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Paris. Théâtre du Châtelet, 20-II-2009. Bach to the moon, spectacle conçu sur des œuvres de Jean-Sébastien Bach (1685-1750). Avec : Le Parlement de Musique, direction musicale : Martin Gester, ; Stéphanie-Marie Degand, violon ; Jérôme Pernoo, violoncelle ; Raphaël Imbert Project et Quatuor Manfred. Alexander Gurning, Daan Vandewalle, pianos. DJ Sutekh.
Bach to the moon
Ce vendredi, la pleine lune était majestueuse dans le ciel de Paris, et pour sa IVe édition le Théâtre du Châtelet a ouvert toutes ses salles pour permettre au public d'entendre Bach de 20H 30 à 2H du matin et dans tous les styles. De la version pure sur instruments baroque à la version la plus contemporaine en musique électronique sans oublier le jazz et l'exploration ottomane. Sur un rythme d'enfer, il a fallu, pour entendre les artistes, monter et descendre plus d'une fois les cinq étages du théâtre. Dans la variété proposée, il a fallu faire un choix, puisque à chaque rendez-vous trois concerts étaient à entendre simultanément. Soit 18 concerts dans la même soirée. Aussi, l'option baroque nous permettait d'entendre le plus d'artistes en scène dans la même discipline.
Au 5e étage, Salle Nijinski, à 20H 30 pétante la course s'élançait. Stéphanie-Marie Degand, sans faux départ, nous donne la Sonate pour violon seul n°1. Il n'est pas évident de prendre ses marques avec un public indiscipliné, bruyant. Quoiqu'il en soit dans cette salle surchauffée qui n'est vraiment pas appropriée, on ne peut pas dire que les auditeurs étaient prêts dans la ligne droite d'une des sonates les plus difficiles à entendre sans un minimum de concentration, nous avons pu entendre que la musicienne se donnait intensément à cette partition qu'elle aime tant.
A peine avons nous eu le temps de redescendre au 1er niveau et arrivés essoufflés dans la grande salle, nous allions entendre sous forme d'offrandes musicales : des extraits de sonates, canons et ricercares par Le Parlement de Musique. Déjà le climat est plus calme et le public a pris ses marques. Installés confortablement nous dégustons ces pièces. L'ensemble en quintette pour cette session, n'a pas eu à subir l'empressement d'être dans les starting-block de la soirée et tout se déroule tranquillement, les violons de Stéphanie Pfister et de Camille Antoinet arrivent à braver l'acoustique plutôt sèche de cette grande salle, on reprochera sans doute un placement des musiciens trop éloignés des uns et des autres pour s'approprier l'espace de la scène, nous donnant un sentiment de distance et un manque d'intimité, le violoncelle d'Emmanuel Jacques semblait un peu trop lointain. Les flûtes de Jacques Antoine Bresch et de Julien Martin étaient par contre mieux équilibrées avec le clavecin de Martin Gester en lieder de l'équipe. Cet ensemble nous a déjà contenté dans un lieu tout aussi difficile, où la musique a pu s'exprimer pleinement.
En petite foulée en guise d'entracte, nous n'avions qu'un niveau à gravir, dans le salon des glaces, pour entendre les deux derniers mouvements de la Suite n° 6 interprétés par Jérôme Pernoo sur violoncelle piccolo*, non parce que l'artiste ne donnait que ceux là, mais bien parce qu'il était dans le «couloir central» des créneaux horaires prévus. C'est, en fait, la salle la plus appropriée pour entendre convenablement le jeu subtil de la technique baroque, un archet sans poids et un son blanc sans vibrato. Le temps que la salle se vide, retour à la case départ au 5 e étage nous avons pu aller furtivement entendre quelques bribes de ney** de Kudsi Ergüner et du violoncelle de Bertrand Raynaud dans un échange mettant en valeur les partitions du compositeur turc Buhurizade Idri (1640-1711) avec celle de J. S Bach. Stéphanie-Marie Degand a commencé dans la salle des glaces, devant un public assez restreint, dans un calme bien approprié pour cette deuxième partita. Nous étions tous avec le souffle coupé tant par la beauté et la pureté de son qu'elle nous a offert, quelle ne fut pas notre surprise quand les applaudissements firent fureur, le public s'était entassé bien sagement dans la deuxième partie de la salle et avait écouté presque religieusement, cela méritait une médaille.
Et pour une troisième fois nous passons la ligne du relais pour entendre cette fois-ci la Suite n°1 avec un violoncelle baroque. Avec assurance et souplesse Jérôme Pernoo arrive à nous transporter alors que décidément cette salle avec un plafond assez bas s'avère toujours un obstacle et ne rend pas l'ascension de cette montagne que peut être cette fameuse suite à entendre. Alors qu'il est déjà plus de 23h, dans cette randonnée, un deuxième passage dans la grande salle, pour retrouver Le Parlement de Musique et entendre le Concerto brandebourgeois n°5. Dans le peloton de tête nous retrouvons Stéphanie-Marie Degand qui aura réussi la performance sans réelle pause de se remettre en piste, suivie de près par notre premier quintet avec en renfort Mathieu Camilleri à l'alto et Isabelle Dumont au violone***. Ce jeu d'équipe a réussi à nous charmer sans montrer la moindre défaillance ni la moindre faiblesse, les enchaînements étaient parfaits, les archets étaient légers et la profondeur du son était authentique. Il y régnait une entente bien plus amicale que sportive.
Pour nous la course se terminait, nous avons dû déclarer forfait pour la 2e mi-temps qui ne faisait que commencer. Les changements d'altitude nous ont sans doute trop oxygénés et cette forme de «zapping» musical n'est pas une des meilleures formules pour entendre les qualités artistiques des uns et des autres. Nous ne nous sommes pas déclarés vaincus pour autant et pour les amateurs qui forment le public, l'important est bien de participer comme disait un certain …
* Violoncelle piccolo : de la taille d'un instrument d'enfant de taille ½ monté en cinq cordes et accordé en quintes avec un mi ou un ré en chanterelle supplémentaire.
** Ney (ou nay) Flûte oblique turque et persane.
*** Violone vient de l'italien et signifie «grande viole». Historiquement, il ne désigne rien de plus qu'un «instrument grave à cordes frottées», qui peut être à trois, quatre, cinq ou six cordes accordées régulièrement ou irrégulièrement en tierce, quarte ou quinte, en 8'ou en 16' (soit à la même octave que le violoncelle ou que la contrebasse) et ressembler à un gros violon ou une grande viole. (source Wikipédia)
Crédit photographique : © DR
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Paris. Théâtre du Châtelet, 20-II-2009. Bach to the moon, spectacle conçu sur des œuvres de Jean-Sébastien Bach (1685-1750). Avec : Le Parlement de Musique, direction musicale : Martin Gester, ; Stéphanie-Marie Degand, violon ; Jérôme Pernoo, violoncelle ; Raphaël Imbert Project et Quatuor Manfred. Alexander Gurning, Daan Vandewalle, pianos. DJ Sutekh.