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Richard Wagner (1813-1883) : Ma vie. Traduction de Noémi Valentin et Albert Shenk (1911) révisée, complétée et annoté par Dorian Astor. Editions Perrin, octobre 2012. ISBN 9782262035792 ; 825 pages. 34€
Richard Wagner ne peut pas s'empêcher de faire dans le monumental, son autobiographie dépasse les 800 pages alors même qu'elle s'arrête exactement là où beaucoup auraient aimé qu'elle commence : la dernière partie de sa vie à partir de la protection offerte par le roi Louis II, sa vie avec Cosima et la construction de Bayreuth.
Il applique ensuite à son texte le principe de la mélodie infinie, qui ne se termine jamais et s'enchaîne à une autre mélodie. Géniale idée, mais sa transposition à l'écriture littéraire met le lecteur à rude épreuve. Certaines sections valent l'effort de la lecture. Ainsi de la confrontation avec la musique et l'homme Berlioz, faite de rendez-vous manqués et de frustration, mais finalement le seul compositeur contemporain de Wagner qui ait vraiment défié et poussé ce dernier dans ses retranchements de créateur, avant l'ami Liszt. Ou de l'arrivée à Dresde de Spontini en 1844 qui se piqua de diriger lui-même son opéra La Vestale, pages hilarantes. Schumann et Mendelssohn s'en sortent moins bien et sont plus sèchement expédiés, le premier est fermé aux conseils d'écriture de Wagner, le second est expédié comme incapable de diriger la Neuvième de Beethoven correctement.
Finalement, Wagner n'est jamais aussi bon écrivain que quand il n'a rien à cacher, à retrancher ou à enjoliver. C'est ainsi que son séjour à Paris de septembre 1859 à juillet 1861 (pages 653 à 717) qui voit la production et la chute de son Tannhäuser, expérience cuisante s'il en fût, lui donne d'occasion de croquer de manière particulièrement vivante les travers de la haute société parisienne et des cabbales qui s'y organisaient. C'est dans ces pages que Wagner confirme l'adage que l'on n'est jamais si bien servi que par soi-même.
Longtemps inaccessible car Cosima Wagner à la mort de son mari avait récupéré les rares exemplaires distribués à des amis, ce document n'a été publié en allemand dans une version fiable qu'en 1963, et la présente publication en constitue le pendant en français – sont ainsi révélés quelques traits acérés de Wagner qui avaient été escamotés jusqu'à présent – à l'occasion de son bicentenaire. Il en constitue un apport important dont les wagnériens ne sauront faire l'économie.
A l'heure des liseuses électroniques et autres tablettes, soulignons le poids et la souplesse du livre, l'élégance de sa mise en page, qui le rendent particulièrement agréable à parcourir.
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Richard Wagner (1813-1883) : Ma vie. Traduction de Noémi Valentin et Albert Shenk (1911) révisée, complétée et annoté par Dorian Astor. Editions Perrin, octobre 2012. ISBN 9782262035792 ; 825 pages. 34€
Éditions « Perrin »
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