Les Danel au pays des soviets

Le concert du Quatuor Danel dans le cadre du remarquable cycle Lénine, Staline et la musique à la Cité de la Musique s'est certes terminé par un bis – tout en velours – de Dimitri Chostakovitch (Elégie), mais le programme Mossolov – Tishchenko – Weinberg a démontré que l'art du quatuor dans l'Union Soviétique ne se limitait pas au fameux corpus des 15 quatuors composés par Dimitri Dimitrievitch.

C'est à un petit tour du quatuor au pays des Soviets que nous ont invités les Danel. Le Quatuor n°1 de Mossolov de 1926 composé en pleine période constructiviste fit la joie de l'avant-garde soviétique et européenne. Dans le Quatuor n°1 d'un Boris Tishchenko de 18 ans on devine déjà le grand orchestrateur qui n'a peur ni du chant ni du rythme et encore moins des ruptures. Weinberg fraîchement arrivé en URSS a dans son Quatuor n°3 de 1944 le cinglant, le mélancolique, le déchirement qu'on associe au seul Chostakovitch mais qu'il n'aurait pas su exprimer s'il n'avait été que son épigone.

Si chaque œuvre avait son attrait et sa spécificité, c'est bien leurs qualités communes qui frappaient : qualité et variété des ambiances, de la danse populaire à la science polyphonique ; force d'expression, de la rêverie arachnéenne au drame tranchant.

Le Quatuor Danel, dans une forme exceptionnelle ce soir, a restitué la flamme, le fer, la glace et l'éther de ces musiques. Après leur intégrale Chostakovitch chez Fuga Libera (Clef ResMusica) et l'achèvement de leur intégrale Weinberg (CPO), espérons qu'ils ajouteront Tishchenko et Mossolov à leur aventure discographique.

Crédit photographique : Quatuor Danel © Quatuor Danel