Plus de détails
Jean-Luc Caron, musicologue spécialisé dans l’étude et la diffusion de la musique nord-européenne, entraîne depuis quelques années les lecteurs de Resmusica dans une ballade étonnante en pays scandinaves. Pour accéder au dossier complet : Brèves scandinaves
Bedřich Smetana (1824-1884), père du poème symphonique Ma patrie, du Quatuor « De ma vie » et de l'opéra La fiancée vendue, représentant du nationalisme et de la tradition romantique tchèques, lutta sa vie durant en faveur de sa langue et de son pays, qu'il quitta toutefois quelques temps pour la Suède.
Bedřich Smetana, encore jeune, ne parvenait pas à tracer son sillon au sein de la société tchèque qui tardait à reconnaître ses potentialités de sorte que progressivement le découragement l'envahit. S'ajoutait à cela une sévère répression politique autrichienne et des difficultés financières personnelles. C'est alors qu'un célèbre pianiste virtuose tchèque de l'époque, Alexandre Dreyschock, son aîné de six années, lui suggéra de gagner la ville suédoise de Göteborg, deuxième plus grande agglomération du pays, dont le Philharmonique était à la recherche d'un directeur musical. Smetana signa pour une première saison musicale hivernale. Mais il revint chaque année d'octobre à juin entre 1856 et 1861, ne retournant en Bohème ou à Prague que pendant les mois d'été.
En dépit de ses longues absences, Smetana se sentait profondément tchèque et n'envisagea à aucun moment de prendre définitivement ses distances avec sa patrie vénérée. Dans le Nord de l'Europe, il rencontra un certain succès (on ne saurait parler de triomphe) et poursuivit régulièrement son travail créateur inspiré par sa culture tchèque. La nouvelle de la mort de Katy (en 1859), sa première femme, lui parvint ; elle laissait une petite fille, leur fille. Néanmoins, Smetana se remaria un an plus tard avec Betty. Il lui dédia ses Souvenirs de Bohème tout en opérant quasiment de même en faveur de Frödja sa maîtresse suédoise !
Durant ces mois passés dans le Nord de l'Europe, il enseigna, dirigea, composa et s'imposa davantage comme musicien, ne cachant à aucun moment son admiration pour Franz Liszt dont il reçut en retour l'amitié et le soutien. Il y élabora trois poèmes symphoniques bien connus aujourd'hui, à savoir Richard III (1858), Le camp de Wallenstein (1859) et Haakon Jarl (1861), mais également un certain nombre de pièces pour piano très bien ficelées. Dans ces compositions, Smetana n'abandonna nullement son héritage centro-européen et ne laissa pas apparaître de stigmates patents en provenance de l'art musical suédois.
Au cours de la saison 1859-60, il donna des récitals, dirigea une société chorale et ouvrit une école de musique. Il organisa des concerts de musique de chambre tout en dirigeant l'oratorio Elijah de Mendelssohn et joua le Troisième Concerto pour piano de Beethoven. L'année suivante, il défendit des œuvres de Richard Wagner (Prélude de Tristan, chœurs de Tannhäuser et Lohengrin) puis en 1860 toujours, sa propre Symphonie triomphale et le Konzertstück de Weber. Il dirigea aussi des œuvres de Bach (Messe en si mineur), Schumann (Genoveva), Haendel (Le Messie), le Requiem de Mozart, sans oublier La fille du Roi des elfes de Niels Gade…
En dépit d'indéniables réussites publiques il visita Göteborg une dernière fois en 1862 donnant des récitals appréciés et enseignant durant deux mois.
Définitivement de retour au pays, après ces années formatives, il poursuivit sans faille son chemin au point d'être plus tard considéré comme l'authentique père de l'Ecole musicale tchèque. In fine, Smetana ne fut pratiquement pas influencé par ce qu'il entendit au cours des années qu'il vécut en Suède.
Plus de détails
Jean-Luc Caron, musicologue spécialisé dans l’étude et la diffusion de la musique nord-européenne, entraîne depuis quelques années les lecteurs de Resmusica dans une ballade étonnante en pays scandinaves. Pour accéder au dossier complet : Brèves scandinaves