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Paris. Salle Pleyel. 10-IX-2010. Robert Schumann (1810-1856) : Ouverture, Scherzo et Finale ; Johannes Brahms (1833-1897) : Rhapsodie pour Contralto, chœur et orchestre ; Le Chant des Parques ; Alexander von Zemlinsky (1872-1942) : Sinfonietta. Nathalie Stutzmann, contralto. Chœur et orchestre philharmonique de Radio France (chef de chœur : Matthias Brauer), direction : François-Xavier Roth.
Schumann est un «cas». Sa musique est indéniablement reconnue et aimée ; pourtant on ne l'entend guère dans l'hexagone. Peut être la juge-t-on trop originale, voire trop germanique ? Une chose est sûre : si sa musique pour piano, et de chambre en général est largement plébiscitée, il n'en est pas de même pour sa production symphonique. Aussi saluons-nous le choix de François-Xavier Roth de programmer le triptyque méconnu Ouverture, Scherzo et Finale.
En regard l'une de l'autre, les deux pièces symphoniques de Schumann et Zemlinsky offrent un contraste stylistique on ne peut plus saisissant. La Sinfonietta de ce dernier, très «République de Weimar» dans son inspiration canaille autant que dans son instrumentation post-mahlérienne, bénéficie d'un orchestre chauffé à blanc par une heure de concert : les couleurs sont fauves, les contours mélodiques âprement dessinés, ce qui restitue idéalement le rire jaune du compositeur, qui semble cacher une immense mélancolie derrière le grotesque et le tapageur de certains passages. Tout le contraire de la pièce de Schumann, d'un caractère résolumment gemütlich, qui se voit reléguer au rang de tour de chauffe ; l'Ouverture est fade, le Scherzo mou du genoux … il faut attendre le Finale pour que François-Xavier Roth communique à l'orchestre sa lecture de l'œuvre, qui nous révèle toutes les particularités du style interprétatif de ce jeune chef. Parfois un peu raide, pas forcément porté sur le rubato, les interprétations qu'il nous propose sont toujours très claires, dans le dessin de la thématique comme dans le détail.
Ainsi, malgré l'accent qu'on avait voulu mettre sur la pièce de Schumann et malgré la qualité de l'œuvre de Zemlinsky, il nous faut reconnaître que le véritable cœur expressif de cette soirée était bel et bien occupé par les deux pièces de Brahms. Qu'en dire ? Sombres, mouvementées, visiblement inspirées par des moments de tristesse rageuse et bougonne, telle que la postérité nous a peint le caractère du compositeur, ces deux œuvres puissantes ont toutefois été rendues de façon fort inégale.
La Rhapsodie tout d'abord permet à Nathalie Stutzmann de nous montrer la chaleur et la profondeur de son timbre de contralto, de même que la clarté de sa diction, le tout dompté par la grande pudeur de son chant, à tel point qu'on se prend à rêver de l'entendre dans le rôle d'Erda, la prophétesse de la Tétralogie. Ni l'orchestre ni le chœur ne parviennent à l'éclipser une seconde, et lorsque Brahms lui confie quelques instants de repos, on ne souhaite que son retour dans la trame musicale. A contrario, le Chant des Parques est simplement raté. La musique indéniablement inspirée réserve de beaux moments, telle la fin, mais les forces en présence ne vibrent pas à l'unisson : l'orchestre fulmine avant de se perdre dans la contemplation pendant que le chœur mastique consciencieusement son allemand, sans sembler prêter beaucoup d'attention au sens du texte. C'est dommage, compte tenu de la qualité indéniable des formations de Radio France autant que du chef.
Crédits photographiques : François-Xavier Roth © Grégoire Pont
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Paris. Salle Pleyel. 10-IX-2010. Robert Schumann (1810-1856) : Ouverture, Scherzo et Finale ; Johannes Brahms (1833-1897) : Rhapsodie pour Contralto, chœur et orchestre ; Le Chant des Parques ; Alexander von Zemlinsky (1872-1942) : Sinfonietta. Nathalie Stutzmann, contralto. Chœur et orchestre philharmonique de Radio France (chef de chœur : Matthias Brauer), direction : François-Xavier Roth.