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L’hebdomadaire Newsweek a dernièrement publié un article intitulé « La fin de l’opéra italien : vont-ils attendre la grosse dame qui chante ? ». Derrière ce titre faussement provocateur la journaliste Elisabeth Braw pose un regard critique sur la situation des opéras en Italie, qui sont tous (sauf Milan, Turin et Venise) plus ou moins en banqueroute. La faute à qui ? à quoi ? A la crise, aux réductions drastiques de financement – entre Berlusconi qui s’en moquait et Mario Monti qui a remis les pendules à l’heure pour tous… Et peut-être à la gouvernance culturelle ? Curieusement les établissements mis sous tutelles se redressent. Etaient-ils mal gérés ? Notre confrère  Enrico Votio Del Refettiero, du site Luigiboschi.it, rend son jugement sans appel : « Nous dépensons moins en culture que les autres pays européens, mais le principal souci est que cet argent est très mal géré. L’Italie a nommé des idiots comme surintendants [ndlr : le sovrintendante est l’équivalent du directeur général], ils vont d’opéras en opéras, gaspillant l’argent partout, telles des prostituées allant de ville en ville avant que leurs clients ne soient lassés ».

Le jugement est très sévère, mais il est certainement réaliste. Si en France la situation est moins dramatique, elle ne doit pas faire oublier les grands ratés de ces dernières années. Nous avons encore trop d’intendants cherchant à flatter leur égo, qui alignent les concerts par dizaine, proposent des saisons affligeantes de banalité ou s’auto-programment. Point de vue pédagogie et « nouveaux publics », si les efforts sont louables, ils ne sont pas généralisés et surtout pas au niveau de ce qui se fait à l’étranger (en Grande-Bretagne et en Allemagne en particuliers). Pour beaucoup, cela se résume encore à bourrer les salles de scolaires lors des générales.

Le milieu de la musique classique est encore largement conservateur, voire réactionnaire. Le futur projet de loi exigeant pour un musicien d’orchestre que l’enseignement soit une activité accessoire et limitée est vécu comme un « crève-cœur » par la profession. Pourtant ce texte n’est prévu que pour faire appliquer le Code du travail de la Fonction publique, vise au partage équitable de ce travail et veut mettre fin au cumul des postes à temps complet. Nos précédents éditos sur la gouvernance des orchestres (éditos de novembre et décembre) ont suscité nombre de commentaires indignés, par mail ou via notre page Facebook. Alors qu’il ne s’agit que de se mettre en phase avec la société actuelle, sous peine de disparaitre. La peur du changement…

Dernièrement les Centres dramatiques nationaux ont connu un certain renouvellement, avec des personnalités du milieu du théâtre qui accédaient pour la première fois à un poste de direction d’une institution publique (cela a fait grincer des dents puisque plusieurs voix ont crié au « jeunisme » et à la « démagogie »). Tous sont auteurs ou metteurs en scène, avec pour la plupart une formation universitaire poussée dans leur domaine. Tous sont porteurs d’idées neuves, en accord avec l’évolution de la société, en rapport avec le territoire où ils sont nommés, intégrant de façon pleine la création numérique dans leurs projets artistiques. Dans un entretien récent à la revue flamande De Theaterkrant Gerard Mortier déclarait : « Trop de directeurs n’ont pas à être à la tête d’un opéra. Ils ne connaissent rien à la musique mais viennent avec une belle idée pour entrer. Mettre en scène le Ring de Wagner dans une station de ski : pas si difficile. Et après ? ». On ne peut qu’acquiescer. La nomination d’une cantatrice devenue agent artistique à Montpellier, Valérie Chevalier, inaugurerait-elle ce renouveau ? L’actuelle manie de mettre des technocrates issus de grandes écoles à la tête des institutions musicales est-elle finie ? L’Orchestre national de Lille, l’Opéra Comique et l’Opéra national de Lyon vont être les prochains grands sièges à pourvoir. Les futurs patrons seront-ils diplômés de Sciences Po ou du CNSM ? Titulaire d’un master en économie ou en musicologie ?

Le « cas » Bernard Foccroule, organiste et compositeur nommé à la tête de la Monnaie de Bruxelles à l’âge de 39 ans va-t-il se produire en France ? 2014 sera-t-elle l’année d’un changement de gouvernance, comme cela semble être le cas dans le monde du théâtre ? Ce serait une bonne chose.

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