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Des deux rives de la Méditerranée

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Royaumont, abbaye. 26-IX-2009. Zad Moultaka (né en 1967) : L’autre rive. Ensemble vocal Musicatreize ; Ensemble instrumental Mezwej. Direction : Roland Hayrabédian

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Royaumont 2009

Curieuse expérience à laquelle nous a convié la saison de la Fondation Royaumont. L'autre rive de est en fait un oratorio à deux têtes, un Janus musical – les origines du dieu romain à double tête sont elle même contestée : grec ou scythe ? L'autre rive en est le prolongement : le texte narre la même histoire, vue par deux enfants, un grec qui vit dans une démocratie en paix, un arabe dans un pays en proie aux bombes et aux attentats.

Pour confronter ces deux vue, prévoit de diviser l'ensemble des musiciens en deux : une partie va interpréter la partie grecque, l'autre, dans un autre lieu, la partie arabe. Les deux lieux doivent communiquer, de façons à ce que les bribes de l'un soient audibles par le public de l'autre. Pour mieux représenter encore un monde sous les bombes qui se dépeuple et un autre en paix qui accueille, les chanteurs (12 au total) débutent dans la partie arabe et vont, peu à peu, rejoindre la partie grecque. Seul l'ensemble instrumental reste, des percussions sur les deux rives, un cymbalum (représentant le psaltérion) pour le monde grec, une guitare (signifiant le oud) pour le monde arabe. L'œuvre est donc en 12 parties, coordonnées méticuleusement pour qu'elles soient, grecques ou arabes, totalement synchronisées. Le cri de la chouette athénienne rythme chaque début de mouvement. Le texte, donné au public en français, n'est qu'un prétexte : le compositeur a recréé un langage d'après les phonèmes des deux langues, desquels émergent plusieurs «mots-clefs». L'autre rive est donc jouée deux fois : le public est sur l'une ou l'autre rive, puis change de lieu à l'entracte.

dans cette œuvre s'inscrit en droite lignée dans la descendance des dernières pièces de . On retrouve dans L'autre rive le même syncrétisme musical présent dans Avoaha, La Célestine, le Quatuor n°3, le Concerto pour violoncelle «in dark and blue» ou les Sundown dances, un langage musical unifié et largement inspiré de plusieurs folklores. Le compositeur joue avec les timbres, les phonèmes des chanteurs trouvent un écho dans les percussions qui elles-même se prolongent dans les résonances de la guitare ou du cymbalum.

Familier d'Ohana et des métissages musicaux en général, sait mener ses troupes d'une rive à l'autre – à l'instar des chanteurs, le chef se déplace aussi. défie les pièges vocaux de la partition, soutenus par les excellents interprètes de l'ensemble Mezwej, dont nous citerons l'excellent joueuse de cymbalum, Tüdent Balbastre, au nom délicieusement musical.

Crédit photographique : Zad Moultaka © DR

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