A Dijon jusqu’au bout des notes avec Carine Séchaye
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Dijon, Plateau de l’Auditorium, 30-XI-2013. « Elle connaît la chanson », spectacle présentant des œuvres de Gabriel Fauré (1845-1924), Joseph Kosma (1905-1969), Kurt Weill (1900-1950), Moïses Simons (1889-1945) et Jacques Offenbach (1819-1880). Carine Séchaye, mezzo-soprano et Marie-Cécile Bertheau, piano.
Il y a, dans l'existence, des moments de grâce qui vous apportent du baume au cœur : Carine Séchaye et Marie-Cécile Bertheau sont de celles qui vous enchantent une fin d'après midi comme personne. Vite, vite, courrez prendre « l'apéro » à l'Auditorium de Dijon.
Ce programme nous fait voyager dans la carte du tendre, avec parfois des incursions surréalistes dans le monde populaire de Jacques Prévert. La présentation de chaque auteur est faite avec subtilité et humour par Marie-Cécile Bertheau, qui sait, en quelques mots et sans lourdeur professorale, brosser un portrait stylistique de celui-ci : Gabriel Fauré est ainsi décrit comme le compositeur allusif des émois de l'amour qu'il susurre plutôt qu'il ne l'évoque. On verra une évolution certaine des sujets traités : la gent féminine, évanescente à la fin du XIXe siècle, change radicalement de comportement ensuite ; l'artiste cubain Moïses Simon fera de sa Carmencita une redoutable tueuse, et Jacques Offenbach nous présentera une Périchole qui ne s'en laisse pas conter : les hommes, on peut les berner comme on veut quand on est femme !
Carine Séchaye avait fait une formidable prestation à Lausanne dans l'Aiglon, en récital elle possède une grande maîtrise des nuances, ses « pianos » sont remarquables dès les mélodies de Fauré ; Nell par exemple est interprétée comme une confidence frémissante, Les Berceaux comme une tragédie de la mer avec toute l'ampleur des « horizons qui leurrent ». Mais est-ce la voix au large vibrato qui surprend ou bien ce répertoire qui peut paraître suranné ? Elle est mille fois plus à l'aise dans le reste du concert. Elle fait preuve d'un sens du jeu théâtral époustouflant : sans redondance mais drôle dans La pêche à la baleine, tragique dans A la belle étoile, hallucinée dans Le cauchemar du chauffeur de taxi, sur des textes de Prévert ; elle devient ensuite aguicheuse dans la rumba de Carmencita, et meneuse de revue dans l'air de La Périchole. Là, son art vocal se marie avec bonheur à son sens de la scène.
Marie-Cécile Bertheau accompagne sa comparse avec une félinité à la fois musicale et redoutablement technique. On peut parler véritablement de symbiose entre ces deux artistes qui ont travaillé les moindres détails de leur spectacle avec tact, mais aussi avec une justesse de ton qui leur fait honneur. La pianiste n'est pas seulement un faire-valoir de la chanteuse, mais elle participe entièrement au succès de la soirée !
Et pour clore ce moment qui passe trop vite, on éclate de rire en entendant en bis les irrévérences de Raymond Queneau…
Crédit photographique : © Céline Michel
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Dijon, Plateau de l’Auditorium, 30-XI-2013. « Elle connaît la chanson », spectacle présentant des œuvres de Gabriel Fauré (1845-1924), Joseph Kosma (1905-1969), Kurt Weill (1900-1950), Moïses Simons (1889-1945) et Jacques Offenbach (1819-1880). Carine Séchaye, mezzo-soprano et Marie-Cécile Bertheau, piano.