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Audite, label de l’année 2013

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Le Label allemand audite a remporté le prix « Label de l'année » aux 2013. Fondé il y a 40 ans, Audite s'est imposé comme l'un des labels majeurs de la scène européenne par la qualité de ses publications et par son grand soin éditorial. Ludger Böckenhoff, directeur général, revient pour ResMusica sur la philosophie et les projets d'audite, qui pourrait inclure le retrait de son catalogue de l'offre de streaming.

« Nous envisageons d'arrêter complètement la diffusion de notre catalogue en streaming »

ResMusica: Vous avez gagné le « Label de l'année » des 2013. Qu'est-ce que ce prix signifie pour vous?

Ludger Böckenhoff: Nous sommes très honorés! Notamment parce que le jury ICMA est indépendant et composé de journalistes spécialisés dans la musique classique. Cette récompense nous encourage à poursuivre notre travail.  Au cours de nos 40 ans d'existence, nous avons augmenté notre catalogue et acquis une réputation internationale. Le prix rend hommage à tous les artistes audite et bien sûr l'ensemble de l'équipe.

RM: audite publie des nouveaux enregistrements par des artistes contemporains et des archives issues des radios publiques. Comment conciliez-vous ces deux types de publications?

LB: Ces deux domaines sont délibérément entrelacés. Par exemple, nous avons commencé l'intégrale des quatuors à cordes de Beethoven avec le Quartetto di Cremona et nous avons  présenté ces quatuors, dans le domaine historique, avec le Quatuor Amadeus.
En outre, même en l'absence d'un lien direct entre les productions, les nouveaux enregistrements sont présentés à la suite de leurs illustres prédécesseurs. La répartition des nouvelles lectures et des témoignages historiques change chaque année, il n'y a pas d'équilibre fixe. Mais, en gros, il s'agit probablement d'une division entre 60% d'historiques et  de 40% de nouvelles versions.

RM: Quelle est votre méthode de sélection des archives pour publication?

LB: Nous sommes en contact avec de nombreuses archives de radio, en particulier en Allemagne. Avec le temps nous avons une coopération étroite, par exemple avec la Radio de Berlin, où des collaborateurs indépendants  recherchent des archives pour nous. Au final, je décide personnellement des parutions en fonction de la qualité des interprétations, de la qualité techniques de l'enregistrement, et du contexte discographique.  Nous utilisons les bandes originales, qui assurent une très haute qualité technique. En outre, la plupart de nos productions historiques se composent d'une part de matériels inédits. Parfois certaines bandes avaient déjà été publiées, plus ou moins légalement, mais dans une qualité sonore bien inférieure. Si le même répertoire avait déjà été publié officiellement et dans de bonnes conditions techniques,  je m'assure toujours qu'audite offre une alternative importante en termes de contenu musical.

RM: Dans quel état trouvez-vous ces bandes? Quels traitements leur appliquez-vous pour obtenir une qualité sonore optimale?

LB: Nous utilisons les bandes originales. De nombreuses bandes sont à au standard 76 cm/s, ce qui assure la plus haute qualité, même si nous parlons des enregistrements du début des années 1950. En outre, ce sont des enregistrements qui ont été conservés dans les archives officielles avec un soin  professionnel exemplaire. Un facteur très pertinent pour la qualité de la bande est son âge : au début des années 1950, il y a eu un accroissement général de la qualité  dans le domaine de l'enregistrement.
En ce qui concerne la remasterisation, je choisis toujours avec soin le traitement que j'applique et le celui dont je m'abstiens. L'objectif est d'obtenir la meilleure qualité sonore, mais aussi de préserver la valeur documentaire d'un enregistrement. La correction la plus importante et la plus courante concerne la hauteur des enregistrements du début des années 1950, qui modifiait tempo et la durée de l'œuvre. J'applique soigneusement un traitement de réduction du bruit et des clics et j'utilise toujours des techniques d'assemblage entre deux mouvements pour égaliser le bruit de fond.  Dans le domaine de la correction du son, on peut ajouter à titre exceptionnel de la réverbération. Mais le but  est d'améliorer l'idée du son historique et surtout  pas de l'adapter à nos habitudes des enregistrements actuels.

RM: Cette année, vous allez célébrer le 50e anniversaire de la mort du chef d'orchestre . Beaucoup de ses enregistrements sont déjà à votre catalogue. Pouvez-vous nous en dire plus au sujet  de son importance dans la vie musicale de Berlin?

LB: Etant d'origine autrichienne, le chef d'orchestre a principalement travaillé en Hongrie, en Autriche et en Allemagne. Il a fait ses débuts en Allemagne en 1948 à la Städtische Oper de Berlin et puis avec le Rundfunk-Sinfonieorchester Berlin, le Philharmonique de Berlin et le RIAS-Symphonie-Orchester. En Septembre 1949, il a été nommé directeur musical général à la Städtische Oper de Berlin et premier chef du RIAS-Symphonie-Orchester, créé à peine deux ans plus tôt. était une sorte de « contre-concept » de Wilhelm Furtwängler. Ils ont, tous les deux façonné la vie musicale à Berlin après la guerre. A l'inverse de Furtwängler, Fricsay suivait strictement la partition, il a pris beaucoup moins de liberté dans le rythme, le choix du tempo et ainsi de suite. Ainsi, ses interprétations révèlent le côté  « authentique » de la musique. Il combinait un style de direction extrêmement énergique mais avec un détachement personnel. Son large choix de répertoire a introduit à Berlin des compositeurs qui font désormais partie des « classiques » du XXe siècle, Bartók, Schönberg, etc..  Fricsay était extrêmement important pour la vie culturelle d'après-guerre à Berlin. Il a eu un impact durable sur le RIAS-Symphonie-Orchester qu'il a mené à une réputation internationale.

RM: Quels sont vos prochains projets concernant les enregistrements historiques?

LB: Dans un futur proche, nous allons publier un coffret avec les quatuors à cordes de Beethoven  par le Quatuor Amadeus. Nous avons aussi un projet autour des premières années de Berlin de Sergiu Celibidache.

RM: Quels sont vos meilleurs marchés d'aujourd'hui, et cette liste change-t-elle de manière significative au fil du temps?

LB: Les marchés diffèrent en fonction du répertoire, parfois même beaucoup. A côté de cela, d'une manière générale, les marchés importants sont pour nous : le Japon, les Etats-Unis, l'Allemagne et le reste de l'Europe.

RM: audite est un label reconnu pour la qualité rédactionnelle de ses albums. Les ventes physiques diminuent alors que les ventes en téléchargement augmentent. Comment conciliez-vous les deux?

LB: En fait, je ne considère pas cela comme un conflit. Ces deux domaines sont importants et je considère les ventes dématérialisées comme une addition bienvenue à notre visibilité. La seule exception est le streaming où vous devez être très prudent en raison des faibles retours sur investissement.

RM: En effet, le streaming audio est en plein essor et devient une tendance majeure. Comment voyez-vous cette évolution, alors que de nombreux éditeurs sont pris de panique en raison des faibles revenus qu'elle génère?

LB: Nous sommes nous aussi très préoccupés par cette évolution. C'est très simple: la qualité doit avoir son prix, et le maintien de cette qualité n'est pas assuré avec le streaming. À l'heure actuelle, nous envisageons d'arrêter complètement la diffusion de notre catalogue en streaming. Nous sommes à la recherche d'une offre de téléchargements en haute définition où l'équilibre entre la qualité et les revenus sera beaucoup mieux respecté.

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