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Mark Fitz-Gerald et Peter Bromley, duo pour la musique de films

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Entre Peter Bromley, le responsable de l'édition chez Naxos et le chef d'orchestre , il y a une passion commune pour les raretés oubliées, les chefs-d'œuvre perdus, tels les musiques de film comme la Carmen d'Ernesto Halfter (Clef ResMusica) ou La Nouvelle Babylone de Chostakovitch, dirigés par . Rencontre conjointe pour mieux comprendre l'alchimie quelquefois heureuse entre les deux métiers d'éditeur et de chef.

ResMusica : Peter, à quoi ressemble la vie d'un éditeur chez Naxos ?

Peter Bromley : J'ai rejoint Naxos en 1999, je fais partie de ce qu'on appelle chez nous les « lifers », les condamnés à vie ! En tant que responsable de l'édition pour le monde entier, j'assure le respect du calendrier de publication, j'approuve les épreuves des livrets et des visuels pour toutes nos publications, ce qui représente 30 à 40 CDs tous les mois. Je travaille de chez moi, 24 heures par jour, 7 jour sur 7. On échange par mail et par téléphone avec nos graphistes, les fichiers sont téléchargés sur un serveur FTP, et nous avons un bureau au sud de Londres où on se rencontre une fois par semaine.

RM : Naxos est un label international avec son siège à Hong-Kong, il y a donc une équipe à Londres ?

PB : Naxos est composé de plusieurs centres régionaux avec un bureau central. Nous avions cinq graphistes à plein temps basés au Royaume-Uni, mais en 2007 nous avons dû faire des coupes budgétaires. Certains sont restés en devenant indépendants. Aujourd'hui, nous avons un graphiste à temps complet et un second à temps partiel au Royaume-Uni, deux à temps complet à Manille aux Philippines, et deux autres travaillent en indépendants, un à Milan et l'autre en Nouvelle-Zélande.

RM : Êtes-vous musicien ?

PB : Je suis linguiste, ce qui m'a été aussi utile que mes connaissances musicales, car les livrets sont dans de multiples langues. Mais je m'intéresse à la musique du XXème Siècle, le répertoire d'Azerbaïdjan, de Russie, de l'Italie avec la génération des compositeurs de 1880, les , , , Ottorino Respighi, et puis la génération suivante, et … Avant de rejoindre Naxos, je poussais déjà Klaus Heymann à enregistrer Casella, et il l'a fait en partie.

RM : Ce répertoire symphonique italien arrive se vendre ?

PB : Plus que vous pourriez le croire ! Ces compositeurs plaisent aux marchés anglophones. Nous avons un engagement de long terme avec l'Orchestre Symphonique de Rome, qui est composé de jeunes musiciens, avec cinq enregistrements par an. Les trois symphonies de Casella ont été enregistrées, et il y a des pans de répertoire vierge à explorer, avec le soutien de la Cassa di Risparmio di Roma (NDLR : la caisse d'épargne de Rome).

RM : La musique d'Azerbaïdjan a aussi du succès ?

PB : Pour le répertoire d'Azerbaïdjan, nous avons le soutien d'une société pétrolière qui finance les enregistrements.

RM : Qui décide de publier tel ou tel disque ?

PB : Les décisions artistiques sont prises à Hong Kong, mais les artistes viennent aussi avec leur projet. J'ai une sphère d'influence aussi, qui couvre Chostakovitch et les compositeurs italiens du XXème siècle. La série 20th Century Italian Cassics sur Naxos est « mon petit projet » (en Italien on dit « curare un progetto ») et je ne choisis plus que la moitié du répertoire qu'on enregistre. Pour Chostakovitch, un moment décisif a été ma rencontre avec Mark, à l'issue de la représentation d'Odna avec l'orchestre de la BBC au Barbican de Londres en 2006.

RM : , avec la Nouvelle Babylone, vous venez de faire paraître votre troisième disque consacré à la musique de film de  Chostakovitch et vous avez également enregistré la Carmen d' pour le film de Jacques Feyder, vous êtes passionné par la musique de film!   

Mark Fitz-Gerald : Je suis bien plus intéressé par enregistrer de nouvelles œuvres que de répéter les mêmes symphonies. Cette Carmen, personne ne l'aurait fait, elle est le résultat de la coopération que nous avons Peter et moi. La publication de ce disque a été un moment de grande satisfaction, il a été très difficile de faire signer les contrats, il a fallu deux ans de travail après l'enregistrement de la musique pour obtenir les droits !

RM : La Nouvelle Babylone est aussi un projet qui vous tient à cœur?

MFG : Je l'ai dirigé en ciné-concert au moins vingt fois, depuis la première en 1986. La partition posait problème, déjà dans la version imprimée de Boosey & Hawkes, mais aussi dans les fac-similés des manuscrits qui n'apportaient que des réponses partielles, notamment en ce qui concernait les synchronisations. Reconstituer la partition de la Nouvelle Babylone était particulièrement compliqué, car il y avait différentes versions qui ne correspondaient pas toutes à la version finale du film. L'Association Chostakovitch et nous ont fourni la version originale, 130 mesures de musique qui ont été enregistrées pour la première fois sur notre disque. Une musique très sombre, comme ce qu'il a composé dans les années 60, avec un Dies Irae.

RM : Avez-vous d'autres projets?

MFG : Oui, les musiques de scène de La Punaise, dont la partition originale est assez différente, et Le coup de feu, et la musique du film Les Montagnes d'or. Enregistrer est facile, la partie difficile est la reconstitution. Puis il faut monter des coproductions, comme avec Francfort pour Carmen, ou Basel pour la Nouvelle Babylone. Ma vie ne suffira pas pour tout faire, alors je fais juste de mon mieux.

RM : Peter Bromley, comment parvenez-vous à investir autant d'efforts sur ce type de projets?

PB : Le marché du CD est déclinant, mais il y a toujours beaucoup de publications, et qui sont probablement de meilleure qualité qu'avant. Nous ne sommes pas contrôlés par des comptables. Alors que les grands labels suppriment des disques de leur catalogue, nous gardons la plus grande partie de nos titres disponibles. Les Quatre Saisons sont notre record absolu des ventes, mais nous ne sommes pas seulement une maison de disques, nous avons un catalogue en ligne, nous sommes distributeurs. Nous sommes un label à prix « budget », nous devons être créatifs.

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