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Le Dutoit à grande vitesse de passage à Paris

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Paris. Salle Pleyel. 09-09-2011. Mikhaïl Glinka (1804-1857) : Ouverture de Russlan et Ludmila ; Maurice Ravel (1875-1937) : Concerto en sol majeur pour piano et orchestre ; Hector Berlioz (1803-1869) : Symphonie Fantastique. Jean-Yves Thibaudet, piano. The Philadelphia orchestra, direction : Charles Dutoit.

Ce concert permettait au public parisien d'apprécier le travail mené depuis plusieurs années par avec la phalange de Philadelphie dont il est (pour quelques mois encore), le directeur musical.

Courte escale française pour le septuagénaire suisse, que l'on connaît bien depuis son passage (rapide car entre deux avions) à la tête du National de France dans les années 1990.

Le programme, d'un agencement par ailleurs conventionnel, faisait la part belle à la musique française avec le Concerto en sol de Ravel et la Fantastique de Berlioz, précédés de l'ouverture du Russlan et Ludmila de Glinka en guise de hors-d'oeuvre.

L'ouverture de Glinka compte parmi les pièces qui font briller un orchestre par sa virtuosité et ravissent le public par ses mélodies entraînantes – tout pour plaire donc, a priori. D'emblée, l'interprétation de Dutoit se signale par un tempo légèrement plus poussé que la moyenne, qui frise le presto. Ça file à toute allure mais l'orchestre tient bon, les traits des cordes fusent, l'exposition passe sans encombre. Vient le développement, d'une écriture plus délicate, qui mise sur les ressources du contrepoint et les interventions solistes des bois – et là c'est la débandade : avec un tel tempo, plus possible d'y rien comprendre ! Heureusement, la réexposition vient bientôt dissiper le trouble, et la coda de conclure de façon pompière.

Venait ensuite le Concerto de Ravel, dont la partie soliste était tenue par . Le premier mouvement commence sans encombre, toujours joué un peu au-dessus de la moyenne, mais ça passe, du moins jusqu'au solo de harpe. La harpiste semble en effet s'emmêler les pinceaux, et ce passage lunaire, plutôt que de révéler toute sa poésie, intervient comme un cheveu sur la soupe. C'est bientôt au tour de la magnifique cadence du piano, et ce moment nous révèle non seulement le raffinement du jeu de soliste, mais également un certain détachement de sa part, qui frise le mécanisme. L'impression en est bizarre, comme si on interdisait à l'émotion de s'épancher. La même observation vaut pour le solo du début de l'adagio, mouvement qui s'avère problématique pour l'équilibre entre le soliste et l'orchestre : par deux fois, l'entrée des cordes, qui devrait se faire à catimini, s'impose au contraire de façon brutale, cependant que leur phrase finale sonne comme l'adagio de la Symphonie n°5 de Mahler – c'en est troublant. Directement enchaîné, ce qui a déplu aux phtisiques du parterre, le « Presto » tient ses promesses, et nous comble par la précision et la clarté de l'énoncé du premier thème à la petite clarinette. Seul regret : la réexposition de ce même thème au piano est complètement noyée par l'orchestre ! On en sort mitigé, et frustré de quelques frissons attendus.

Avant l'entracte, offrait en bis au public l'Intermezzo en la majeur op. 118 de Brahms ; c'est beau, c'est élégant, ça coule, ça comble.

La Fantastique enfin est réussie, mis à part le « Bal » qui passe sans enthousiasme ni heurt et la « Scène aux champs » qui s'essouffle rapidement, en partie du fait du manque d'inspiration du cor anglais au début et à la fin. Pour le reste, confirme sa réputation : l'introduction du premier mouvement est tout simplement passionnante, la « Marche au supplice » fait frissonner et le « Songe d'une nuit de sabbat » fourmille d'inventivité, notamment dans les curieuses variations de l'Idée fixe. On notera tout particulièrement dans ses mouvements l'omniprésence des basses, que ce soit le pupitre des trombones avec tuba ou les nombreuses contrebasses (pas moins de neuf!) qui donnent une assise et une profondeur bienvenues au discours.

Crédit photographique : © Gunter Gluecklich / laif-Rea

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Paris. Salle Pleyel. 09-09-2011. Mikhaïl Glinka (1804-1857) : Ouverture de Russlan et Ludmila ; Maurice Ravel (1875-1937) : Concerto en sol majeur pour piano et orchestre ; Hector Berlioz (1803-1869) : Symphonie Fantastique. Jean-Yves Thibaudet, piano. The Philadelphia orchestra, direction : Charles Dutoit.

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