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Un panorama de la musique russe du XXe siècle

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Sergueï Rachmaninov (1873-1943) : Sonate pour violoncelle et piano en sol mineur op. 19 ; Dimitri Kabalevski (1904-1987) : Sonate pour violoncelle et piano en si bémol majeur op. 71 ; Lera Auerbach (née en 1973) : sept extraits des 24 Préludes pour violoncelle et piano op. 47. Camille Thomas, violoncelle. Béatrice Berrut, piano. 1 CD Fuga Libera FUG712. Code barre : 5 400439 007123. Livret bilingue (anglais, français). Enregistré du 4 au 7 janvier 2013 au Studio 4 de l’institut Flagey à Bruxelles.

 

et sont deux solistes dont le jeune âge surprend autant que l'expérience qu'elles ont déjà acquise. Le programme ambitieux qu'elles nous proposent ici se présente comme un panorama de la musique russe du XXe siècle, à travers trois œuvres pour violoncelle et piano.

Il est évident que l'on ne peut pas parler d'art russe au XXe siècle sans immédiatement faire le rapprochement avec les divers bouleversements politiques qu'a connu ce pays au cours de l'histoire récente, et c'est le propos que développe justement le livret. La Sonate de Rachmaninov, composée en 1900 juste après son célèbre Deuxième Concerto pour piano, est ainsi le portrait de l'aristocratie sur le déclin, cependant que celle de , de 1962, illustre les contraintes esthétiques du « réalisme socialiste » ; les récents Préludes de couronnent le tout en témoignant du libéralisme nouveau de la société russe par une musique inspirée tant par Chostakovitch que par la modernité occidentale. Soit. Qu'en est-il maintenant de l'interprétation de ces œuvres ?

La Sonate de Rachmaninov est une oeuvre ample, en quatre mouvements, et d'une difficulté redoutable, surtout pour le pianiste à qui le compositeur a ménagé deux véritables cadences solistes, au cours du développement de l'Allegro initial et peu avant le retour du Scherzo. Maintenir l'équilibre avec le violoncelle dans ces conditions relèverait de l'impossible, si Camille Berrut n'était excellente chambriste. Dotée d'une technique robuste, elle sait en effet se faire discrète et délicate quand il s'agit de laisser s'exprimer le lyrisme de . Toutes deux sont d'ailleurs très attentives aux multiples indications du compositeur, même si leur interprétation de ces pages pêche à notre sens par excès de rubato : les phrases s'étirent au point de casser avant qu'un nouvel événement ne rétablisse brusquement le tempo – on en aurait presque le tournis ! Reste que le Scherzo est une indéniable réussite, ainsi que l'Andante suivant, d'une mélancolie sans fin.

L'atmosphère change radicalement avec la deuxième œuvre au programme, de Kabalevski. Le compositeur, surtout connu pour ses aimables pièces didactiques, nous est ici révélé dans un registre tout autre. Sa Sonate, un chef d'oeuvre à n'en pas douter, possède un caractère très sombre, qui plonge l'auditeur dans une atmosphère entre désespoir et vaine révolte, sans que même la cadence finale (pourtant en si bémol majeur !) ne procure le moindre apaisement – la musique s'éteint, comme de guerre lasse.

Moins exigeante sur le plan technique, du moins pour le piano, cette œuvre est l'occasion pour les deux interprètes de faire montre d'une belle complicité et de nous livrer une interprétation bouleversante. Notre coup de cœur dans cet enregistrement !

Pour refermer le programme, et Béatrice Berrut ont sélectionné 7 des 24 Préludes pour violoncelle et piano de , ainsi que le préconise la compositrice. Nécessairement brefs, ces préludes mêlent des sonorités instrumentales modernes à des couleurs tonales. Le contraste est on ne peut plus saisissant, mais paraît en maints endroits outrancier, comme cette valse grotesque, que ne renierait pas Danny Elfman. Une musique somme toute pas désagréable, mais très en dessous des deux sonates précédentes, et pas forcément plus légère à écouter.

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Sergueï Rachmaninov (1873-1943) : Sonate pour violoncelle et piano en sol mineur op. 19 ; Dimitri Kabalevski (1904-1987) : Sonate pour violoncelle et piano en si bémol majeur op. 71 ; Lera Auerbach (née en 1973) : sept extraits des 24 Préludes pour violoncelle et piano op. 47. Camille Thomas, violoncelle. Béatrice Berrut, piano. 1 CD Fuga Libera FUG712. Code barre : 5 400439 007123. Livret bilingue (anglais, français). Enregistré du 4 au 7 janvier 2013 au Studio 4 de l’institut Flagey à Bruxelles.

 
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