). Surprenant son public, il conçoit même des pièces plus longues et dotées d'une intrigue, comme Harlequinade (1952) et une nouvelle version de Don Quichotte en 1965, dédiée à sa muse, Suzanne Farell qui incarne, en Dulcinée, la « femme idéale ».
Connu pour son amour des femmes (Balanchine a été marié quatre fois et avec quatre danseuses, Tamara Geva, Vera Zorina, Maria Tallchief et Tanaquil LeClerq), Balanchine a créé ses ballets pour les femmes. Ghislaine Thesmar analyse ainsi la relation de Balanchine avec les femmes: « Il comprenait les femmes et leurs fantasmes de manière extraordinaire. On aurait dit qu'il voulait posséder nos rêves ».
Le grand maître est décédé en 1983, à 79 ans, laissant derrière lui une œuvre riche de plus de 400 ballets.
Héritage
Héritier ou « fils spirituel » de Marius Petipa, Balanchine s'est nourri de cette tradition classique pour en faire le fondement du renouveau qu'il impose à la danse. Le style balanchinien se caractérise par des ballets sans intrigue avec pour seul objet sujet l'épure du mouvement. Les lignes sont en tension permanente, à la limite du déséquilibre. Pour Balanchine, qui invitait à « voir la musique et entendre la danse », la musique, primordiale, précède la danse. Elle en définit la forme et le cadre.
Le premier des héritiers de Balanchine est Jérôme Robbins, qui rejoint « Mr B » au New York City Ballet dès 1948 et devient directeur-adjoint en 1958, puis directeur artistique à la mort du maître en 1983. La tradition néoclassique a ensuite été perpétrée au New York City Ballet par de jeunes chorégraphes comme Benjamin Millepied, Christopher Wheeldon et Justin Peck, l'actuel chorégraphe résident. Des pièces comme Polyphonia de Wheeldon ou Clear, Loud, Bright, Forward de Millepied doivent à Balanchine le goût pour l'abstraction, la pureté des lignes, la composition géométrique, que l'on retrouve dans Agon, par exemple.
A l'instar de Balanchine, le chorégraphe russe Alexeï Ratmansky considère la chorégraphie en elle-même comme un art et met l'accent sur la relation pure entre les pas, l'espace et la musique. Ratmansky, qui opère la synthèse entre tradition russe et danse occidentale, peut être considéré aujourd'hui, avec le jeune Justin Peck, comme l'un des principaux héritiers de Balanchine.
Bibliographie
– Gérard Mannoni, Les Grands chorégraphes du XXè siècle, Buchet-Chastel, 2015
– The New York Times, George Balanchine, 79, Dies in New York, par Anna Kisselgoff, 1er mai1983.
– The Guardian, Step-by-step guide to dance: George Balanchine, par Sanjoy Roy, 30 juillet 2009.
– The Telegraph, Alexei Ratmansky: ‘the most gifted choreographer in classical ballet today', par Sarah Crompton, 12 décembre 2013.
Crédits photographiques: Photo 1: George Balanchine © Tanaquil Le Clercq; Photo 2: Duo Concertant – Balanchine avec Laura Hecquet et Hugo Marchand © Sébastien Mathé / Opéra national de Paris
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