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John Storgårds, chef d’orchestre

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La pépinière des chefs d'orchestre finlandais ne cesse de nous apporter des musiciens de premier plan. Après Leif Segerstam, Jukka-Pekka Saraste, Esa-Pekka Salonen, une nouvelle génération est à la conquête du monde musical. Violoniste virtuose ayant troqué son archer pour la baguette, est l'un de ces brillants représentants à la tête de l'orchestre philharmonique d'Helsinki. Il vient d'être récompensé d'un clef de l'année 2010 de ResMusica. com pour son disque consacré à .

«En Finlande, nous sommes formés, en tant que soliste ou instrumentiste, dans une perspective orchestrale. Dès lors, tout apprenti chef d'orchestre connaît les exigences et la psychologie de l'orchestre.»

ResMusica : Votre carrière prend un envol international. Outre la Philharmonie d'Helsinki dont vous êtes le Directeur musical, auprès de quels orchestres êtes-vous liés ? 

 : Je dirige aussi l'Orchestre de chambre de Laponie. Ces deux mandats sont très constructifs et positifs car les formations orchestrales sont à la fois différentes et complémentaires, surtout au niveau du répertoire. Nous avons, en Laponie, un festival d'été avec des concerts en plein air, c'est un projet original et enthousiasmant. Sinon, je suis invité à travers le monde, en France, je retourne bientôt diriger l'Orchestre du Capitole de Toulouse.

RM  : Vous êtes l'élève de Jorma Panula, l'une des légendes de la direction et le professeur de chefs comme Salonen ou Saraste, n'est-il pas intimidant d'être l'élève d'un tel personnage ?

JS : Je n'ai effectué qu'une partie de mon cursus avec Jorma Panula. Quand j'apprenais la direction, il avait déjà réduit ses activités. Nous avions de nombreux professeurs invités dont le grand Ilya Musin, le titulaire de la classe de direction au conservatoire de Saint-Pétersbourg (qui fut le professeur de Valery Gergiev), il m'a beaucoup marqué. Mon principal professeur fut Leif Segerstam, c'est d'ailleurs lui qui a repris la totalité de la classe de direction à l'Académie Sibelius.

RM  : Salonen, Saraste, Oramo, Segerstam, vous… La Finlande ne cesse de produire des chefs d'orchestre de haut vol. Quelles sont les raisons de ce succès finnois ? 

JS : C'est une question compliquée à laquelle il est difficile de répondre ! Je n'ai pas d'explication toute faite et je pense qu'il faut prendre en compte différents paramètres.
Il me semble que l'un des points forts réside dans la force de la communauté musicale finlandaise. Dès qu'un jeune chef est talentueux, il bénéficie d'opportunités avec des orchestres professionnels et il est aidé par les institutions. Un autre aspect est la formation complète des jeunes artistes aux métiers de l'orchestre. Nous sommes formés, en tant que soliste ou instrumentiste, dans une perspective orchestrale. Dès lors, tout apprenti chef d'orchestre, connaît les exigences et la psychologie de l'orchestre. Enfin, il y a une certaine «émulation» positive entre les musiciens finlandais. Je veux dire qu'il ne s'agit pas d'une compétition mais plutôt de relations amicales mais qui tirent le niveau vers le haut. Tout le monde se connaît dans un petit pays comme le nôtre, la dynamique de groupe s'avère très constructive.

RM  : Vous passez sans problème du répertoire classique, aux contemporains. C'est aussi l'une des marques de fabrique de la Finlande. Pourquoi ?

JS : Je fais partie de la génération qui a fondé l'ensemble Avanti dans les années 1980, afin de jouer ce répertoire contemporain. C'était alors un projet complètement nouveau par rapport aux structures et institutions existantes. Il y avait une collaboration sans barrières entre les instrumentistes avec des musiciens comme le clarinettiste , des chefs à l'image de Jukka-Pekka Saraste et Esa-Pekka Salonen et des compositeurs comme ou Kaija Saarihao. Ce projet sans frontières a stimulé l'attention du public et nous avons pu décliner les manifestations sous diverses formes : du happening au festival d'été en surfant sur la grande liberté des styles que l'on retrouve en Scandinavie. J'ai aussi profité de cette énergie et de cet enthousiasme et je continue de défendre la musique contemporaine.

RM  : Dans votre programmation pour la philharmonie d'Helsinki, on est admiratif de la mise en avant des œuvres rares. Vous proposez ainsi une série de trois concerts autour de William Walton. Pour quelles raisons, programmez-vous ce compositeur anglais, en Finlande ? 

JS : L'un de mes amis journaliste m'a dit que Walton n'était pas beaucoup joué et qu'il fallait faire quelque chose. C'était l'idée de départ et nous avons étendu la réflexion à un cycle de concerts avec des pièces de Walton et des musiciens connectés à son univers : Hindemith, Korngold et Delius qui n'est jamais jouée en Finlande.

RM  : Vous dirigez la Symphonie n°3 d', une partition qui a quasiment disparu des programmes des pays francophones. Pourquoi ce choix ?

JS : Parce que c'est une grande pièce ! Elle reflète, par son climat sombre et ses couleurs, le drame de la seconde guerre mondiale. Cette symphonie possède une très forte portée émotionnelle qui touche le public. Il est dommage qu'elle soit peu jouée ! Un chef comme Karajan la programma et l'enregistra pourtant. C'est la seconde fois que je la dirige, je l'avais déjà conduite avec mon précédent orchestre à Tampere. J'ai aussi dirigé à plusieurs reprises sa Symphonie n°2 pour orchestre à cordes. Je ne suis pas hostile à l'idée de diriger ses autres symphonies.

RM  : La musique française est-elle importante pour vous ? 

JS : Je ne peux pas dire, mais je suis attiré par différentes pièces de Messiaen et Debussy. En tant que violoniste, j'ai joué pas mal de musique de chambre, Fauré par exemple, que j'adore. Mais oui, j'ai envie de travailler plus de partitions françaises

RM : Quels sont vos projets de disques ?

JS : Nous venons de sortir un disque avec des œuvres de Uuno Klami, un contemporain de Sibelius, mais beaucoup moins connu au niveau international avec des grandes pièces pour orchestres. C'est publié chez Ondine avec qui nous avons un contrat d'exclusivité. L'autre nouveauté est dédiée à une nouvelle version du Concerto pour violon de Sibelius avec Frank-Peter Zimmermann. Sa vision renouvelle notre approche de l'œuvre, c'est rare dans un répertoire aussi rebattu par les solistes !
Nous sommes en train de planifier des projets à plus long terme, nous tenterons de couvrir tous les répertoires ! Des classiques jusqu'aux contemporains !

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