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Quel programme! Mais gare à la monotonie …

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Paris. Salle Pleyel. 27-IV-2010. Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Concerto pour piano et orchestre n°5 en mi bémol majeur, Op. 73 « L’Empereur ». Gustav Mahler (1860-1911) : Symphonie n°6 en la mineur « Tragique ». Nicholas Angelich, piano. Orchestre Symphonique de la Radio Suédoise, direction : Daniel Harding

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Voilà un concert au programme bien copieux comme on en n'entend plus tellement aujourd'hui, où il est courant de «se contenter» des quatre vingt minutes de la

Symphonie n°6 de Mahler pour remplir une soirée. Mais point cette fois où rien moins que le Concerto «L'Empereur» nous était offert en première partie. Généreux certes, des chefs-d'œuvre surement, mais en choisissant un tel programme, les interprètes prenaient le risque d'épuiser leur auditoire, tant on sait bien que la symphonie de Mahler peut à elle toute seule facilement tomber dans ce travers. Toutefois le chef et son orchestre ayant su rester sages avec les décibels nous sommes arrivés jusqu'à la fin du concert sans soucis, mais sans emballement non plus.

Remplaçant Hélène Grimaud qui avait du déclarer forfait quelques jours auparavant, le pianiste américain substitua au Concerto pour piano et orchestre n°4 initialement prévu le célébrissime Concerto n°5 «L'Empereur» qu'il attaqua avec une vigueur nous rappelant la façon caractéristique de certains pianistes russes. Cette franchise d'attaque du clavier avait au moins l'avantage de correctement remplir l'espace sonore de Pleyel et de parfaitement équilibrer piano et orchestre, ce qui est primordial dans cette œuvre. Bien sûr la contrepartie fut sans doute des pianissimi moins subtils qu'idéalement, mais on ne peut pas tout avoir. L'introduction orchestrale fut un peu plus molle et ne permit pas de dégager immédiatement une option interprétative claire. La lecture du chef était scrupuleuse, et son orchestre, puisqu'il en est désormais le patron, le suivait avec une précision qui ne se démentit pas tout au long de la soirée. Mais on sentit également au fur et à mesure que les mesures défilaient une certaine difficulté à faire avancer cette musique dans une progression constante, mettant, à nos oreilles, insuffisamment en évidence l'aspect organique du développement de la forme sonate de ce premier mouvement, et déclenchant, du coup, un début de monotonie. Renforcé par l'usage d'un tempo assez vigoureux mais maintenu sans variations ni respirations. Par contre on sentit qu'ici ou là le pianiste essayait de son côté d'introduire quelques variations de climat ou subtiles nuances, un peu timidement d'ailleurs, sinon à rebours de l'accompagnement orchestral, ce qui fit qu'elles ne furent pas si convaincantes que ça. L'Adagio fut le plus réussi des trois mouvements, attaqué tout en douceur, très lentement, avec une certaine noblesse de ton qui trancha avec l'aspect motorique de l'Allegro. Angelich osa mettre du rubato au début du mouvement, mais curieusement joua la fin du mouvement avec une certaine raideur. Avouons que l'inverse ne nous aurait pas choqués. Enfin le Rondo retrouva l'esprit direct, droit, et aussi répétitif, qu'avait le premier mouvement, achevant une exécution correcte mais une interprétation pas assez riche.

C'est exactement ce que nous inspira la longue Symphonie n°6 de Mahler, où tout était bien place, mais où, sur la durée, nous manqua finalement deux éléments : l'émotion musicale et la jouissance symphonique. Pour la première le chef porta sa part avec des choix de tempo toujours aussi motoriques, manquant de variété, alors que les occasions de varier ne manquent pas, notamment dans les deux immenses mouvements extrêmes, et une absence de vision dramatique qui aurait donné une direction à toute l'œuvre, et à chaque section sa raison d'être. Et pour la seconde, l'orchestre, certes de qualité et très homogène, n'a peut-être pas le niveau des tous meilleurs, qui dans cette symphonie en particulier, peut faire la différence. Manie moderne, et contrairement à la notice d'accompagnement, fit entendre l'Andante en deux et le Scherzo en trois, ne réussissant toujours pas à nous convaincre que c'est une bonne idée. D'autant qu'à la façon de jouer le Scherzo, il aurait pu idéalement suivre directement l'Allegro. Au final nous avons eu la sensation mitigée d'entendre une lecture propre de la partition, où tout était en place pour construire, sur cette base, une véritable interprétation. Mais nous n'avons eu que la base.

Crédit photographique : photo © Harald Hoffmann – Deutsche Grammophon

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