Tôn-Thât Tiêt, un divan occidental-oriental

Ceux pour qui son nom n'évoque pas grand chose se souviendront au moins avoir entendu parler du film L'odeur de la papaye verte, dont il a composé la musique, et dont le titre est comme le miroir de son œuvre. Référence au monde de la nature, raffinement, contemplation et bien sûr exotisme, tout dans ce titre fait écho à l'esthétique de Tôn-Thât Tiêt, dont Laurence Bancaud nous propose une utile introduction.

Structuré deux grandes parties, son livre dresse tout d'abord un rapide portrait de l'homme, ainsi qu'un panorama de son évolution stylistique, sous forme d'entretiens thématiques. À la lecture de ces pages, le parcours du compositeur semble éminemment lié à l'histoire ; politique, bien sûr, étant donné le climat du Viêtnam de son enfance, mais surtout culturelle, puisque, arrivé à Paris en 1958, Tôn-Thât Tiêt se lie entre autres avec André Jolivet, Henri Dutilleux, Maurice Ohana et Pierre Boulez, ce qui atteste non seulement d'une grande ouverture d'esprit, mais également d'un fort esprit d'indépendance de sa part !

La seconde partie de l'ouvrage se penche ensuite sur quelques éléments analytiques de sa musique, qui mettent en perspective l'esthétique particulière de Tôn-Thât Tiêt, où voisinent son amour de la musique traditionnelle de son pays et un vocabulaire plus spécifiquement occidental inspiré de Webern et Penderecki, le tout mâtiné de philosophie orientale, à l'instar d'un Toru Takemitsu. On abordera ainsi des thématiques aussi diverses que le rythme, les textures ou encore l'écriture vocale, avant de se pencher sur un faisceau d'œuvres représentatives de son style.

Concis, clair et servi par une riche iconographie, ce livre fait indéniablement triompher l'auteure dans son projet, à savoir susciter l'envie chez le lecteur de découvrir (ou d'approfondir) l'œuvre de ce compositeur, dont le catalogue est d'ailleurs donné en fin d'ouvrage par ordre chronologique, ainsi que la traduction de certains des textes qu'il a mis en musique.