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Aulis Sallinen, compositeur

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Symphoniste émérite et compositeur d'opéras majeurs, est le plus francophile des musiciens finlandais. Son œuvre, singulière et unique, reflète l'art d'un pays où la richesse des styles est une marque de fabrique nationale. ResMusica rencontre cet ami de la France et compositeur incontournable toujours orienté vers l'avenir.

ResMusica : Vous êtes plutôt un compositeur connu pour ses symphonies. Quelle est, pour vous, l'importance de la symphonie, en 2010 ?

: J'ai écrit des musiques très différentes, j'en suis à mon quatre-vingt-quinzième opus ! Il y a six opéras, huit symphonies, des concertos et de la musique de chambre. J'ai composé ma dernière œuvre pour orchestre, il y a 8 ans : la Symphonie n°8 commande de l'Orchestre du Concertgebouw d'Amsterdam. Après cette symphonie, je me suis concentré sur la musique de chambre avec quinze partitions pour des effectifs instrumentaux très variés. Cela signifie que la symphonie n'est plus aussi centrale dans mes préoccupations. Je ne sais pas vraiment pourquoi je néglige les formes symphoniques, mais quand on est âgé, écrire de la musique pour orchestre ou des opéras, c'est très fatigant ! De plus, nous avons, en Finlande, toute une pléiade d'ensembles de musique chambre, tous plus excellents, les uns que les autres !

RM : Quel regard portez-vous sur vos symphonies ?

AS : Je ne peux pas répondre à cette question, ce sont toutes, en quelques sortes, mes enfants ! Chacune est différente et témoigne de certaines de mes préoccupations. On m'a déjà demandé, à plusieurs reprises, lequel des mes six opéras j'aime le mieux ; c'est un piège dans lequel je ne vais tomber. Un opéra c'est trois ans de travail ! On est tellement fatigué à la fin de la composition qu'il faut faire le vide dans sa tête. Il faut choisir, pour l'opéra suivant, un sujet complètement différent ! C'est pour cela qu'ils ne sont pas comparables et que je les aime tous ! Comme mes symphonies ? Elles sont toutes enregistrées, parfois, il existe même plusieurs versions, j'en suis éminemment ravi !

RM : En Finlande, nous sommes frappés par la richesse des styles à l'inverse des pays francophones où l'on reste plutôt dominés par une certaine conception de l'avant-garde musicale ? Comment expliquez-vous cette incroyable variété des esthétiques ?

AS : Cela n'a pas toujours été le cas ! Dans les années 1950-1960, le dodécaphonisme était, ici aussi, dominateur commun ! J'ai commencé, comme tout le monde, en suivant ce courant avant de m'en débarrasser assez vite. Vous avez raison de dire qu'il y a un pluralisme remarquable en Finlande, mais je crois que ce phénomène est désormais mondial. Même en France, un compositeur comme se détache, avec talent, du sillon «boulézien». Mais vous avez raison, les pays scandinaves ont été des précurseurs dans ce domaine et on s'est, très tôt, libérés du carcan du sérialisme. Mais, je pense, qu'à travers ces réflexions, il est important de s'interroger sur la notion d'avant garde. Qu'est ce que cela signifie en 2010 ? Il y a quarante ans, on pouvait répondre que l'avant-garde c'était le dodécaphonisme. Mais maintenant ? Quand on regarde les jeunes compositeurs, on est frappé par la richesse des parcours, ainsi d'anciens rockeurs deviennent des compositeurs «classiques», ce qui donne une couleur particulière à leur musique. Les frontières sont brouillées !

RM : Est-ce que vous revendiquez un compositeur finlandais ?

AS : Oui ! Mais c'est difficile à définir comme concept, surtout maintenant. Je suis heureux de constater l'excellence des jeunes musiciens qui reçoivent des formations académiques d'un niveau jamais atteint dans l'histoire de la musique. Même si, effet de pyramide, les personnalités exceptionnelles sont plutôt rares. Là encore, la variété des styles rend toute théorisation délicate. L'une des richesses de notre pays, réside dans les nombreuses bourses et subventions publiques, dont je suis un exemple concret !

RM : Les jeunes compositeurs mélangent l'héritage de la musique savante occidentale avec d'autres sources d'inspirations venant du jazz ou des musiques traditionnelles. Que pensez-vous de ces expérimentations ?

AS : C'est formidable ! Je trouve qu'il faut être ouvert sur le monde et ne pas avoir de barrières !

RM : Quelles sont vos prochaines créations ?

AS : J'écris une œuvre pour cor anglais et petit ensemble. Un grand hautboïste de la philharmonie d'Helsinki, qui va fêter ses soixante ans, m'a demandé de lui écrire quelque chose avant sa retraite, je suis en train d'y travailler. Je n'écris pas beaucoup de musique, avec l'âge on est peut-être plus attentif à la qualité.

 

– Lire l'étude de Jean-Luc Caron « Aulis Sallinen, symphoniste d'aujourd'hui et de toujours »

– Retrouvez au disque et en DVD

L'œuvre d'Aulis Sallinen est bien représentée chez les labels BIS, Finlandia, CPO et Naxos. Pour découvrir ce compositeur, on recommande tout particulièrement l'ensemble de ses symphonies gravées par le chef à la tête de différents orchestres (CPO). Ses opéras, tous enregistrés, sont disponibles, en CD, chez Finlandia et Ondine. Sur DVD, The Palace a été édité dans une belle captation réalisée au festival de Savonlinna.

Trois références incontournables :

Aulis Sallinen : CD 1 (CPO 999 918-2) : Ouverture solennelle (Roi Lear), op. 75 ; Symphonie n° 1, op. 24 ; Chorali ; Symphonie n° 7, op. 71 «Les Rêves de Gandalf». CD 2 (CPO 999 969-2) : Symphonie n° 4, op. 49 ; Symphonie n° 2, op 29 «Dialogues symphoniques» ; Concerto pour cor, op. 82 ; Mauermusik, op. 7. CD 3 (CPO 999 970-2) : Symphonie n° 3, op. 35 ; Symphonie n° 5, op. 57 «Washington Mosaics». CD 4 (CPO 999 971-2) : Symphonie n° 6, op. 65 «From a New Zealand Diary» ; Concerto pour violoncelle, op. 44. CD 5 (CPO 999 972-2) : Shadows, op. 52 ; Symphonie n° 8, op. 81 «Autumnal Fragments» ; Concerto pour violon, op. 18 ; The Palace Rhapsody, op. 72. Esa Tapani, cor ; Martin Orraryd, percussion, Jan-Erik Gustafsson, violoncelle ; , violon. Deutsche Staatsphilharmonie Rheinland-Pfalz ; Orchestre symphonique de Norrköping, dir. . Coffret de 5 CD séparés. CPO 777 640-2.

Aulis Sallinen, The Palace, solistes, chœur et orchestre du festival de Savonlinna, direction : Okko Kamu. 1 DVD Arthaus. Référence : 102 091.

Aulis Sallinen  : La Ligne Rouge. solistes, chœurs et orchestre de l'Opéra National de Finlande, direction : Mikko Franck. 1 DVD Ondine ODV 4008.

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