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Festival Suresnes cités danse, 24e édition. Théâtre de Suresnes Jean Vilar. 29/I/2016. #Hashtag. Pockemon Crew. Direction Riyad Fghani. Avec Moncef Zebiri, Karl Asokan, Fares Baliouz, Alex Tuy, Hyacinthe Vallerie, Mehdi Meziane, Patrick M’Bala Mangu, Nagueye Mahmoud, Mabrouk Gouicem, Rachid Hamchaoui. Lumières et scénographie : Arnaud Carlet. Création musicale : Flavien Swealer Taulelle. Création costumes : Nadine Chabannier. Production : Association Qui Fait Ça ? Kiffer Ça ! Harmonize. Mise en scène, chorégraphie, lumières et video : Seung-Ju Lee. Morning of Owl (Corée du Sud). Avec Kwang-Seok Park, Hyo-Sung Ju, Kyu-Min Ahn, Sang-Gon han, Seung-Hwan Moon, Ki-Ju Kim et Do-Young Kim.
A la croisée de deux univers, le groupe lyonnais Pockemon crew et les Coréens Morning of Owl assurent une heure trente de show époustouflant, qui allie performance technique et recherche artistique.
Les rencontres hip-hop sont une constante toujours très attendue du festival Suresnes cités danse. Mais rarement autant que cette année le terme de rencontre aura été aussi justement employé. Ce sont bien deux univers aux antipodes l'un de l'autre qui se côtoient sur la scène du théâtre Jean Vilar. Les Pockemon crew, groupe de renommée internationale d'origine lyonnaise, sont déjà familiers du festival. Ils sont venus en 2014 pour présenter leur spectacle « Silence, on tourne ! » et viennent aujourd'hui forts d'une nouvelle création, #Hashtag, chorégraphiée par Riyad Fghani.
Considéré comme le meilleur crew de breakdance du monde, Morning of Owl débarque tout droit de Corée du Sud, avec ses sept danseurs âgés de 19 à 30 ans, au palmarès impressionnant.
Une rencontre féconde et explosive autour d'un thème commun, la modernité
A Suresnes, ce n'est pas à un match France-Corée qu'il faut s'attendre. Mais bien plutôt à une rencontre féconde entre deux styles et deux cultures différents. Le point commun de la soirée, c'est la thématique : la modernité, que le Pockemon crew et Morning of Owl explorent chacun à leur manière.
#Hashtag fait référence au monde de l'interconnexion, qui a fait irruption dans notre quotidien, notamment à la suite de l'essor des réseaux sociaux. Pour Riyad Fghani, l'interconnexion c'est avant tout la connexion, qui passe par le contact humain. Les échanges et les interactions sont constants entre les danseurs, qui prennent un plaisir évident à danser ensemble sur scène. Cette complicité permet les figures les plus spectaculaires : projetés en l'air, presque comme des acrobates, ils retombent au sol en roulant, le tout avec une fluidité absolue. Les musiques sont belles, très rythmées dans les ensembles, parfois lentes et hispanisantes, ce qui donne lieu à des solos très chorégraphiés. L'art de ces danseurs est de produire un continuum de mouvements, sans jamais lasser l'œil, du fait de l'équilibre subtil entre le spectaculaire et l'artistique, l'humour et l'émotion. La chorégraphie intègre de jolis effets visuels comme les ombres projetées, qui permettent aux danseurs de jouer avec leur silhouette agrandie sur le mur de fond de scène.
Avec Harmonize, le groupe coréen Morning of Owl présente une vision ambivalente de la modernité, reflet d'une Asie partagée entre traditions millénaires et décollage économique fulgurant.
Les premiers tableaux donnent à voir une modernité désincarnée, dont le trait saillant est la vitesse : les images de mégalopoles défilent à toute allure sur l'écran de fond de scène, laissant le temps d'apercevoir les gratte-ciel et les nœuds de communication ; la musique électro emmène les danseurs dans une sorte de transe où ils tourbillonnent sur la tête, les mains, les genoux, les pieds. Leur virtuosité technique est époustouflante, la rapidité d'exécution et la précision inouïes. Puis, d'un coup, ce rythme fou se calme, et on pénètre dans un monde apaisé, où l'homme peut à nouveau faire corps avec la nature. Ce changement se manifeste aussi dans la danse, au croisement entre hip-hop et arts martiaux. L'humain redevient le centre, comme le suggèrent les solos, plus respirés et où les mouvements empruntés au karaté sont nombreux. La performance est toujours au rendez-vous et la scène finale est construite comme un feu d'artifice, tous les danseurs enchainant les figures les plus rapides sous une pluie de confettis. La technique du Morning of Owl est fondamentalement ancrée dans la tradition des arts martiaux, qui inculque la qualité des positions, la précision des mouvements, la synchronisation parfaite, la respiration. La contrepartie réside dans le caractère quelque peu déshumanisé de la prestation, les danseurs se transformant en toupies humaines et perdant leur individualité.
Ce sont donc deux approches de la danse très différentes, reflet de deux civilisations portant un regard différent sur le monde, que nous présentent les Pockemon crew et Morning of Owl. La rencontre de ces deux univers fait sans conteste la réussite de cette soirée, placée sous le signe de l'enthousiasme, du talent et du respect les uns des autres. Le public ne boude pas son plaisir et les rappels sont nombreux pour les danseurs qui se retrouvent tous sur scène pour une dernière série de figures improvisées sous une salve d'applaudissements.
Crédits photographiques: Harmonize – Morning of Owl (c) DR ; Pockemon Crew (c) Didier Michalet
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Festival Suresnes cités danse, 24e édition. Théâtre de Suresnes Jean Vilar. 29/I/2016. #Hashtag. Pockemon Crew. Direction Riyad Fghani. Avec Moncef Zebiri, Karl Asokan, Fares Baliouz, Alex Tuy, Hyacinthe Vallerie, Mehdi Meziane, Patrick M’Bala Mangu, Nagueye Mahmoud, Mabrouk Gouicem, Rachid Hamchaoui. Lumières et scénographie : Arnaud Carlet. Création musicale : Flavien Swealer Taulelle. Création costumes : Nadine Chabannier. Production : Association Qui Fait Ça ? Kiffer Ça ! Harmonize. Mise en scène, chorégraphie, lumières et video : Seung-Ju Lee. Morning of Owl (Corée du Sud). Avec Kwang-Seok Park, Hyo-Sung Ju, Kyu-Min Ahn, Sang-Gon han, Seung-Hwan Moon, Ki-Ju Kim et Do-Young Kim.