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Olivier Py, Lulu : épuisant!

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Genève. Grand Théâtre. 10-II-2010. Alban Berg (1885-1935) : Lulu, opéra en un prologue et trois actes d’Alban Berg sur un livret du compositeur. Partition terminée par Friedrich Cehra (né en 1926). Mise en scène : Olivier Py. Décors et costumes : Pierre-André Weitz. Lumières : Bertrand Killy. Avec Patricia Petibon, Lulu ; Julia Juon, La Comtesse Geschwitz ; Silvia De La Muela, L’habilleuse / Le lycéen / Le groom ; Robert Wörle, Le Prince / Le professeur de médecine / Le professeur ; Bruce Rankin, Le peintre / Le nègre ; Pavlo Hunka, Dr. Schön / Jack l’éventreur ; Gerhard Siegel, Alwa ; Hartmut Welker, Schigolch ; Jonathan Veira, Le dompteur / L’athlète ; Wolfgang Barta, Banquier/Directeur de Théâtre ; Jean Lorrain, Le commissaire de police ; Emilie Pictet, La fille de quinze ans ; Monique Simon, Sa mère ; Magali Duceau, Décoratrice ; Alexandre Diakoff, Le serviteur ; Heikki Kilpeläinen, La journaliste ; Robert Wörle, Le prince / Le valet / Le Marquis. Orchestre de la Suisse Romande, direction : Marc Albrecht

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Depuis plusieurs semaines, s'est répandu avec générosité dans une presse qui ne cesse de le poursuivre de ses assiduités pour expliquer sa conception du spectacle qu'il est en train de monter.

Mais alors qu'il s'agit de la sulfureuse Lulu d', la presse goûte déjà l'idée que le metteur en scène va pouvoir s'éclater dans la provocation, comme il a pu le faire lors de précédentes prestations. Raté ! Le public avide de sensation doit déchanter. L'explosion attendue n'est qu'un pétard mouillé. Même si, prudent, le Grand Théâtre de Genève a émis un avis de mise en garde devant le caractère «d'images qui, quoi que de plus en plus usuelles et répandues, restent rares et inhabituelles sur une scène lyrique et pourraient choquer un spectateur non averti» et déconseillait le spectacle «aux enfants en-dessous de 16 ans», le spectacle n'a rien de bien scandaleux. Non pas qu' ne prenne pas à bras le corps l'objet du scandale, mais l'œuvre en elle-même est plus forte que sa volonté de plaquer son monde à l'œuvre.

Epuisant ! Epuisant de suivre dans sa mise en scène de Lulu. Comme dans certains de ses précédents spectacles, le metteur en scène retombe dans son pire travers. Il veut tout montrer. Tout. Toutes les actions parallèles à l'intrigue principale. A force, il sème la confusion, génère l'incompréhension mais surtout il noie l'intrigue et avec elle le sens de l'action des personnages principaux. Si Lulu est un cirque, une ménagerie humaine, comme l'affirme le Dompteur dans le prologue, Olivier Py en fait un fourre-tout d'objets et de personnages dont la logique nous échappe. Difficile de saisir le sens de la présence de ces personnages à grosses têtes ou coiffés d'énormes masques de lapins ou encore de ces ballets de danseuses dévêtues dignes d'un mauvais cabaret parisien, d'un chien en peluche, d'un palmier ou autre dauphin-bouée de plage. Un bric-à-brac scénique où l'héroïne Lulu n'est plus qu'un objet parmi d'autres qui, malgré son omniprésence sur scène, s'évanouit dans la dilution du drame. Et comme si cela ne suffisait pas à la confusion du spectateur, cet insupportable inventaire «à la Prévert» s'ajoute au décor d'une rue dont les maisons et leurs devantures de magasin défilent sans discontinuer d'un bord à l'autre de la scène. Bien sûr, pour l'occasion, le scénographe attitré d'Olivier Py en profite pour ressortir les tubes néon aux couleurs agressives qu'on ne voyait plus sur les scènes d'opéra depuis quelques années pour en construire une incongrue roue éblouissant le spectateur qui, aidée par un machiniste veillant à ce qu'elle ne culbute pas de son rail incertain, fait aussi un incessant va-et-vient sur le fond de scène.

Reste la performance musicale. Avec cette musique d'un accès pas très facile, la direction d'orchestre de est tout simplement exceptionnelle. Ce qu'il réussit à tirer de l' est prodigieux. La mise en place est parfaite et met les chanteurs à l'aise.

A commencer par . En dépit du brouhaha de l'agitation scénique qui l'entoure, elle s'engage sans compter dans l'écrasant rôle de Lulu. En artiste affirmée, elle apporte une énergie désespérée à cette femme perdue qui ne comprend pas pourquoi elle devrait être autre que ce que la vie l'a faite. Connaissant ses précédents vocaux chez Mozart, chez Haendel, son Olympia des Contes d'Hoffmann, on l'imaginait mal capable d'aborder ce rôle meurtrier. Force est de s'incliner devant l'extraordinaire manière avec laquelle s'empare vocalement du personnage. Avec le seul bémol d'un léger manque de puissance du registre grave, elle garde une vocalité éclatante d'un bout à l'autre de l'opéra. Jamais elle n'est prise en défaut dans la manière d'imposer son personnage même si elle n'est pas dirigée correctement pour exprimer les enjeux de son ascension sociale comme ceux de sa déchéance morale. Sa performance reste néanmoins à saluer d'autant plus qu'à ses côtés, le baryton-basse (Dr. Schön/Jack l'éventreur) ne ménage pas la puissance de son instrument. Pas plus qu'Harmut Welker (Schigolch) ou que le ténor (Le Prince/le Nègre). Si (Alwa) démontre quelques difficultés dans la projection des aigus assassins de l'air final, il s'inscrit comme un excellent interprète d'un rôle difficile. Autre belle prestation, celle de la mezzo-soprano suisse (la Comtesse Geschwitz) qui, à travers une vocalité somptueuse, propose un personnage magnifique d'humanité.

A noter que la musique difficile et la confusion scénique s'allient pour vider de nombreux fauteuils entre le second et le dernier acte.

Crédit photographique : (Lulu), (Alwa) ; Robert Wörle (Le Prince/Le valet/Le professeur de médecine/Le marquis), Patricia Petibon (Lulu), (L'habilleuse/Le lycéen/Le groom ), (Alwa) © GTG/Grégory Batardon

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