Moussorgski pour ces temps de crise

Paavo Järvi est certainement le chef le plus enregistré du moment car entre ses intégrales Beethoven et maintenant Bruckner pour RCA, ses disques de musique scandinave chez Virgin et ses présents témoignages dans le grand répertoire pour Telarc, le futur directeur musical de l'Orchestre de Paris est omniprésent dans les bacs des disquaires. A ce titre, on se demande bien ce qu'il lui restera à enregistrer à Paris…

Cette nouvelle galette poursuit dans une optique de relecture à la pointe sèche des chefs-d'œuvre de la musique russe. Les Tableaux d'une exposition millimétrés et précis manquent tout de même de rondeur, de galbe et de chaleur sous une battue privilégiant, à l'excès, une énergie plus en nerfs qu'en muscles. On se situe là dans la pure démonstration d'une machine orchestrale parfaitement au point et rutilante, mais l'oreille attend pourtant plus de tourments et d'âme russe que l'on retrouve chez Gergiev (Philips) et Chailly (Decca) pour ne citer que des enregistrements plutôt récents.

Les compléments sont mieux venus : le prélude de La Khovanchtchina s'ébroue une subtilité toute matinale et la Nuit sur le mont chauve claque énergiquement. On regrette aussi un minutage un peu chiche et l'on aurait souhaité d'autres pièces du compositeur. La prise de son Telarc rend hommage à la réputation hifiste du label avec, entre autre, une «cabane sur des pattes de poule» et une «grande porte de Kiev» qui secouent les enceintes.