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Montreux. Auditorium Stravinski. 12-IX-2010. Arnold Schoenberg (1874-1951) : Gurrelieder, texte de Jens Peter Jacobsen traduits en allemand par Robert Franz Arnold. Avec Christine Brewer Tove ; Petra Lang, Waldtaube ; Stephen Gould, Waldemar ; Andreas Conrad, le Bouffon Klaus ; Stephen Powell, le Paysan ; Wolfgang Schöne, le Récitant. Orchestre de la Suisse Romande, Orchestre de la Tonhalle de Zurich, Norddeutscher Rundfunk Chor (chef de chœur : Philippe Ahmann), Chœur de l’Etat de Lettonie (chef de chœur : Maris Sirmais), Chœur de femmes du Grand Théâtre de Genève (chef de chœur : Ching-Lien Wu). Direction musicale, David Zinman
Festival de Montreux
Toute exécution des Gurrelieder, chef d'œuvre du romantisme aux dimensions monumentales, reste un évènement tant les effectifs requis sont hors du commun : grand orchestre symphonique, large chœur mixte, six solistes, soit près de trois cents personnes sur la scène, qui peut se permettre un tel investissement pour satisfaire à ce désir fou ?
C'est pourtant le pari que le Festival de Musique Classique Montreux/Vevey et son directeur Tobias Richter (associé pour l'occasion au Festival de Lucerne) ont osé prendre pour clore, en apothéose, le festival de cette année avec la complicité du chef David Zinman et la collaboration de deux orchestres majeurs de la Suisse : l'orchestre de la Suisse Romande et l'orchestre de la Tonhalle de Zurich.
Et le feu a enflammé les planches de l'Auditorium Stravinski, seul espace de Suisse Romande à même de recevoir une telle armée de musiciens. Dès les premières notes, on ressent la sensation d'être prisonnier d'un tourbillon musical dans cet univers qui magnifie à l'extrême une certaine conception «fin de siècle» du son orchestral.
De l'interprétation montreusienne, il faut avant tout complimenter la direction d'orchestre de David Zinman qui, sans maniérisme, sans excès de manche (suivez mon regard !) a su offrir avec un art consommé de la musique, des pianissimi émouvants et des fortissimi explosifs sans jamais se départir d'une lecture d'une limpidité extrême. Signature d'un très grand chef, il contient la masse orchestrale et vocale comme il la laisse exploser dans les envolées lyriques d'une partition d'une richesse harmonique incroyable. Tout en colorant ses pupitres, il les modère pour que jamais les solistes ne se trouvent en difficulté à cause d'un volume sonore excessif ou d'échos inhérents à l'acoustique de la salle. Ne relâchant jamais l'intensité musicale de cette œuvre souveraine, David Zinman y est exemplaire.
Côté solistes, difficile de réunir meilleure brochette. En Waldemar, le ténor Stephen Gould confirme l'artiste entendu à plusieurs reprises à travers l'Europe. Sa sensibilité humaine et sa vocalité virile collent parfaitement au rôle de Waldemar qu'il fait sien. Si la puissance vocale et les aigus ardents apparaissent comme l'évidence vocale de Christine Brewer (Tove), quelques pianissimi éthérés témoignent de sa maîtrise instrumentale. Avec Andreas Conrad (le Bouffon Klaus), Stephen Powell (le Paysan) et Wolfgang Schöne (le Récitant) leurs belles apparitions n'ont fait qu'ajouter à la qualité du plateau. C'est avec Petra Lang (Waldtaube) que l'émotion habitée atteint des sommets. Avec sa voix riche, fascinante, éclatante, elle chante la mort de Tove avec une tristesse mêlée de terreur vengeresse qui vous glace le sang jusqu'à ce qu'une phrase finale susurrée du plus émouvant effet nous replonge dans le deuil.
Avec le final tellurique de cette œuvre unique, l'intensité sonore est si intense et si émotionnelle qu'il a fallu attendre de longues secondes avant que le public réalise la fin du concert et réserve un triomphe à cette interprétation de tous les superlatifs.
Crédit photographique : David Zinman © Priska Ketterer
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Montreux. Auditorium Stravinski. 12-IX-2010. Arnold Schoenberg (1874-1951) : Gurrelieder, texte de Jens Peter Jacobsen traduits en allemand par Robert Franz Arnold. Avec Christine Brewer Tove ; Petra Lang, Waldtaube ; Stephen Gould, Waldemar ; Andreas Conrad, le Bouffon Klaus ; Stephen Powell, le Paysan ; Wolfgang Schöne, le Récitant. Orchestre de la Suisse Romande, Orchestre de la Tonhalle de Zurich, Norddeutscher Rundfunk Chor (chef de chœur : Philippe Ahmann), Chœur de l’Etat de Lettonie (chef de chœur : Maris Sirmais), Chœur de femmes du Grand Théâtre de Genève (chef de chœur : Ching-Lien Wu). Direction musicale, David Zinman