Mascagni à Baia, toujours et encore prégnant

En dépit de ses défauts souvent soulignés (écriture manquant de raffinement pour certains, caricature des caractères pour d'autres), l'opéra en un acte Cavelleria rusticana de Pietro Mascagni (1863-1945) n'en demeure pas moins l'une des musiques les plus jouées sur l'ensemble des scènes du monde entier.

Et ce, pratiquement depuis sa création au théâtre Costanzi de Rome le 17 mai 1890. Classé à juste titre comme représentatif de ce que l'on qualifie d'esthétique vériste Cavalleria rusticana (Chevalerie rustique) a charmé et charme encore le spectateur par le biais de ses accents poignants, par la sincérité des personnages, par un sentiment de ferme conviction guidant l'écriture de Mascagni. Chef-d'œuvre du maître ? Certes, il écrivit d'autres opéras de qualité (inférieurs cependant) qui jouirent d'une moindre considération internationale sans démériter pour autant.

De ce qui précède on imaginera sans peine les douzaines de mises en scène tentées ou tentantes. Les choix scéniques de Maurizio Scaparro aboutissent à une conception homogène et adaptée à l'environnement naturel constitué par les légendaires thermes romains du petit port de Baia, situé à proximité de Naples. L'orchestre et le chœur du San Carlo Teatro de cette dernière ville sont dirigés par une jeune chef chinoise d'une trentaine d'années, Zhang Jiemin, remarquablement performante. Assistante auprès de Michel Plasson à Toulouse au début des années 2000, elle a également travaillé avec Zubin Mehta et nous a été révélée, entre autres, avec ses interprétations de Carmen, La Bohème, Turandot, Aïda…. Les protagonistes vocaux, fortement caractérisés sur le plan psychologique, défendent avec talent leur personnage respectif, chacun offrant à la tragédie paysanne son réalisme, sa violence, ses souffrances. Voix et instrumentistes embellissent les belles mélodies de Mascagni, celles-là mêmes qui touchent directement au cœur des auditeurs empathiques. Elles proviennent de gens simples et ordinaires voulus par le compositeur, père de ce vérisme tant adulé et décrié à la fois. Les décors utilisent à bon escient la topographie unique des lieux enchanteurs. Le bonus permet de découvrir une partie de l'organisation, des préparatifs et de divers intervenants durant la longue période qui précède le grand jour.