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Lyon. Maison de la Danse. 27-XI-2014. Cie DCA/ Philippe Decouflé : Contact. Création 2014. Mise en scène et chorégraphie : Philippe Decouflé. Musique originale et interprétation live : Nosfell, chant, guitare, piano ; Pierre Le Bourgeois, violoncelle. De et avec : Christophe Salengro, Alice Roland, Clémence Gaillard, Eric Martin, Alexandra Naudet, Stéphane Chivot, Flavien Bernezet, Sean Patrick Mombruno, Meritxell Checa Esteban, Violette Wanty, Julien Ferranti, Ioannis Michos, Lisa Robert, Suzanne Soler. Films : Animation des œuvres de Marcel Storr, Les mégapoles ; Extraits de Faust, une légende allemande, de F. W. Murnau ; Films originaux réalisés par Philippe Decouflé et Olivier Simola.
Le nouvel opus de Decouflé et de sa déjantée virtuose compagnie DCA part d'une mise en abyme toute simple : un spectacle se crée dans le spectacle, tandis qu'évoluent sur scène donc dans le spectacle du spectacle Contact, le danseur génie élastique de la voix à l'orteil, Nosfell, et son comparse placide violoncelliste virtuose aussi, Pierre Le Bourgeois.
Contact explore le thème de Marguerite et Faust, Dieu, le Diable, le Pacte et la révolution des genres, des planètes et des queues de pie à paillettes. C'est un feu d'artifice d'émotions aux palettes variées sur fond de brisure de câbles maîtrisées, un régal d'inventivité dans la simplicité envoutante du baroque sur le mode Decouflé. Le baroque est en toute logique ampoulé, dégoulinant, compliqué et foisonnant ; or avec la compagnie DCA, il devient tout simplement une seconde nature coulant de source, ruisselle de drôlerie cataclysmique, passe du léger déhanché aux profondeurs insondables du mystère divin sur pas de bourrée, sans transition ! L'ensemble est fluide dans l'ampoulé, simple dans le compliqué, abyssal dans la surface et surtout poilant à en pleurer !
Bref, Jean-Claude est Alice Roland ou plutôt la grande danseuse est Jean-Claude sur scène, donc un transsexuel présentant un spectacle sur Faust. Et Jean-Claude-Faust cherche Marguerite, qui est stressée parce que « Marguerite, je suis, Marguerite, je stresse » dit Jean-Claude, enfin Alice Roland en Marguerite cette fois, beaucoup plus loin en fait dans la trame bien cadencée du spectacle. Nosfell se fond à la scène avec une telle souplesse qu'il a l'air d'un danseur de DCA.
Dieu, le cosmos, les nuages et la pataphysique
Quand une sorte de Dieu, alias Christophe Salengro, dont les oreilles sont toujours aussi grandes et le flegme aussi sympathique (difficile d'oublier sa tête en bas en publicité, les pieds collés au plafond, ou sa tordante performance a capella dans Codex, en tutu) au paradis, où glissent des nuages sur jambes, ergote sur les Gestes et opinions du Dr Faustroll, pataphysicien d'Alfred Jarry, ou clame des extraits du Faust de Goethe, plus classique, dans la traduction de Nerval, il faut surtout ne pas suivre, comme l'indique l'absurde sensé de Contact.
En enfer, où les costumes virent au rouge, la corde des voltigeuses tourne de plus en plus vite mettant la scène en transe. Les images préfilmées des danseurs, sur un terrain de basket, en « guerre » de gangs au cœur d'une cité ou bien captées sur le moment projetées en fond, les dédoublent de manière envoûtante.
Choristes en transe, maternité exhibée et main qui repousse
Le chant se mêle au cirque, à la danse et au cinéma quand passent des moments de la version muette du Faust de Murnau. Huit danseurs en genre inversé se font choristes empaillettés.
Alexandra Naudet, enceinte de plusieurs mois, exhibe son ventre rebondi, les pas de deux se font plus lents, plus doux.
«Jean-Claude-Faust, c'est merveilleux, quelle grâce, on dirait un oiseau !»
Nosfell se déchaîne sur scène, mettant le feu aux poudres, virevoltant dans des notes haut perchées puis plus basses, du soprano léger au baryton pur, avec son micro, en dansant aussi bien qu'il chante et joue de la guitare ou du piano.
Maracas, banjo électrique s'allient au violoncelle de Pierre Le Bourgeois, dont la barbe ne cille pas.
Les performeurs acrobates s'acheminent vers une comédie musicale inspirée des chorégraphies de Busby Berkeley. « L'harmonie, l'arbrisseau, l'artifice ou l'araignée », entend-on. Puis « ns chantons de temps en temps sans rime et sans raison et parfois vice versa », ajoutent-ils, et « Dog », « God », c'est proche quand même. La tête à la perruque blonde portée sur autre tête blonde revient en Gorgone et tout va à vau l'eau à l'avenant.
Les réflexes de Codex, où les danseurs suivaient, entre autres, les lignes de leur corps comme si c'était celui d'un autre, ressurgissent quand un danseur se dissocie de son corps en se coupant la main avec une scie et fait repousser ses doigts par un jet d'arrosoir.
Chaque danseur en costume de ville déroulant son numéro nous rappelle la farandole de BiT de Maguy Marin, tournant, approchant, apparaissant et disparaissant sur un rythme ici électro-pop endiablé et non plus classique et angoissé.
Le spectateur, mis lui aussi en abîme, ressort essoufflé mais comblé, de cette foire aux « propositions libres » bien dans l'axe de DCA-Decouflé, qui ne change pas mais se renouvelle avec joie !
Crédit photographique : Laurent PHILIPPE
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Lyon. Maison de la Danse. 27-XI-2014. Cie DCA/ Philippe Decouflé : Contact. Création 2014. Mise en scène et chorégraphie : Philippe Decouflé. Musique originale et interprétation live : Nosfell, chant, guitare, piano ; Pierre Le Bourgeois, violoncelle. De et avec : Christophe Salengro, Alice Roland, Clémence Gaillard, Eric Martin, Alexandra Naudet, Stéphane Chivot, Flavien Bernezet, Sean Patrick Mombruno, Meritxell Checa Esteban, Violette Wanty, Julien Ferranti, Ioannis Michos, Lisa Robert, Suzanne Soler. Films : Animation des œuvres de Marcel Storr, Les mégapoles ; Extraits de Faust, une légende allemande, de F. W. Murnau ; Films originaux réalisés par Philippe Decouflé et Olivier Simola.
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