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Galerie EOF 01-XII-2014. PROJET BLOOM: oeuvres de Carl-Philip Emmanuel Bach (1714-1788), sonate pour flûte seul; François Couperin (1668-1733), pièces de clavecin; Colon Roche (né en 1974), Etat second du verre d’eau; Giacinto Scelsi (1905-1988), Pwyll pour flûte. Florient Azoulay, comédien; Matteo Cesari, flûte, Olivier Innocenti, bandonéon, accordéon.
Désacraliser (les oeuvres), décloisonner (les arts), délocaliser (les concerts): autant de concepts qui animent le Projet Bloom défendu bec et ongles par son concepteur et compositeur Colin Roche.
Avec les artistes, musiciens, comédiens, plasticiens, dont il s'entoure, il entend créer de nouveaux gestes artistiques embrassant le théâtre, les mots, les images et la musique, voire le public, inclus parfois dans la performance en train de se faire.
Dans la galerie d'art EOF, l'écrivain et artiste sonore danois Morten Sondergaard présente son installation « La pharmacie des mots », des boites de couleurs petites et grandes, rappelant celles des médicaments, sont présentées sur des rayonnages prévus à cet effet. Les boites sont pleines de mots, soigneusement classés (adverbes, interjections, articles… ) et augmentés d'une notice d'usage – définition, précautions particulières, posologie – aussi systématique que drôle. Le comédien Florient Azoulay est installé devant une sorte de grande cheminée projetant des faisceaux lumineux en intermittence; il choisit au hasard des boites, dont il ne connait ni le contenu ni la pertinence, pour lire chacune des notices; assumant en virtuose ce happening risqué, il articule, énumère, accumule, abrège, glose, avec une verve et un esprit d'à propos très acéré. A ses côtés, les musiciens n'ont qu'à bien se tenir, qui doivent répondre à son bon vouloir, en faisant résonner ici et maintenant un mouvement de sonate de Carl Philip Emmanuel Bach – sous le geste élégant de Matteo Cesari – des pièces de François Couperin, transcrites et jouées avec une grâce indicible au bandonéon par Olivier Innocenti; ce dernier prendra également son accordéon pour une improvisation à laquelle vont se superposer d'autres actions plus sonores. Invitant Morten Sondergaard à lire en danois ses propres écrits, interpelant le traducteur de la « Pharmacie des mots » à propos d'un poème d'Emily Dickinson, dont il conteste la version française, Florient Azoulay improvise, rebondit, articule cette « Momentform » avec une réactivité et un aplomb peu communs. Les musiciens sont sous pression mais répondent du tac au tac au performer soucieux, semble-t-il, de faire entendre au bon moment toutes les pièces du programme musical: l'agile et envoûtant Pwyll pour flûte solo de Giacinto Scelsi et le très énigmatique Etat second du verre d'eau de Colin Roche, pour flûte basse et tête de flûte, dont Matteo Cesari modèle avec énergie les morphologies bruitées et stylise la dimension scénique du geste instrumental.
On est séduit, amusé, agacé parfois mais toujours curieux des rebondissements d'un spectacle dont Florient Azoulay reste le maître d'oeuvre. Le verre amical à l'issue du concert participe de cet instant, privilégié autant que convivial, partagé entre les artistes et le public.
Crédit photo : © Projet Bloom
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Galerie EOF 01-XII-2014. PROJET BLOOM: oeuvres de Carl-Philip Emmanuel Bach (1714-1788), sonate pour flûte seul; François Couperin (1668-1733), pièces de clavecin; Colon Roche (né en 1974), Etat second du verre d’eau; Giacinto Scelsi (1905-1988), Pwyll pour flûte. Florient Azoulay, comédien; Matteo Cesari, flûte, Olivier Innocenti, bandonéon, accordéon.