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Michael Barenboim est né en 1985 à Paris, il a grandi à Berlin, fait ses études musicales en Allemagne et a étudié la philosophie deux ans à Paris. Il est impliqué depuis l'origine ou presque dans la belle aventure du West-Eastern Divan Orchestra fondé par son père Daniel Barenboim et Edward Saïd. Et il a des ascendances russes puisque sa mère, la pianiste Elena Bashkirova, fondatrice du Festival de Jérusalem, est la fille de Dimitri Bashkirov, grand pianiste et pédagogue. Michael Barenboim est très présent en France depuis la rentrée 2015 jusqu'en mai 2016. Occasion pour ResMusica de lui poser quelques questions.
« Le plus important, c'est de ne pas se limiter à un certain répertoire. »
ResMusica : Avec quels orchestres allez-vous collaborer pendant cette année très française et sur quels projets ?
Michael Barenboim : Je suis particulièrement content de jouer Anthèmes II de Pierre Boulez dans un spectacle à l'Opéra de Paris en son honneur. Ce sera en collaboration avec l'IRCAM et avec une chorégraphie de Wayne McGregor. Plus tard dans la saison, je rejoue l'œuvre au festival de Pâques à Aix-en-Provence. En outre, cette saison, je suis « artist in residence » à l'Orchestre symphonique de Bretagne (OSB), ce qui me permet de participer à plusieurs projets. J'ai également joué avec l'orchestre des Pays de Savoie, l'Opéra de Nancy et l'Opéra de Nice dans les premiers mois de 2015.
RM : Vous êtes en effet pour la saison 2016/2017 en résidence à l'Orchestre Symphonique de Bretagne. En quoi consiste la résidence d'un interprète au sein d'un orchestre ?
MB : Une résidence permet d'approfondir le contact avec l'orchestre, et permet aussi une diversité dans la programmation qui est impossible autrement.
RM : Comment votre curiosité et votre ouverture se traduisent-elles dans votre répertoire? Pouvez-vous en particulier vous exprimer sur le projet autour d'Anthèmes II de Pierre Boulez ?
MB : Anthèmes II est une extension et un approfondissement d'Anthèmes I, œuvre pour violon seul. L'ajout du dispositif électronique enrichit, élargit et enveloppe la partie du violon. En fait j'ai eu l'opportunité de travailler les Anthèmes avec Pierre Boulez il y plusieurs années, ce qui m'a beaucoup aidé pour la compréhension de cette musique, et même de toute autre musique. Ce fut un moment très spécial pour moi. Je suis très curieux de donner cette pièce dans le contexte d'un ballet, c'est un travail que je fais pour la première fois.
RM : Vous vous produisez aussi bien en soliste avec orchestre qu'au sein du quatuor que vous avez fondé en 2005, le Erlenbusch Quartett, dont vous êtes le premier violon : que pouvez dire de cette double expérience ?
MB : Le plus important, c'est de ne pas se limiter à un certain répertoire. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle je combine souvent les œuvres de différentes époques, leur donnant l'occasion de s'enrichir dans une sorte de dialogue. En ce sens, c'est essentiel de jouer le répertoire pour quatuor à cordes, c'est souvent la meilleure musique, et surtout celle où l'on apprend la pensée du compositeur en question, et ceci plus en détail et d'une manière plus approfondie que si on se limite aux concerti et aux sonates.
RM : Employez-vous le même instrument dans le cas de l'orchestre et de la musique de chambre ?
MB : Je ne change pas d'instrument selon les projets, je trouve important de se donner complètement à un instrument pour être vraiment capable d'en sortir le maximum.
RM : Pouvez-vous évoquer votre expérience avec le DEWO (Orchestre du Divan occidental-oriental) qui semble avoir joué un rôle essentiel dans votre formation musicale et humaine ?
MB : C'est tout simplement le lieu de mon éducation musicale : j'y ai rencontré mon professeur, Axel Wilczok, j'ai appris comment jouer dans un orchestre, j'ai eu l'occasion d'approfondir mes connaissances musicales générales. En outre, cela m'a été d'un grand profit que d'avoir fait partie d'un groupe qui est sans doute unique au monde, du fait de l'origine de ses membres.
RM : Quels sont vos principaux projets en cours, en termes de collaborations, de répertoire et de production ?
MB. : Le concerto de Schoenberg à Rome avec Antonio Pappano, le concerto d'Alexandre Glazounov à Francfort, le concerto de Béla Bartók à Berlin. Pour le centenaire d'Alberto Ginastera, je vais jouer son concerto à Madrid et Valence, je fais une tournée en Australie avec un programme de récital combinant Boulez, Bach et Bartók. C'est un grand plaisir de se plonger dans un tel travail !
RM : Pensez-vous que la culture est indispensable au musicien d'aujourd'hui ? Vous arrive-t-il de travailler avec des artistes d'autres disciplines, danseurs, comédiens, écrivains, plasticiens ? Vos études de philosophie et donc sans doute d'esthétique vous aident-elles à penser les œuvres que vous interprétez ?
MB: Avoir fait des études de philosophie, même si je n'ai pas pu les terminer, est quelque chose de très important pour moi. J'ai appris comment penser, ce que j'ai pu appliquer aux œuvres musicales, surtout au niveau de l'analyse. Je n'ai pas vraiment eu l'occasion de collaborer avec des artistes d'autres disciplines, c'est pourquoi je me réjouis tellement de pouvoir faire le projet à l'Opéra de Paris ; c'est une occasion pour moi de voir une autre discipline artistique de l'intérieur.