Pour cette soirée Balanchine, des pièces entrées récemment au répertoire du Ballet de Novossibirsk, sous l'impulsion de son directeur, Igor Zelensky, qui fut principal du New York City Ballet dans les années 90.
La soirée consacrée à George Balanchine, chorégraphe qui n'a pu être programmé en Russie qu'après la perestroïka, débute par Serenade. Parfait écho aux Sylphides (Chopiniana) montré la veille, ce ballet sans narration déroule sa construction parfaite autour de ses danseuses en tutu blanc. Longues et fines, les ballerines de Novossibirsk ont, elles aussi, subi le joug des veuves du Balanchine Trust, qui veille au respect absolu du style balanchinien. Celles-ci n'ont pas de souci à se faire ! Avec la même fraîcheur et le même enthousiasme que les jeunes américaines du School of American Ballet pour lesquelles George Balanchine avait créé le ballet en 1934. Corps allongés, ports de bras nobles, ces jeunes filles servent le subtil jeu d'emboîtement proposé par Balanchine. Fluidité et légèreté sont au rendez-vous.
Apollon, qui suit, est-il un ballet féministe ? Les danseuses qui incarnent les trois muses sont extraordinairement à l'aise dans ce quatuor spirituel et subtil. Terpsichore tout particulièrement, interprétée par Vera Sabantseva, éblouit par ses lignes très pures, tandis que Calliope et Polymnie (Anna Odintsova et Natalya Fateeva) font assaut d'espiéglerie et de coquetterie. Une réussite !
Olessia Novikova et Leonid Sarafanov, les deux danseurs du Mariinski de Sainte-Petersbourg invités dans le cadre du gala, ont le privilège de danser à nouveau dans cette soirée Balanchine. Plus décontractés que la veille, ils font des étincelles dans le Tchaikovski – Pas de deux brillant et virtuose. Mis en valeur entre deux chorégraphies plus «modernes» de Balanchine, le pas de deux reprend la structure du grand pas classique et enchaîne les difficultés techniques : manège, sauts, batterie, fouettés et j'en passe… Olessia Novikova, aux bras moelleux et aux jambes interminables, pratique un style balanchinien moins pur que ses consoeurs de Novossibirsk. Leonid Sarafanov est un vrai danseur noble, léger, puissant et élégant.
Avec Who Cares ?, le ballet qui achève brillamment ce programme, Balanchine l'américain a retrouvé son pays d'origine. Avec peps et brio, les danseurs de Novossibirsk se transportent à Broadway. Le contraste est cependant encore grand entre le corps de ballet – charmant, sans plus – et les solistes (trois hommes et une femme) parmi lesquels brillent Zelenski lui-même. Flegme et élégance à la Fred Astaire, il allie charme et distinction avec ses cheveux poivre et sel. Ses partenaires, d'un très bon niveau technique, ont adopté sans fausses notes le style très particulier de Who Cares ? : mélange jazzy de virtuosité et de décontraction.
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