Grigory Ginzburg, romantique et soviétique

Bien oublié désormais Grigory Ginzburg (1904-1961) fut l'un des grands pianistes russes du XXe siècle. Elève du grand Alexander Goldenweiser, il fit des débuts remarqués, à l'âge de 14 ans, sur la scène du Conservatoire de Moscou. En 1927, il fut lauréat du Concours Chopin de Varsovie. Il devint rapidement l'un des artistes phares de l'URSS et il dispensa son enseignement au Conservatoire de Moscou tout en se produisant aux côtés des grands artistes de son temps. Liszt était l'un de ses compositeurs de prédilection. Il avait débuté, en soliste avec orchestre, dans le Concerto n°1 alors qu'il avait juste 18 ans et Ginzburg explorait les multiples partitions du compositeur avec une prédilection pour les Années de pèlerinage.

Son inspiration et son style éclataient dans ces pièces à la fois narratives et virtuoses. Les extraits des Années de pèlerinage proposées sur ce disque témoignent de ce toucher très ancré dans une tradition romantique du piano. La digitalité est assurée et le pianiste se laisse guider par une inspiration très libre dans ses fluctuations de tempi et dans ses nuances. L'auditeur se plaît à rêver avec lui, dansant la Tarentella ou contemplant le lac de Wallenstadt.

Changement d'ambiance avec la puissante musique d'Anton Rubinstein et son imposant Concerto n°4 en ré mineur. Le pianiste se fond à merveille dans cette œuvre dont il transcende les longueurs par son toucher narratif et altier en faisant ressortir tout le côté romantique et passionné de cette partition.

La prise de son, de ces enregistrements, est assez précaire et étouffée, mais la personnalité de ce grand artiste méritait cette édition. On notera au passage les progrès de Melodiya en matière de soin éditorial avec des notices intéressantes centrées sur l'interprète et désormais proposées en traduction française, sans oublier la mention précise des dates d'enregistrements.