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Piotr Beczala et Simone Kermes au Festival de Musique de Menton

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Festival de Musique de Menton, Parvis de la Basilique Saint-Michel Archange, 13 et 14-VIII-2014 ; Musée Jean Cocteau, 13-VIII-2014.

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Le plus ancien festival de musique en France (fondé par André Borocz en 1949), le Festival de Musique de Menton accueille, pour clore sa 65e édition, deux chanteurs lyriques, le Polonais Piotr Beczala et l'Allemande . S'ils ont des caractères musicaux très opposés, leurs forces de fascination le sont aussi.

Piotr Becsala©Christian Merle 1Piotr Beczala confirme l'excellence de son art

Piotr Beczala, devenu, depuis quelques années, l'une des étoiles les plus demandées de par le monde, est avant tout un chanteur d'opéra. La soirée du 13 août est donc d'une grande rareté, car c'est la deuxième fois, selon Paul-Emmanuel Thomas, directeur artistique du Festival, qu'il donne un récital entièrement consacré à des lieder et à des mélodies. Rare aussi est son programme, avec des pièces du compositeur polonais Mieczyslaw Kalrowicz (1876-1909) et Mélodies tziganes d'Anton Dvořák (1841-1904).

Dès le début du concert, à travers les 16 lieder du cycle Les amours du poète de , sa voix de ténor pénètre l'espace du parvis de la Basilique Saint-Michel, enclos magique sur la mer. Une douceur rêveuse domine par moments, alors qu'à d'autres, sa voix s'envole avec intensité dans le ciel étoilé, magnifié par une belle lune qui s'élève au rythme de la musique. Le couvercle du piano est grand ouvert, mais sa voix, puissante, n'est jamais couverte. S'il montre parfois une légère faiblesse dans les aigus extrêmes, il la compense ingénieusement avec un timbre ouaté, comble de raffinement. La pianiste, , accompagnatrice soliste à l'Opéra de Vienne, connaît parfaitement le répertoire et sait comment prendre chaque phrase, chaque note. C'est un bonheur pour les chanteurs que de pouvoir jouer avec une telle musicienne. Ainsi, vers la fin du cycle, notamment dans Ich hab'im Traum geweinet (J'ai pleuré en songe), elle joue les accords entrecoupés d'une telle manière qu'on a l'impression que le chant et le piano sont musicalement séparés, comme s'ils appartenaient à deux mondes différents ou comme s'il existait une rupture psychologique – peut-être entre le rêve et la réalité. Pour les Mélodies de Karlowicz, Beczala a choisi des extraits des opus 1 et 3. La langue polonaise, qui n'a pas beaucoup de sons ouverts, ajoute un caractère sobre à la musique qui n'est pas d'une gaîté éclatante, mais souvent intériorisée. Quatre Mélodies de Serge Rachmaninov (1873-1943), prolongent la sobriété de la sonorité vocale, avant d'aborder les Mélodies tziganes , plus joyeuses. Après un si beau récital, il gâte le public avec quatre bis, deux airs traditionnels italiens ( Catari et O sole mio ), « E lucevan le stelle » de Tosca et un lied , confirmant sa santé vocale comparable à celle du physique d'un grand athlète.

Grand show baroque de

Le concert de clôture est assuré par et dans un programme baroque, avec des airs castrats de (1686-1768), (1678-1741), (1660-1725), Giovanni-Battista Pergolèse (1710-1736), Leonardo Leo (1694-1744) et Johann-Adolf Hasse (1699-1783). Si les castrats étaient des stars de l'époque, adulés et acclamés dans toute l'Europe, elle reproduit ce caractère à sa manière, en dansant, en bougeant les épaules et les bras, comme on le ferait en boîte de nuit ou dans un concert de rock. Sa tenue va de pair avec son parti pris : une robe à paillettes bleues et à crinoline dont le devant de la jupe, ouvert, laisse les jambes visibles, et des chaussures à talon de 15 cm , également pailletées, mais de couleur argent. Dans des morceaux ou des passages lents et tranquilles, elle chante de long souffle, mais dès qu'il y a un mouvement dans la musique, elle fait bouger son corps, comme si elle ne pouvait pas faire autrement. Ces impulsions physiques empêchent souvent l'achèvement d'un passage vocalisé, de sorte que les dernières notes d'une phrase sont plus ou moins coupées, ce qui est fort fâcheux. Quoi qu'il en soit, sa façon d'associer l'ancien au moderne fait quelque peu penser au film Marie-Antoinette de Sofia Coppola… Communicative, elle va plus loin dans cette association en invitant le public à frapper les mains dans sa dernière pièce (elle est toujours dans le sphère baroque !) ; et encore plus loin dans les quatre bis qu'elle donne : accompagnée par le même ensemble baroque, avec tout le caractère qu'il génère (diapason, jeu, sonorité, … ), elle chante Lili Marlène et Non, je ne regrette rien . Effet étrange assuré ! Elle termine cependant avec Lascia ch'io pianga (extrait de Rinaldo de Haendel) comme dernier bis. Notons que le violoniste solo de l'ensemble offre une cadence extrêmement virtuose, d'une grande intensité, dans le Concerto en ré majeur op. 3 n° 9 de Vivaldi.

Christophe Rousset©Christian Merle 1 (1) Récital Rameau par

Le Festival propose à 18 heures une série de récitals d'une heure, « Concerts au Musée », au Musée Jean Cocteau situé au bord de la mer. Le 13 août, rend hommage à (1683-1764) à l'occasion des 250 ans de sa mort, avec trois Suites , en la majeur, en mi mineur et en sol majeur, où dominent son élégance et son assurance habituelles. Les ornements sont toujours insérés à juste dose, les lignes mélodiques jouées avec subtilité, en notes delicatement inégales. Après le concert, la ville de Menton lui décerne le prix spécial « Defensor mentoni ». En effet, le claveciniste a passé son enfance à Menton, dont une partie de sa famille est originaire, et c'est en assistant à des concerts du Festival qu'il a décidé de devenir musicien. La remise de prix se déroule en présence de ses parents, conférant à la cérémonie un caractère intime.

Crédit photographique : © Christian Merle

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Festival de Musique de Menton, Parvis de la Basilique Saint-Michel Archange, 13 et 14-VIII-2014 ; Musée Jean Cocteau, 13-VIII-2014.

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