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Cologne. Opernhaus. 15-I-2011. Giuseppe Verdi (1813-1901) : Aida, opéra en quatre actes sur un livret d’Antonio Ghislanzoni. Mise en scène : Johannes Erath. Décors : Kaspar Glarner. Costumes : Christian Lacroix. Lumières : Nicol Hungsberg. Avec : Scott MacAllister, Radamès ; Jovita Vaskeviciute, Amneris ; Hui He, Aida ; Mikhail Kazakov, Ramfis ; Samuel Youn, Amonasro ; Wilfried Staber, il Re ; Kathleen Parker, la Sacerdotessa ; Jeongki Cho, il Messagero. Chœur de l’Opéra de Cologne (chef de chœur : Andrew Ollivant), Orchestre du Gürzenich de Cologne : direction : Will Humburg.
Il y a des mises en scène qui fascinent, d'autres qui agacent, d'autres encore qui ennuient. Et il y en a celles qui laissent perplexe.
La nouvelle Aida de l'Opéra de Cologne fait partie de ces dernières. Dans les sombres décors de Kaspar Glarner, contrastés seulement par les costumes fantaisistes du couturier Christian Lacroix, Johannes Erath nous raconte une histoire en constante contradiction avec le texte chanté. Mais raconte-t-il vraiment une histoire ? On peut en douter. Ici, le pharaon est le pape, un pape vieux et malade, visiblement dominé par les évêques qui l'entourent – et qui le tuent à la fin de l'acte deux. Mais pourquoi ce pape peut-il admettre ouvertement d'avoir une fille ? Et pourquoi ne se rend-il pas compte que le récit du messager – arrivé, dit-on, de la frontière éthiopienne – est lu d'un grand livre doré tel l'Evangile dans la messe ? Pourquoi Radamès se présente-t-il en pyjama devant Ramfis et Amneris en chemise de nuit ? Pourquoi les suivantes de cette dernière sont-elles des anges ? Et pourquoi se voit-elle enfermée avec Radamès et Aida ? Dans le programme de salle on nous apprend que l'action d'Aida rappelle l'ordre rituel de la messe catholique – mais en quelle sens ? Du moins, le programme nous explique la présence répétée d'une vieille dame sur scène. C'est la vieille Amneris qui se souvient du passé. Est-ce donc cette vieille dame démente qui nous raconte l'histoire sans évidemment se soucier d'un minimum de lisibilité ?
Arrêtons de poser des questions auxquelles nous ne trouverons pas de réponses et parlons plutôt de musique. Mais malheureusement, là non plus, tout n'était pas au mieux. Qui diable avait eu l'idée d'inviter Scott MacAllister à chanter son premier Radamès à Cologne ? Piètre acteur, sa voix n'a strictement rien d'un ténor verdien. Timbre sans charme, émission étroite, aigu sûr, mais uniformément claironnant, voyelles déformées, phrasé scolaire – voilà à quoi se résume la prestation du ténor américain, à quoi s'ajoute un non-respect agaçant des nuances indiquées par le compositeur. Ramfis alias Mikhail Kazakov, aux moyens vocaux impressionnants, confond Verdi et Mussorgski. On monte d'un cran avec Amneris de Jovita Vaskeviciute, véritable bête de scène, dotée, en plus, d'une voix puissante et colorée, frôlant pourtant la catastrophe avec des aigus criés, voire à peine esquissés à l'acte quatre.
Restent les trois stars de la soirée : Samuel Youn d'abord, à son premier Amonasro, fait entendre une voix magnifiquement timbrée sur toute la tessiture qui sait, tour à tour, enjôler et donner le frisson. Dommage qu'il ressemble bien plus frère d'Aida qu'à son père. Hui He ensuite, Aida de service de New York à Vienne en passant par Munich et Vérone, fascine par la beauté de son timbre au médium chaud et corsé et à l'aigu fulgurant, mais surtout par son art des nuances qui l'oppose à la plupart de ces collègues. Ainsi, «O patria mia» est le moment magique de la soirée. Will Humburg enfin, chef excentrique, à la gestuelle complètement démesurée, qui croit pourtant à la force de la musique. Si certains tempi sont à la limite du faisable, sa lecture très personnelle s'avère toujours passionnante et point avare de nuances. Et le Gürzenich-Orchester, souvent peu à l'aise dans le répertoire italien, le suit comme un seul homme – tout comme les formidables chœurs préparés par Andrew Ollivant.
Le public, à la fin, ovationne le chef – tout comme les chanteurs. Que le metteur en scène, en revanche, s'en sortit sans huées, fait partie des nombreux mystères de cette soirée…
Crédit photographique : Wilfried Staber (Il Re), Samuel Youn (Amonasro), derrière Mikhail Kazakov (Ramfis) / Scott MacAllister (Radamès), Hui He (Aida) © FORSTER
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Cologne. Opernhaus. 15-I-2011. Giuseppe Verdi (1813-1901) : Aida, opéra en quatre actes sur un livret d’Antonio Ghislanzoni. Mise en scène : Johannes Erath. Décors : Kaspar Glarner. Costumes : Christian Lacroix. Lumières : Nicol Hungsberg. Avec : Scott MacAllister, Radamès ; Jovita Vaskeviciute, Amneris ; Hui He, Aida ; Mikhail Kazakov, Ramfis ; Samuel Youn, Amonasro ; Wilfried Staber, il Re ; Kathleen Parker, la Sacerdotessa ; Jeongki Cho, il Messagero. Chœur de l’Opéra de Cologne (chef de chœur : Andrew Ollivant), Orchestre du Gürzenich de Cologne : direction : Will Humburg.