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À Genève, Béatrice Uria-Monzon bouleversante Didon des Troyens

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Genève, Grand Théâtre. 15 et 17-X-2015. Hector Berlioz (1803-1869) : Les Troyens, grand opéra en cinq actes. Livret du compositeur d’après L’Enéide de Virgile. Version de Concert. Avec Michaela Martens, Cassandre ; Ian Storey, Enée ; Béatrice Uria-Monzon, Didon ; Tassis Christoyannis, Chorèbe ; Brandon Cédel, Panthée ; Günes Gürle, Narbal ; Doninik Chenes, Iopas ; Amelia Scicolone, Ascagne ; Dana Beth Miller, Anna ; Bernard Richter, Hylas ; Michail Milanov, Priam ; Jérémie Schütz, Hélénus ; Mi-Young Kim, Hécube/Le Spectre de Cassandre ; Aleksandar Chaveev, Un soldat ; Sami Luttinen, Le Spectre d’Hector ; Rodrigo Garcia, 1ère Sentinelle ; Phillip Casperd, 2ème Sentinelle ; Nicolas Carré, un chef grec. Chœur du Grand Théâtre de Genève (Direction : Alan Woodbridge). Royal Philharmonic Orchestra. Direction musicale : Charles Dutoit

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Vingt ans après son enregistrement à la tête de l'Orchestre Symphonique de Montréal, propose une nouvelle lecture concertante des Troyens d' sur la scène du Grand Théâtre de Genève.

CarthageEst-ce l'acoustique du Grand Théâtre de Genève qui ne se prête pas idéalement aux versions concertantes d'opéra ? Reste qu'en comparaison avec l'enregistrement en studio que réalisa avec l'Orchestre Symphonique de Montréal en octobre 1993, le apparaît plus pâteux, les pupitres ayant peine à se détacher les uns des autres. Une pâte qui rend bientôt le discours musical presque monotone, manquant de contrastes. Peut-être même est-ce au chef d'orchestre et aux musiciens d'adapter leurs sons à la salle. Pourtant la musique reprend le dessus sur l'acoustique dans la « Pantomime » quand, dans un diminuendo admirable de l'orchestre, le solo de clarinette a habité l'espace jusqu'à un pianissimo presque impalpable.

Durant toute « La Prise de Troie » – objet du premier jour de ce concert – (Cassandre) malgré les failles de sa diction française, offre une voix faite de puissance et de chair pour ce personnage augurant de la destruction de Troie. A ses côtés, le baryton grec (Chorèbe) aborde son personnage avec beaucoup de simplicité. Sans jamais tomber dans le pathos, ses mots à Cassandre sont ceux d'un mari aimant et passionné, et son chant coule comme un baume. Sans forcer son instrument, la diction française s'en trouve tout naturellement excellente.

Quant au ténor (Enée), il empoigne son rôle avec une telle véhémence qu'il trouve bientôt les limites de justesse d'une voix dont on décèle l'usure. La qualité vocale discutable de cet Heldentenor accuse déjà un large vibrato et, hormis quelques claironnants aigus, on ressent l'effort que le ténor doit faire pour tenir la distance de cette partition. Comme la Cassandre de , le chanteur britannique pèche dans sa diction française rendant ses interventions à la limite du supportable.

Quelques jours après l'épisode de la prise de Troie, convie le public genevois au second volet de la saga épique de Berlioz avec « Les Troyens à Carthage » qui voit Enée se réfugier à Carthage où il va tomber amoureux de la reine Didon.

Etrangement, pour cette deuxième partie du monument berliozien, la musique du semble s'être éclaircie depuis sa prestation précédente ! Effets de la température, de l'humidité ou plus probablement de la prise de contact des musiciens et du chef avec la salle du Grand Théâtre ? Reste que le dosage du volume sonore de l'orchestre apparaît mieux contrôlé, la présence vocale habitée de la mezzo soprano (Didon) n'étant certainement pas étrangère à cette sensible différence.

Les Troyens
Remplaçant en dernière minute sa compatriote Clémentine Margaine, , en grande forme vocale, délivre une prestation d'une exceptionnelle beauté. Investissant son personnage avec une rare sensibilité, une fragilité exacerbée et une féminité touchante, elle prend fait et cause de son personnage dans une interprétation profondément touchante. Mesurant son chant pour extraire la chair du personnage, la mezzo française enchante son auditoire. Culminant l'émotion dans son « Nuit d'ivresse et d'extase infinie ! », elle domine la scène à tous moments. Investie, habitée, authentique, envahit l'espace musical sans autre théâtre que son chant. Ne jouant les mots du poème que par un imperceptible balancement du corps, elle chante Berlioz. Elle est le chant. Elle est Didon. Elle est le théâtre. On retient son souffle. On ne voit d'autre que sa frêle personne, que la femme qui va mourir de l'abandon de son amant. Dans son « Adieu, fière cité », Béatrice Uria-Monzon offre un ultime chant chargé de sa quête artistique.

Dommage que la beauté interprétative de la mezzo française n'a pu influencer le chant de (Enée) qui ne parvient plus à le moduler pour le rendre expressif. Parmi les autres solistes, on se souviendra de la belle clarté et de l'excellence du phrasé et de la diction du ténor suisse (Hylas). De même qu'on reste impressionné par la profondeur vocale de la basse (L'Ombre d'Herctor) et par la belle voix de (Narbal), on jouit de la projection vocale étourdissante de la mezzo soprano américaine (Anna).

Obéissant à la baguette d'un Charles Dutoit très inspiré, le chœur du Grand Théâtre de Genève, superbement préparé, admirable dans ses forte comme dans ses pianissimi, couronne sa prestation avec une diction française frisant la perfection.

Crédit photographique : © GTG/Magali Dougados

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Genève, Grand Théâtre. 15 et 17-X-2015. Hector Berlioz (1803-1869) : Les Troyens, grand opéra en cinq actes. Livret du compositeur d’après L’Enéide de Virgile. Version de Concert. Avec Michaela Martens, Cassandre ; Ian Storey, Enée ; Béatrice Uria-Monzon, Didon ; Tassis Christoyannis, Chorèbe ; Brandon Cédel, Panthée ; Günes Gürle, Narbal ; Doninik Chenes, Iopas ; Amelia Scicolone, Ascagne ; Dana Beth Miller, Anna ; Bernard Richter, Hylas ; Michail Milanov, Priam ; Jérémie Schütz, Hélénus ; Mi-Young Kim, Hécube/Le Spectre de Cassandre ; Aleksandar Chaveev, Un soldat ; Sami Luttinen, Le Spectre d’Hector ; Rodrigo Garcia, 1ère Sentinelle ; Phillip Casperd, 2ème Sentinelle ; Nicolas Carré, un chef grec. Chœur du Grand Théâtre de Genève (Direction : Alan Woodbridge). Royal Philharmonic Orchestra. Direction musicale : Charles Dutoit

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