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Christian Lindberg ose un doublé Allan Pettersson à Norrköping

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Norrköping, de Geer Hall. 31.X.2013. Allan Pettersson (1911-1980): Symphonies No. 4 & 16. Christian Lindberg (né en 1958) : Kundraan and the Arctic Light. Jörgen Pettersson, saxophone. Orchestre symphonique de Norrköping, direction, récitant et trombone : Christian Lindberg

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Christian Lindberg & Jörgen Pettersson, Oct 2013

A ceux qui pensent qu'il n'est pas sérieux de mener une double carrière de soliste et de chef d'orchestre, Christian Lindberg (notre entretien) apporte un net démenti. A la tête de l', il a fait preuve de son incroyable vitalité dans un programme réunissant deux symphonies d' séparées par une œuvre de sa propre composition où il accumulait les rôles de compositeur, chef, récitant et… tromboniste bien sûr.

Si à l'heure actuelle les symphonies hautement dramatiques de Pettersson ne sont plus guère jouées y compris dans leurs terres d'élection en Europe du nord – la faute à leur exigence exceptionnelle aussi bien technique qu'émotionnelle – en relève le défi. Il en est devenu en quelques années le champion incontesté ; surtout il a réussi à convaincre l'orchestre de Norrköping et le label Bis de s'embarquer pour une série d'enregistrements de sept symphonies jusqu'en 2018. A son terme, Bis sera le deuxième label à avoir achevé une intégrale discographique des symphonies de Pettersson, et la première avec un seul orchestre (seule la Symphonie n°5 aura été enregistrée par l'orchestre de Malmö).

Les deux symphonies proposées ce soir appartiennent à deux groupes d'œuvres bien distinctes. La Symphonie n°4 clôt la première manière de Pettersson, qui est déjà caractéristique par ses tensions et ses « îles lyriques » mais reste plus concise dans son expression. La Symphonie n°16 est la dernière œuvre achevée par le compositeur, et les interprétations disponibles au disque laissaient l'impression d'une œuvre de demi-caractère, au mordant émoussé.

Dirigées par , les deux œuvres surprennent par leur stature, avec un nombre d'événements musicaux si nombreux et changeants qu'elles paraissent nettement plus longues que leur durée effective, une vingtaine de minutes pour la 16ème et moins de quarante pour la 4ème.

Dans la Symphonie n°4, le morcellement du discours, les silences, la succession de moments tendres (incarnant la mère, à qui la symphonie est dédiée) et de cataclysmes soudains (représentant le père) ont pu paraître décousus. A notre époque du « multitasking » où l'on s'agrippe nerveusement à son téléphone pour vérifier intempestivement nos emails, SMS et autres messages sur nos réseaux sociaux préférés, ce caractère disparate paraît au contraire étrangement familier et propre à nous satisfaire.

Dans la Symphonie n°16, le saxophoniste (sans rapport familial avec le compositeur) joue les notes telles qu'elles ont été écrites, ce qui est un défi. Du coup, il joue avec une intensité magnifique qui restitue les intentions du compositeur. Il donne cette rudesse, ce corps à corps haletant avec l'orchestre qui est la signature de Pettersson et remet cette symphonie à la hauteur des précédentes.

Lindberg, grand expert de la musique contemporaine la plus exigeante (la Sequenza V de Berio par exemple), sait allier précision chirurgicale, clarté alla Boulez ( se souvient peut-être ici de ses leçons de composition avec René Leibowitz à Paris) et souffle d'inspiration héritier de symphonies post-romantique.

Intercalée entre les deux symphonies, Kundraan and the Arctic Light voit parler aux anges et à Lucifer, engager un combat au trombone avec ce dernier, et accomplir une expérience initiatique et de sagesse. Énergique, haute en couleur, accessible à tout public grâce à ses changements constants de rythmes et d'atmosphères, Kundraan constituait une détente bienvenue, suffisamment inquiétante et dramatique pour rester en accord avec la tonalité nocturne de la soirée.

Si Christian Lindberg impressionne tant dans , c'est probablement qu'il sait relier les composantes a priori irréconciliables de la musique, la noirceur de l'homme combatif et le chant pur de l'enfant, la netteté d'orchestration et l'ampleur quasi-épique de l'écriture, une absence apparente de fil conducteur et pourtant une histoire qui se déroule avec une tension sans relâche. Une performance réalisée avec seulement trois répétitions, ce qui est une gageure. Les symphonies seront remises sur le métier en janvier pour un enregistrement pour Bis.

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