La Scène, Opéra, Opéras

Une équipe solide pour Jephtha par Paul McCreesh !

Plus de détails

Paris. Salle Pleyel. 16-VI-2009. Georg Friedrich Haendel (1685-1750) : Jephtha, oratorio en trois parties sur un livret du Réverend Thomas Morell. Avec : Mark Padmore, Jephtha ; Christianne Stotijn, Storge ; Mhairi Lawson, Iphis ; Daniel Taylor, Hamor ; Christopher Purves, Zebul ; William Docherty, Angel. Chœur Philarmonique de Wroclaw (chef de chœur : Agnieszka Frankow-Zelazny), Gabrieli Consort and Players, direction : Paul McCreesh

Difficile de comprendre en cette année anniversaire du Caro Sassone pourquoi la salle Pleyel a eu tant de mal à remplir ses rangs, «contrainte» d'offrir 2 places gratuites à chaque abonné.

Alors trop de salles ? Trop de concerts (Demofoonte de Jommelli par Muti était donné au même moment à Garnier) ? Une œuvre mal connue ? Le doublon avec le Théâtre des Champs Elysées qui a donné l'œuvre il y a quelques mois ? Dommage car Jephtha est un des meilleurs oratorios de Haendel, quasi testament musical de toute une carrière, profondément emprunt d'un supplément d'âme de la part d'un compositeur à la veille de sa mort et souffrant d'une cécité grandissante. Jephtha, vainqueur sur les Ammonites, a fait le vœu de sacrifier la première personne qu'il rencontrerait à son retour. Or cette personne n'est autre que sa propre fille !

nous en propose une lecture empreinte d'urgence avec des tempos dynamiques, enchaînant récitatifs chœurs et airs, tout en conservant une élégance toute british, pour un résultat solide et efficace évitant le pathos et la sur dramatisation. Pour cela, il s'est entouré d'un chœur polonais à l'effectif étonnamment fourni (on n'était plus habitué à entendre des chœurs «colossaux» dans cette musique, offrant des moments grandioses et vibrants d'intensité mais souffrant de raffinement) et d'une équipe de solistes expérimentée, rompue à l'art haendélien.

Le couple d'amoureux Iphis et Hamor, interprété par la soprano et le contre-ténor passe par des moments lumineux et ensoleillés notamment grâce au duo «These labours past» à des moments déchirants «Happy they», «Farewell»… Même si la voix est légèrement voilée dans le médium, la soprano retrouve toute la luminosité de son timbre dans la partie aiguë de sa voix et parvient à donner une spontanéité et une fraîcheur toute juvénile au personnage («The smiling dawn»), mais elle ne parviendra pas à consoler et sécher les reniflements et les larmes (réels) de son partenaire. Ce dernier campe un Hamor viril et solide, avec son timbre chaud, ses aigus encore éclatants, mais des graves qui font défaut et une voix quelque peu abîmée. Il fait pourtant preuve d'une belle énergie dans son air «Up the dreadful steep ascending».

, Storge mère d'Iphis, dont la voix manque un peu d'homogénéité, trouve les couleurs, l'émotion et le mordant nécessaires à traduire les angoisses et la révolte d'une mère inconsolable. nous donne à entendre un Zebul vaillant et valeureux avec sa voix solide de baryton-basse affrontant les vocalises avec aplomb. Le rôle-titre est chanté par le ténor , qui nous dresse le portrait d'un Jephtha tourmenté mais ferme dans ses décisions tendant davantage vers la déclamation («She dies», «I hear no more») que vers une interprétation purement lyrique avec son timbre sec et rocailleux. Même s'il a du mal à venir à bout des redoutables vocalises de l'air «This mighty arm», il fait preuve d'une touchante délicatesse dans son air «Waft her angels». L'œuvre connaît un retournement de situation avec l'arrivée d'un «angelus ex machina» traditionnellement chanté par une soprano. Surprise, ici c'est un treble (garçon soprano) qui vient nous enchanter de sa voix fragile mais tellement plus crédible et céleste.

Même avec quelques bémols, l'équipe a réussi à nous raconter avec force et conviction l'histoire de Jephtha, à nous faire trembler sur le sort de sa fille Iphis, pour culminer dans un quatuor vocal déchirant «O spare your daughter». C'est là l'essentiel.

Crédit photographique : (Jephtha) © Marco Borggreve

(Visited 165 times, 1 visits today)

Plus de détails

Paris. Salle Pleyel. 16-VI-2009. Georg Friedrich Haendel (1685-1750) : Jephtha, oratorio en trois parties sur un livret du Réverend Thomas Morell. Avec : Mark Padmore, Jephtha ; Christianne Stotijn, Storge ; Mhairi Lawson, Iphis ; Daniel Taylor, Hamor ; Christopher Purves, Zebul ; William Docherty, Angel. Chœur Philarmonique de Wroclaw (chef de chœur : Agnieszka Frankow-Zelazny), Gabrieli Consort and Players, direction : Paul McCreesh

Mots-clefs de cet article

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Reproduire cet article : Vous avez aimé cet article ? N’hésitez pas à le faire savoir sur votre site, votre blog, etc. ! Le site de ResMusica est protégé par la propriété intellectuelle, mais vous pouvez reproduire de courtes citations de cet article, à condition de faire un lien vers cette page. Pour toute demande de reproduction du texte, écrivez-nous en citant la source que vous voulez reproduire ainsi que le site sur lequel il sera éventuellement autorisé à être reproduit.