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Rouen. Théâtre des Arts. 10-III-2009. Compagnie Sylvain Groud : Cordes (Création mondiale). Chorégraphie : Sylvain Groud. Musiques de Igor Stravinsky, Claude Debussy, Eugène Ysaïe et Qigang Chen. Lumières : Mickael Dez. Costumes : Gwenaelle Hocquard. Orchestre de l’Opéra de Rouen Haute-Normandie, direction : Benjamin Lévy. Jane Peters, violon. Avec : Anusha Emrith, Juliette Nicolotto, Yurié Tsugawa, Marie Urvoy, Jérémy Kouyoumdijian, Cyril Geeroms, Sylvain Groud et Emilio Urbina.
La création Cordes est née de la fascination du chorégraphe Sylvain Groud pour la musique. Cordes apparaît ainsi comme la réponse à une question : qu'est-ce qu'un musicien ?
L'enjeu est d'ordre humain : il s'agit de mettre en scène les musiciens dans leurs propres rôles et de les inviter à partager «leur territoire» avec les danseurs. Une confrontation qui permet à chacun de se nourrir de la singularité de l'autre. Au cœur de ce spectacle, la «meute» (c'est ainsi que le chorégraphe désigne les 8 danseurs et les 22 musiciens présents sur scène). Les danseurs se caractérisent par leur approche audacieuse de la danse et leur générosité.
L'Orchestre de l'Opéra National de Rouen s'est prêté à cette rencontre chorégraphique avec une rare ouverture d'esprit. Le spectacle débute avec la mise en lumière des rituels de l'orchestre (Sylvain Groud a avoué avoir disséqué pendant un an les différentes manies de l'orchestre). C'est également une manière de présenter la mise en abime d'un spectacle avec la présence fugace sur scène des techniciens : le plateau est un «espace de vie». Et soudainement, c'est l'intrusion de la danse dans l'espace bien réglé de l'orchestre.
Les danseurs observent et cherchent à comprendre. Ils s'emparent de cette virtuosité instrumentale pour donner vie à de nouvelles formes de mouvements. Les corps se construisent et se déconstruisent au rythme des accords de violon. Certaines phrases sont récurrentes : les demi-pliés en déséquilibre qui suggèrent la tension extrême des cordes ; ou encore ces curieux mouvements de mains qui évoquent un frénétique appel. Les musiciens paraissent rester de marbre face à ces incursions ; ce statisme attise la frénésie des danseurs et les pousse à réagir d'autant plus énergiquement. L'un des moments-clé est celui où une danseuse, placée dos à dos avec le chef d'orchestre, tente de recréer avec ses propres mouvements la gestuelle du maestro. Les tentatives de mimétisme émanent également de l'orchestre : la violoncelliste semble tout à coup manier son archet avec la dextérité d'un marionnettiste. L'instrument devient une baguette magique qui permet d'animer les danseurs par la seule force des accords. Puis le chef d'orchestre invite les danseurs à prendre leur place au sein de l'orchestre. Ils décodent la partition avec leurs membres : les ligaments et les muscles jouent le rôle de l'archet ou des cordes d'un violon.
Le rapport entre danse et corps devient évident. Un autre moment marquant est constitué par les portés qui réunissent des partenaires du même sexe, réinventant en cela la notion d'adage. La neige se met à tomber sur la scène, le plateau redevient paysage : la confrontation a permis l'éclosion d'une ère nouvelle. De cette rencontre entre l'orchestre et les danseurs est née l'idée d'acceptation de l'autre. Danseurs et musiciens ont emprunté à l'autre, et les deux corps de métier en ressortent grandi et magnifiés.
Crédit photographique : © Hervé Rivoalland / Fondation BNP Paribas
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Rouen. Théâtre des Arts. 10-III-2009. Compagnie Sylvain Groud : Cordes (Création mondiale). Chorégraphie : Sylvain Groud. Musiques de Igor Stravinsky, Claude Debussy, Eugène Ysaïe et Qigang Chen. Lumières : Mickael Dez. Costumes : Gwenaelle Hocquard. Orchestre de l’Opéra de Rouen Haute-Normandie, direction : Benjamin Lévy. Jane Peters, violon. Avec : Anusha Emrith, Juliette Nicolotto, Yurié Tsugawa, Marie Urvoy, Jérémy Kouyoumdijian, Cyril Geeroms, Sylvain Groud et Emilio Urbina.