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C’était le gros évènement de la rentrée hongroise : la réouverture du bâtiment amiral de l’Académie Franz Liszt de Budapest après près de trois ans de travaux intensifs à l’occasion d’une journée de fête et d’un grand concert de gala ouvert, hélas, uniquement aux invités, mais diffusé en direct à la TV. La date n’avait pas été choisie au hasard : la veille du 23 octobre, date des commémorations du soulèvement hongrois de 1956.
Construite par les grands architectes Flóris Korb et Kálmán Giergl, en 1907, l'Académie Franz Liszt est le grand Conservatoire hongrois, mais il est aussi un ensemble de salles de concerts avec son grand hall et sa salle de musique de chambre. La restauration, financée en grande partie, par des fonds de l'union européenne (d'un coût de 14 millions d'euros) rend tout le lustre à ce bâtiment à la fois éclectique et académique dans sa massivité et terriblement Art nouveau et fin de siècle dans ses détails architecturaux et dans sa symbolique. La grande salle, avec ses décors inspirés par Dionysos et Apollon, fait son effet par la richesse des détails et par le travail sur les tons de couleur. Comme toujours, dans pareil cas, le dossier de presse faisait la part belle aux nombreux chiffres impressionnants qui illustraient cette copieuse restauration.
La réouverture était placée sous le signe de la tradition d'une musique nationale reconnue à l'international par la variété de ses talents : compositeurs, pianistes, chefs d'orchestres tous légendaires de Ligeti à Solti en passant par Kodály ou Béla Bartók. Mais, cette mise en avant de la nation musicale hongroise, ne cachait pas sa récupération par les politiques, et en premier lieu, par le très controversé Viktor Orban, premier ministre de Hongrie, émergeant de forces de sécurité omniprésentes pour ouvrir par un discours le gala. A quelques mois des élections nationales, le ton était à la défense des arts au service du programme politique du premier ministre et de sa vision, aussi affirmée que très particulière, de la nation.
L'inauguration d'une statue en hommage au chef d'orchestre Sir Georg Solti, en présence de sa veuve Lady Solti, à côté du bâtiment de l'Académie, s'inscrivait dans cette volonté de lier la passé et le présent. On notera tout de même au passage que le jeune Solti, ses études terminées, fut contraint de quitter Budapest à cause des lois antisémites, mais Lady Solti témoignait de l'importance symbolique de ce geste.
Le gala en lui-même était presque exclusivement hongrois avec des partitions de László Sándor, Ferenc Erkel, Johannes Brahms, Béla Bartók, Zoltán Kodály, Jean Sebastien Bach, Franz Liszt, Ernö Dohnányi et Ludwig van Beethoven, interprétées par les forces orchestrales et chorales du conservatoire Liszt et par des artistes locaux stars et non-stars. Ce type d'évènement alterne des hauts et des bas. Le concert commençait très bien avec quelques pieces de Béla Bartók et Zoltán Kodály par le choeur d'enfant magnifiquement preparé par Gabriella Thész. Assez ingrate, la Fantaisie chorale de Beethoven finissait en beauté ce concert avec au piano un Gábor Farkas subtil et délicat accompagné par le grand Zoltán Kocsis au pupitre des troupes galvanisées de l'Académie Liszt. Rien à redire des cuivres dans une fanfare de László Sándor ou d'une inevitable Danse Hongroise de Brahms, menée au tonus, par Barnabás Kelemen, icone actuelle du violon hongrois et vainqueur de grands concours violonistiques. Certaines interventions, s'avèrèrent trop neutres comme les Duos de Béla Bartók joués par Katalin Kokas et Barnabás Kelemen ou par l'assez impersonnel Quintette avec piano, Op1 d'Ernst von Dohnányi par le Keller Quartet et le pianiste Dénes Várjon. On fut assez reservé par la prestation du jeune prodige du violoncelle Gergely Devich dans Bach, mais on fut hélas sidéré par le Liszt pompier et peu assuré techniquement de Gergely Bogányi.
L'Académie Franz Liszt ambitionne de se positionner comme une salle de concert majeure sur l'échiquier européen : la belle brochure de la saison à venir témoigne des moyens mobilisés et du réservoir presque sans limite des artistes hongrois acteurs incontournables de ces concerts en orchestre, musique de chambre et récital. On félicitera, en conclusion, la direction de l'Académie d'avoir mené une profonde réflexion sur sa communication et son graphisme dans une optique de toucher un maximum de public sans chercher la facilité.
Crédits photographiques : ZEeneakademia/Marjai-Judi/Gyorgi Darabos
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C’était le gros évènement de la rentrée hongroise : la réouverture du bâtiment amiral de l’Académie Franz Liszt de Budapest après près de trois ans de travaux intensifs à l’occasion d’une journée de fête et d’un grand concert de gala ouvert, hélas, uniquement aux invités, mais diffusé en direct à la TV. La date n’avait pas été choisie au hasard : la veille du 23 octobre, date des commémorations du soulèvement hongrois de 1956.
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