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Joseph Calleja, ténor de tradition nouvelle génération

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De La Vie en rose aux rares Huit romances de Verdi orchestrées par Luciano Berio en passant par la zarzuela, le ténor maltais ne craint pas les chemins de traverse ni les curiosités, même si sa priorité va à Massenet et à Verdi.

A l'affiche dans rien moins que 24 pays par saison, il n'est pas moins attaché à son pays, dont il est ambassadeur culturel et où il a créé une fondation pour l'enfance en difficulté. Rencontre avec un chanteur qui veille à faire mûrir sa voix comme un grand vin.

« Quand on meurt chaque soir sur les plus grandes scènes lyriques du monde on a aussi envie de faire des choses plus légères. »

ResMusica : Vous êtes originaire de Malte, un pays peu connu ici en France. Quelle en est la tradition lyrique ?

 : Très importante. L'Ordre de Saint Jean de Malte, en majorité italien, apporté avec lui cette tradition. Nous avons à Malte un théâtre du XVIIIe siècle, le deuxième plus vieux d'Europe en fonctionnement. Le bâtiment évidemment a eu à souffrir des bombardements de la Seconde Guerre Mondiale et a été reconstruit en 1945. Et dernièrement la vie lyrique à Malte connait un véritable essor, en partie grâce à moi.

RM : Vous êtes ténor lyrique, plutôt jeune, méditerranéen, n'avez-vous pas peur qu'on vous enferme dans une image de « latin lover » ?

JC : Non, non, je chante depuis dix-sept ans, je suis connu comme un chanteur « sérieux ». J'aime les répertoires divertissants. Vous savez, quand on meurt chaque soir sur les plus grandes scènes lyriques du monde on a aussi envie de faire des choses plus légères. J'adore montrer au public que la voix lyrique n'est pas que pour une élite mais que c'est une autre façon de faire de la musique,  plus belle et peut-être plus élaborée. Je ne veux pas que le public pense que le chant lyrique soit ennuyeux. Dans notre monde moderne il faut savoir susciter la curiosité de l'auditoire.

RM : Vous êtes actuellement sur un répertoire italien lyrique centré autour du XIXe siècle. Envisagez-vous de l'élargir ?

JC : Ma voix évolue. Je crois que certains grands rôles verdiens seront possibles à l'avenir. Mais je n'accepte pas encore ce genre de projets car ma voix n'est pas totalement prête. Quand j'arriverai à maturité je changerai de répertoire, mais dans longtemps. Une voix est comme un grand vin, il faut plusieurs années de maturation, sinon on court vers les problèmes.

RM : En attendant, en restant dans votre typologie vocale, quels nouveaux rôles envisagez-vous d'apprendre ?

JC : Le répertoire français, avec Des Grieux (Manon) et Werther. Et aussi Un Ballo in maschera de Verdi.

RM : Prochainement vous allez interpréter une œuvre très peu connue de Verdi. Accordez-vous de l'importance à faire découvrir au public ce genre de répertoire inconnu ?

JC : Oui. Pour ce concert ce seront les Huit romances orchestrées par Luciano Berio. L'écriture vocale est très grave, presque baryton, presque trop grave pour moi. Mais j'adore étudier de nouvelles choses. Et surtout travailler avec Daniele Gatti, ce soir pour la deuxième fois. J'espère que cette soirée Verdi sera très réussie.

RM : Là nous parlons d'un concert mais vous êtes surtout connu sur scène. Depuis quelques décennies certaines mises en scène défraient la chronique. Vous est-il arrivé de refuser certaines propositions de metteur en scène ?

JC : Non. Le chanteur est au service du metteur en scène. Il n'est pas directeur artistique, il n'a donc pas d'avis à donner, même s'il n'aime pas le travail qui est en train de se faire. On ne peut travailler uniquement avec les gens qu'on veut, il faut savoir être diplomate, dans l'opéra comme ailleurs. Personnellement je ne me pose pas la question de la modernité ou de la tradition, je veux de bons spectacles, intéressants, qui font plaisir aux gens ou qui les font réfléchir. L'opéra est monde de fantaisie, d'irréel, fait pour transporter les spectateurs dans un autre monde, pas dans un cauchemar.

RM : Revenons à votre dernier disque, « Amore ». Qui a fait les arrangements orchestraux ?

JC : Maestro Mercurio en majorité. Un bon travail qui apporte quelque chose de nouveau à ces chansons.

RM : Qui a fait le choix de ce répertoire très composite ?

JC : Je voulais faire depuis longtemps ce genre de programme que j'adore, dont La Vie en rose. Je voulais enregistrer des chansons d'amour de toutes les cultures européennes, en six langues différentes. Le choix final des titres a été fait par  Steven Mercurio, la maison de disque Decca et moi-meme.

RM : Justement on trouve dans ce disque des airs de zarzuelas espagnoles et une mélodie de Tchaïkovski. De nouveaux répertoires à venir ?

JC : J'adorerai avoir le temps d'apprendre le répertoire de la zarzuela, qui est très large. Mais ma priorité est plus vers Massenet et Verdi actuellement. Un jour peut-être, mais pas encore.

RM : Vous venez de créer une fondation. Quel est son but ?

JC : Rien à voir avec la musique, c'est une fondation pour aider les enfants ayant de graves soucis familiaux et sociaux. Je veux commencer quelque chose dans mon pays. Pour l'instant la fondation n'agit qu'à Malte mais nous voulons grandir, intervenir dans d'autres pays et se lier avec d'autres fondations ayant le même but.

RM : Vous êtes actuellement ambassadeur culturel de Malte, vous créez une fondation pour l'enfance en difficulté, peut-être un jour ambassadeur de bonne volonté pour l'UNESCO, comme quelques-uns de vos confrères et consœurs ?

JC : Pourquoi pas mais déjà je suis déjà très honoré d'être ambassadeur culturel de Malte. Si l'UNESCO m'appelle ce serait fantastique. Je souhaite consacrer une part de mon temps à aider les autres, surtout les enfants. Si chacun pouvait donner un peu de son temps pour aider les autres tout irait certainement mieux.

RM : Pourriez-vous nous résumer le futur immédiat de votre carrière ?

JC : Faust à Londres, La Bohème à New York, … à peu près vingt-quatre pays différents par saisons ! Et un projet d'enregistrement, mais rien n'est confirmé à ce jour.

Crédits photographiques : © Simon Fowler / Decca 2012

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