Plus de détails
Paris. Théâtre du Châtelet. 3-II-2015. Kiss Me, Kate. Musique et Lyrics : Cole Porter. Livret : Sam et Bella Spewack, inspiré de La Mégère apprivoisée (The Taming of the Shrew) de William Shakespeare. Edition critique : David Charles Abell et Seann Alderking. Direction musicale : David Charles Abell. Mise en scène : Lee Blakeley. Décors : Charles Edwards. Costumes : Brigitte Reiffenstuel. Chorégraphie : Nick Winston. Lumière : Emma Chapman. Sound design : Stéphane Oskeritzian. Avec Christine Buffle, David Pittsinger, Francesca Jackson, Alan Burkitt, Jasmine Roy, Fela Lufadeju, Martyn Ellis, Daniel Robinson, Jack Harrison-Cooper, Thierry Picaut, Joe Sheridan, Damian Thantrey, Franck Vincent, Thomas Boutilier, Ryan-Lee Seager, Sean Lopeman, John Paval. Ensemble instrumental du Châtelet, Orchestre de chambre de Paris, direction : David Charles Abell.
Adaptation musicale et hilarante de La Mégère apprivoisée par Cole Porter, Kiss Me, Kate triomphe au Théâtre du Châtelet. Colorée, drôle et enlevée, cette nouvelle production joue sur tous les registres de la comédie pour mieux nous séduire.
C'est à un spectacle dans le spectacle que nous convient Lee Blakeley et David Charles Abell pour cette nouvelle production de Kiss Me, Kate, l'un des plus célèbres musical de Cole Porter. Créé à Broadway en 1948, il fut le dernier succès majeur de son compositeur, mais le premier du genre à obtenir un Tony Award. Depuis lors, plusieurs des chansons du spectacle sont passées à la postérité.
C'est justement en 1948, date de création de l'œuvre, que le scénographe Charles Edwards a choisi de planter le décor « backstage », avec escaliers en fer, toit brûlant et entrée des artistes encombrée. Une troupe de comédie musicale s'apprête à donner à Baltimore la Première de son nouveau spectacle « The Shrew ! ». Les derniers préparatifs battent leur plein et les danseurs sont fébriles. Le régisseur, les habilleuses et les assistants sont sur le qui-vive, alors que les interprètes sont distraits par des ennuis d'argent ou des peines de cœur.
Dans leurs loges (astucieux système de boîtes comme il est désormais d'usage à l'opéra), Lili Vanessi (Christine Buffle) et Fred Graham (David Pittsinger) se préparent à revêtir leurs costumes de scène. Divorcés, ils se lancent dans un festival de reproches et de réflexions désobligeantes. Très émouvants, puissants, les deux chanteurs lyriques sont à leur aise dans ce répertoire de la comédie musicale dans lequel ils ont tous deux démarré il y a quelques années. La présence et l'abattage de Christine Buffle force le respect, tant dans les moments nostalgiques (« Wunderbar », « So in love ») que dans les moments comiques (« We open in Venice », « I hate men », « Kiss Me, Kate »). Elle n'a peur de rien, ni des costumes ridicules, ni de la tarte à la crème, ni de jouer la virago… elle ose tout ! Son partenaire, vieux beau sûr de lui au premier abord, n'est pas en reste. David Pittsinger est un magnifique baryton-basse, au registre très étendu lui aussi, drôle sans jamais perdre sa distinction.
Le reste de la distribution est à l'avenant, jeune, dynamique et infatigable ! Car la pièce commence… Le décorateur et le metteur en scène n'ont pas craint l'anachronisme en projetant les acteurs dans la dolce vita du film Vacances Romaines. Cette transposition de La mégère apprivoisée dans l'Italie des années 50, façon comedia dell'arte, semble audacieuse, mais elle s'inscrit dans une longue tradition (à la Comédie Française, Eric Ruf a transposé Roméo et Juliette dans l'Italie des années 30). « We open in Venice » donne le ton, les deux couples vedettes chevauchant des Vespa en costumes acidulés. La dimension carte postale est travaillée au maximum, de la tarentelle aux pizzaloios ! C'est sans conteste la partie la plus savoureuse du spectacle, notamment en raison des répliques ciselées directement inspirées de la pièce de Shakespeare. Les deux chanteurs sont aussi d'excellents acteurs, dignes successeurs d'Elizabeth Taylor et Richard Burton, couple à la ville comme à la scène.
La farce est poussée à son comble tout au long de la production, grâce aux interventions burlesques de Martyn Ellis et Daniel Robinson, gangsters venus réclamer une dette de jeu, qui s'immiscent jusque sur scène pour ne pas quitter leur débiteur d'une semelle. En costumes shakespeariens ou en complets à rayures, ils déclenchent le rire à chacune de leurs apparitions, jusqu'à la célébrissime chanson « Brush Up Your Shakespeare » qui témoigne d'une grande érudition de Cole Porter sur l'auteur de Stratford-upon-Avon. Le spectacle ne serait pas complet sans les numéros de danse réglés par Nick Winston, qui s'est inspiré du Lindy hop pour des chorégraphies enlevées et toniques. Mention spéciale au jeune Ryan-Lee Seager, le capitaine de la danse. La plus jolie scène se passe à l'entracte (version scénique), sur le toit brûlant du théâtre où les danseuses en combinaisons légères déclarent qu'il fait « Too Darn Hot » pour danser, mais le font quand même…
Enfin, l'Ensemble Instrumental du Châtelet, renforcé par les cordes de l'Orchestre de Chambre de Paris, est brillamment dirigé par David Charles Abell. Ce dernier s'appuie sur une édition critique de la partition originale, qu'il a patiemment reconstituée à force de recherches en y intégrant toutes les corrections du compositeur au moment de la création scénique. Un travail musicologique de titan qui devrait être mené pour toutes les partitions du patrimoine de la comédie musicale.
Crédits photographiques: (c) Vincent Pontet/Théâtre du Châtelet
Plus de détails
Paris. Théâtre du Châtelet. 3-II-2015. Kiss Me, Kate. Musique et Lyrics : Cole Porter. Livret : Sam et Bella Spewack, inspiré de La Mégère apprivoisée (The Taming of the Shrew) de William Shakespeare. Edition critique : David Charles Abell et Seann Alderking. Direction musicale : David Charles Abell. Mise en scène : Lee Blakeley. Décors : Charles Edwards. Costumes : Brigitte Reiffenstuel. Chorégraphie : Nick Winston. Lumière : Emma Chapman. Sound design : Stéphane Oskeritzian. Avec Christine Buffle, David Pittsinger, Francesca Jackson, Alan Burkitt, Jasmine Roy, Fela Lufadeju, Martyn Ellis, Daniel Robinson, Jack Harrison-Cooper, Thierry Picaut, Joe Sheridan, Damian Thantrey, Franck Vincent, Thomas Boutilier, Ryan-Lee Seager, Sean Lopeman, John Paval. Ensemble instrumental du Châtelet, Orchestre de chambre de Paris, direction : David Charles Abell.