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Que reste-t-il de la carrière de Raoul Pugno, mort il y a un siècle ? Cette interrogation l'annonce d'emblée : la mémoire collective a presque totalement tout effacé du riche parcours de ce pianiste de renommée internationale.
Né à Montrouge dans la proche banlieue parisienne (Hauts-de-Seine) le 23 juin 1852, Raoul Pugno est le fils d'un émigré d'origine italienne, musicien sans grande envergure, employé aux éditions musicales Wintringer qui, néanmoins, assure les débuts de sa formation bientôt renforcée par Joséphine Martin. Puis, l'enfant fréquente pendant quelques mois l'école Niedermeyer de Paris où il côtoie Gabriel Fauré et André Messager. Et ce, grâce à l'aide financière du Prince Poniatowski. Au Conservatoire de Paris (1866-1869), il étudie le piano auprès de Georges Mathias, un ancien élève de Chopin, et auprès d'Ambroise Thomas pour la composition. Sa nationalité italienne l'empêche de parachever sa formation dans l'optique de concourir au Prix de Rome. Il obtient plusieurs distinctions : premiers prix de piano (1866, 14 ans), harmonie et accompagnement (1867), orgue (1869) ; second prix de contrepoint et fugue (1869). C'est dans la classe d'orgue de François Benoist (1794-1878), ancien prix de Rome, pédagogue renommé et professeur de Bizet, Franck, Massenet, Saint-Saëns, qu'il travaille.
Lors des dramatiques événements de la Commune, Pugno prend une part active et manifeste une orientation révolutionnaire. Dès le 12 mai 1871, il n'a que 18 ans, il est nommé par le gouvernement, membre de la Commission d'aide à l'art musical et aux artistes. On le propulse à la tête de l'Opéra de la capitale en tant que directeur musical ! Cet engagement politique fortement marqué laissera des traces des années durant ; toutefois la chute de la Commune ne signifia pas l'application de châtiment vengeur à son encontre.
Entrée dans la carrière
Le jeune homme ambitionne fermement de devenir compositeur d'opérettes. En dépit de certaines oppositions, il devient organiste pendant plus de vingt ans à l'église Saint-Eugène (1872-1892) et également chef de chœur (1878-1892). En 1874, il est aussi nommé chef de chœur au Théâtre Ventadour (anciennement Théâtre-Italien). Il enregistre plusieurs échecs avec ses musiques de scène. Ses activités de pédagogue se déroulent au Conservatoire de Paris où il enseigne l'harmonie (1892-1896) avant d'y être nommé professeur de piano (1896-1901).
Les débuts du pianiste
Ses débuts en tant que pianiste se situent en 1858. A n'en pas douter, Pugno possède une fameuse technique de jeu et d'immenses qualités dont une inspiration interprétative reconnue par ceux qui l'ont entendu jouer. Mais cependant le succès tarde à se manifester. Ce n'est que la quarantaine atteinte qu'il débute réellement une carrière de concertiste. Dès lors, il se produit en récital de sonates dans le monde entier. Son jeu est caractérisé par une belle flexibilité et une grande légèreté de toucher. A l'automne 1881, Raoul Pugno et Pauline Viardot (1821-1910, contralto, pianiste et compositrice) donnent des concerts en Norvège.
Les grandes étapes de sa carrière de concertiste
C'est en 1893 qu'il embrasse vraiment une carrière de concertiste : il a plus de quarante ans. On lui demande de jouer pendant la saison de la Société des Concerts du Conservatoire. Il impose le Concerto en la mineur de Grieg. Son étiquette collante de communard disparait ainsi totalement. Il joue en 1895 sous la baguette d'Edouard Colonne la Fantaisie pour piano et orchestre de Debussy composée en 1889-1890. Il donne de nombreux récitals et les années passant il se hisse au plus haut niveau. On le considère rapidement comme l'un des plus grands virtuoses de son époque. Cette ascension le conduit à se produire en récitals en Angleterre en 1894 et en 1896, il débute une fameuse collaboration avec le célèbre violoniste belge Eugène Ysaÿe (1858-1931). Leurs concerts donnés à la Société ancienne et moderne attirent un nombreux public à Paris et à Bruxelles. En 1897-1898, ils se rendent aux Etats-Unis où ils défendent en particulier les sonates de Beethoven. Leur gloire internationale est immense et ne connut pas d'équivalent dans la période précédant la guerre. Leur duo s'illustre dans la musique de Fauré, Saint-Saëns et Chausson. Ils proposent en création les sonates pour violon et piano d'Albéric Magnard et de Louis Vierne. Pugno joue aussi le Concerto n° 5 de Saint-Saëns.
Aux Etats-Unis, toujours en 1898, à Carnegie Hall, il donnera la première américaine des Variations symphoniques de César Franck avec l'Orchestre symphonique de Chicago. On le retrouve en tournée en Espagne en compagnie de la chanteuse Maria Gay (1879-1945). Il défend avec un talent amplement souligné les concertos pour piano de Mozart. En juin 1902, il joue lors du même concert le Concerto en mi bémol de Mozart, le Concerto n° 3 en do mineur de Beethoven et le Concerto n° 4 en do mineur de Saint-Saëns au Queen's Hall de Londres sous la baguette d'Edouard Colonne. Il se manifeste aussi brillamment dans la musique de chambre, défendant avec talent la musique de Mozart, Chopin, Franck qu'il fait apprécier à ses auditeurs. A ses débuts, Pugno fut un avocat de Wagner en France. Avec Debussy, sur deux pianos, lors d'un concert devenu fameux (6 mai 1893) il joue des parties de l'Or du Rhin de Wagner lors d'une représentation parisienne (en fait, il s'agissait d'une conférence-concert). On donne également des extraits de Lohengrin.
Si sa première tournée de concerts en Amérique ne connait pas un immense succès, en 1909, la réputation aidant, ses honoraires augmentent très sensiblement. Notons qu'il joue la Sonate en ut mineur de Grieg avec Paul Viardot. Dans sa ville de Gargenville pendant l'été 1909 il interprète souvent des partitions à deux pianos avec Saint-Saëns et avec la jeune Nadia Boulanger.
Pugno, défenseur zélé de l'œuvre d'Edvard Grieg
De nombreux pianistes français et étrangers ont très souvent joué à Paris et ailleurs le beau Concerto en la mineur op. 16 du musicien norvégien (composé en 1868) captivant presque immanquablement les bravos du public ; et déclenchant une adhésion partagée de la critique professionnelle. C'est le pianiste belge Arthur de Greef (1862-1940) qui défendait jusque-là avec brio l'opus 16. Pugno gagne une franche célébrité le temps d'un concert donné le 24 décembre 1893 lorsqu'il interprète le Concerto pour piano en la mineur du Norvégien Edvard Grieg à la Société des Concerts du Conservatoire. Si la musique de Grieg renforce sa notoriété, il n'est ni le premier ni le seul à la défendre. Plus précisément, il le donne une seconde fois peu après avec les mêmes partenaires.
Le Concerto en la mineur est joué par Pugno aux Concerts-Colonne le 21 janvier 1894 fait grande impression. Dans Portraits de musiciens, Adolphe Boschot rapporte (1946): « Ce jour-là le concerto pour piano reçut une exécution inoubliable. Tandis que Raoul Pugno, pesant, massif, énorme, pétrissait le clavier d'où jaillissait un poétique sortilège de sons veloutés et caressants, Ed. Grieg, dirigeant l'orchestre, faisait valoir la délicatesse de son style, sa tendresse nostalgique ou ses ressauts de fièvre et de passion. » Il le donne encore le 14 janvier 1894 chez Colonne.
Pugno, avec quelques autres, vient accueillir, le 10 avril 1894, Edvard et Nina Grieg à leur arrivée à Paris. Edvard Grieg bénéficie alors d'une immense gloire dans la capitale française. C'est lors de ce séjour qu'il rencontre Camille Saint-Saëns dont il appréciait la musique. Un concert au Châtelet de Paris le dimanche 22 avril 1894 attire près de 3000 spectateurs enthousiastes. L'Orchestre Colonne exécute, entre autres œuvres de Grieg, le Concerto en la mineur avec en soliste Raoul Pugno (Grieg est à la direction). Pugno est rappelé à quatre reprises après le concert. Grieg attribue les retombées critiques partagées à son refus de se soumettre à des visites aux professionnels au cours desquelles l'on remettait volontiers de l'argent en échange de comptes-rendus obligeants.
Le concert est un véritable triomphe. « La prestigieuse exécution qu'en a donnée R. Pugno : il est impossible de rêver une plus parfaite interprétation… », écrit Henry Eymieu dans l'Art Musical. Grieg dans un courrier du 6 mai 1894 à son ami Beyer précise : « Raoul Pugno a exécuté le concerto pour piano avec fougue, ampleur et une formidable puissance. En entrant dans le foyer des artistes, j'ai bien sûr embrassé ce pianiste dégoulinant de sueur en lui disant : « Mais vous êtes le Rubinstein français ! »
Willy dans La Mouche des Croches rapporte : « A 3 h 15 m, entrée de Raoul Pugno-à-la-barbe-d'ébène, dont l'interprétation du Concerto en la mineur de Grieg avait déjà, dimanche dernier, fanatisé des auditeurs, pourtant placides (jusqu'au coma quelquefois) ; belle œuvre plus musicale que pianistique, Dieu merci ! d'une élégante écriture, exécutée divinement… » Ce même Willy après quelques critiques concernant les autres œuvres de Grieg proposées lors du concert renseigne :« Raoul Pugno soulève des tempêtes d'acclamations « en pleyelant » le célèbre Concerto dont la finale à la zingara fait toujours frétiller sur leurs sièges les grosses dames de l'assistance, et les minces itou. » Précisons que peu après le maître norvégien assiste à un concert de pièces de Pugno interprétées par lui-même.
En tant que critique, Claude Debussy se montrait souvent acerbe, sarcastique, injuste. Très rapidement il se mit à critiquer Edvard Grieg et sa musique. Pourtant il avait aimé sa musique et même avait subi d'indéniables influences. Il est vrai que Grieg critiqua sévèrement et à plusieurs reprises l'attitude de la France dans l'Affaire Dreyfus provoquant l'irritation de nombreuses personnalités pointilleuses en matière de patriotisme et de nationalisme. Il connaissait bien Raoul Pugno et, on l'a dit, avait même joué du piano avec lui. Pour La Revue blanche du 1er mai 1901 il note : « Ensuite M. Pugno présenta un concerto de Mozart qu'on ne peut mal jouer tellement il est bien écrit pour le piano. Naturellement il y fut supérieur, selon sa coutume. » Le ton change dans sa chronique du 20 avril 1903 pour Gil Blas où une fois de plus il s'en prend à Grieg et à ceux qui le défendent. « M. E. Grieg est ce compositeur scandinave qui fut si peu gentil pour la France lors de « l'Affaire…. » « Et puis, on a beau être Scandinave on n'en est pas moins homme… Il est dur de se priver de l'enthousiasme que Paris réserve si gentiment aux étrangers, dont plus d'un n'a pas la valeur sonore de M. Grieg. » Il ne peut s'empêcher cette fameuse description : « Enfin ! J'ai pu voir M. Grieg… De face, il a l'air d'un photographe génial ; de dos, une façon de porter les cheveux le fait ressembler à ces plantes appelées « soleil », chères aux perroquets et à ces jardins qui font l'ornement des petites gares de province. »
La description du concert se poursuit ainsi : « Mais des bravos éclatent… des dames rectifient la position de leur sourire… C'est Pugno aux belles mains. Vous savez que lorsqu'on voit Pugno, c'est que le concerto de Grieg n'est pas loin… il le joue effectivement ; et personne ne sait comme lui en tirer autant d'effet. Par une adresse invraisemblable il en sauve le côté « ficelle » et « truqué » ; on ne s'aperçoit pas que ce concerto, qui commence par du Schumann et finit par une apothéose digne d'Excelsior n'est pas une œuvre d'art très personnelle… Pugno n'a pas manqué à son habitude d'être admirable. Il fallait le voir revenir saluer le public en folie, avec un mouchoir qu'agitait une main gauche si honorablement fatiguée… » Il le donne encore le 28 avril 1895 avec l'Orchestre Colonne.
Au Théâtre du Châtelet, Concerts-Colonne, le dimanche 25 avril 1897 on annonce un « concert extraordinaire » avec le concours de R. Pugno et E. Ysaÿe avec le programme suivant : ouverture de Patrie de G. Bizet ; Concerto en la mineur de Grieg (avec en soliste Raoul Pugno), Divertissement de Lalo, Prélude et fugue en sol mineur de J.S. Bach et Poème pour violon et orchestre de Chausson (avec Eugène Ysaÿe). Après l'entracte, on entend Psyché de César Franck, Le Carnaval de Vienne de R. Schumann (avec Pugno) et des pièces de Widor, Mendelssohn et Berlioz.
Le Guide Musical du 12 février 1899, Hugues Imbert écrivit : « Nous avons hâte d'en venir, chez Raoul Pugno à l'artiste mûr, assagi, qui apparut tout d'un coup comme un virtuose de premier ordre au public du Conservatoire de Paris, dans la séance du 24 décembre 1893. La veille il était presque inconnu : le lendemain il avait déjà la gloire ; son nom voltigeait sur toutes les lèvres. C'est qu'il exécuta merveilleusement le Concerto en la mineur de Grieg… Le succès suivit comme une trainée de poudre. »
Lors du Festival de Musique internationale du 23 avril 1899, Pugno interprète le Concerto en la mineur (direction Edouard Colonne) ainsi que la Fantaisie de Schubert orchestrée par Franz Liszt. Sous la direction de Colonne, il l'exécute une nouvelle fois le 29 décembre 1901. Concert-Colonne le dimanche 19 avril 1903 consacré entièrement à la musique de Grieg (en dehors de la scène finale du Crépuscule des Dieux de Wagner, compositeur souvent associé lors des programmes de l'époque). Pugno y interprète bien sûr le Concerto en la mineur et Grieg lui-même prend ma baguette pour présenter la Première Suite d'orchestre de Peer Gynt. Triomphe public après une audition houleuse à son début relayé par une presse plutôt négative malgré la belle critique de Gabriel Fauré dans le Figaro. Signalons encore les concerts du 27 octobre 1907 sous la direction de Colonne (lors d'un concert à la mémoire de Grieg décédé le 4 septembre) et du 5 novembre 1913 au Théâtre des Champs-Elysées sous la direction de Guy Ropartz.
Pugno et Ysaÿe jouent la Sonate pour piano et violon op. 45 de Grieg le 10 mai 1897. Pugno et Jean Gérardy donnent une Sonate de Grieg au Nouveau Théâtre le 14 avril 1905.
Varia
Grand amateur d'art, connaisseur éclairé et collectionneur avisé, Pugno fréquente régulièrement l'Hôtel Drouot. Pugno a édité les œuvres de Chopin pour les éditions Universal à Vienne. Il prépare des éditions de travail d'œuvres de Schumann.
Il est Maire de Gargenville (Yvelines) de 1904 à 1908. Sa réputation renseigne sur ses habitudes : grand mangeur, grand lecteur (de livres et de partitions). Il fut l'ami de nombreux peintres et écrivains réalistes. Il laisse des ouvrages didactiques comme Les Leçons écrites de R.P. : Chopin (Paris, Librairie des Annales politiques et litt.), 1910.
Officier d'Académie (1884). Chevalier de la Légion d'Honneur (1897). Chevalier de l'instruction publique (1900).
La fin du musicien
A l'âge de 62 ans, il entame une nouvelle tournée de concerts en Russie peu avant le début de la Première Guerre mondiale. C'est à Moscou qu'il décède brusquement le 3 janvier 1914. Son corps est rapatrié en France où il est enterré à Gargenville dont il fut le maire pendant quelques années.
Lors de son décès, la rubrique nécrologique, La France a perdu un grand pianiste, de Miroir, datée du 18 janvier 1914, souligna « le charme de son jeu, dont la légèreté surprenait lorsqu'on voyait ce gros homme barbu, solidement assis sur une chaise, recordée par des chevilles de cuivres. » Il suit de sept ans la disparition de Grieg et précède de trois ans celle de Debussy.
Le Journal d'Amiens n'hésite pas en affirmant : « Sa virtuosité était incomparable, c'était un des maîtres du clavier. »
Témoignage discographique
Pugno nous a laissé des traces de son art grâce à des enregistrements réalisés en 1903 (pour Gramophone et Typewriter et compagnie à Paris). Son lyrisme, son toucher parfait, son art du phrasé nous confirment la grande valeur de ses interprétations. On n'y retrouve pas de rubato. Il fut probablement un des tout premiers pianistes de grande renommée à graver sa musique. Ces séances se déroulèrent à Paris en avril et novembre 1903. Il joua alors des pièces de Haendel, Scarlatti et Chopin ainsi qu'une de ses propres compositions un Impromptu-Valse. Il retint encore la Rhapsodie hongroise n° 11 de Liszt. Il grava aussi Sérénade à la lune, une de ses propres compositions.
Ses débuts à l'enregistrement précèdent d'un mois ceux de Grieg.
Un compositeur secondaire
Raoul Pugno a composé plusieurs opérettes : A qui la troupe, 1877 ; Le Valet de cœur (19 avril 1888, livret de P. Ferrier et C. Clairvielle) ; Le Retour d'Ulysse (Paris, 1er février 1889, livret de F. Carré) ; La Petite Poucette (1891, livret de M. Hennequin et M. Ordonneau)…
Parmi ses opéras-bouffes : Le Sosie (7 octobre 1887, livret de A. Valabrègue et H. Kéroul) ; La Vocation de Marius (29 mars 1890, livret de M. Carré et A. Debelly)…
Des opéras comiques : Ninetta (Paris, 23 décembre 1882, livret de M. Hennequin et A. Bisson) ; Tai-Tsoung (1894, livret de E. D'Hervilly) ; La Ville morte, inachevé (cf. infra).
On lui doit encore des ballets et fééries-ballets. Parmi eux , La Fée cocotte (G. Marot et E. Philipp, 1881) ;Les Papillons (Londres, 1884), Viviane (E. Gondinet, 1886, en collaboration avec C. Lippacher) ; La Danseuse de corde (Paris, 5 février 1892, A. Scholl et J. Rocques, 1892) ;Pour le Drapeau, 1895 ;Le Chevalier aux fleurs (A. Silvestre), 1897, en collaboration avec André Messager…
Sa musique de scène pour Joséphine vendue par ses sœurs connut un certain succès contrairement à ses autres productions dans ce registre (œuvre coécrite par Clément Lippacher et Victor Roger) ; Les Rois en exil (P. Delair, 1883)…
La Résurrection de Lazare, un oratorio, texte de E. Favin, et C. Grandmougin, 1879.
Parmi ses pièces pour piano : Les Soirs, Paysages…Il a transcrit pour deux pianos la Prière pour orgue de César Franck en 1900. Des mélodies comme Heures claires (E. Varheren.).
Sa musique, reposant sur une veine légère, est totalement tombée dans l'oubli.
Collaboration avec Nadia Boulanger
Pugno donne son soutien à la jeune Nadia Boulanger (née en 1887) dont il fréquente intimement la famille. Il joue sous sa direction sa Rhapsodie variée pour piano et orchestre. Il compose en sa compagnie plusieurs œuvres vocales. Parmi elles, le cycle de mélodies les Heures claires que Pugno et Marie de Wieniaswska interprètent à la Salle Pleyel en mai 1911.
Elle l'accompagne lors de sa tournée en Russie et achève son ultime partition, inachevée au moment de sa mort subite, l'opéra La Ville morte (livret de Gabriele D'Annunzio) qui sera donné à l'Opéra-comique.
Nadia Boulanger s'orientera ensuite comme l'on sait vers l'enseignement, sa véritable vocation.
Sources principales
- Finn Benestad & Dag Schjelderup-Ebbe. Edvard Grieg. The Man and the Artist. University of Nebraska Press.Traduction de William H. Halverson. 1980, p. 325.
- Guy Bourligueux. Pugno, (Stéphane) Raoul.The New Grove Dictionary of Music and Musicians. Ed. by Stanley Sadie. Macmillan Publishers Limited, 1980, Vol. XV, p. 448-449.
- Claude Debussy. Monsieur Croche et autres écrits. L'Imaginaire, Gallimard, 1971, p. 33, 35, 195.
- Jean-Luc Caron. Grieg et les interprètes français. In Grieg et Paris. Presses Universitaires de Caen, 1993,p. 151-160.
- Jean-Luc Caron. Edvard Grieg et Paris. Bulletin de l'Association Française Carl Nielsen (A.F.C.N.) n° 11, 1994.
- Jean-Luc Caron. Petite histoire de la musique nordique à Paris : 1910-1953. Bulletin de l'Association Française Carl Nielsen (A.F.C.N.) n° 13, 1995.
- Jean-Luc Caron. Edvard Grieg. Le Chopin du Nord. L'Age d'Homme. 2003.
- Nils Grinde. A History of Norwegian Music. University ofNebraska Press, 1981.
- Pierre Guillot. Pugno, Raoul. In Dictionnaire des organistes français des XIXe et XXe siècles. Mardaga, 2003, p. 448.
- Harald Herresthal & Ladislav Reznicek. Rhapsodie norvégienne. Les musiciens norvégiens en France au temps de Grieg. Presses Universitaires de Caen,1994.
- François Lesure. Claude Debussy. Fayard. 2003.
- Edward Lockspeiser/Harry Halbreich. Claude Debussy. 1980.
- Bruno Monsaingeon. Mademoiselle, entretiens avec Nadia Boulanger. Editions Van de Velde, 1980.
- Morant, Pugno,Stéphane-Raoul. Article du Dictionnaire de la musique en France au XIXe siècle, sous la direction de Joël-Marie Fauquet. Fayard. 2003.
- Grieg et Paris. Romantisme, symbolisme et modernisme franco-norvégiens. Textes réunis et présentés par Harald Herresthal et Danièle Pistone.Presses Universitaires de Caen. 1996.
Conclusion
S'il n'a pas fait l'histoire, Raoul Pugno a souvent fait l'évènement. Et cela méritait bien cette brève exhumation. Dès l'annonce de sa mort, le Journal des Débats du 4 janvier 1914 conclut justement : « Personne n'a joué d'une légèreté plus merveilleuse le Concerto de Grieg. C'était son triomphe. »