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Paris, auditorium du Louvre. 28-XI-2008. Morton Feldman (1926-1987) : Rothko Chapel ; Clytus Gottwald (né en 1925) : Über das, über ein verschwinde (création française) ; Marco Stroppa (né en 1959) : Perché non ricuscamo a vederla ? (création mondiale). Christophe Desjardins, alto ; Daniel Ciampolini, percussions ; Nicolas Fehrenbach, célesta. Les Cris de Paris, direction : Geoffroy Jourdain.
Cycle Boulez au Louvre
Ultime concert, avant le bouquet final de l'Oiseau de feu sous la pyramide, du cycle «Le Louvre invite Pierre Boulez». Mais point de Boulez ce soir. Et pour cause, il n'a jamais écrit pour chœur a cappella. Morton Feldman partage avec le maître honoré en ces lieux le privilège d'avoir enseigné aux universités d'été de Darmstadt. Rothko Chapel, composé un an après la mort du peintre Mark Rothko pour l'inauguration de la chapelle œcuménique qui porte son nom, ornée de ses peintures monumentales, à Houston, est une commande du couple De Menil, riches mécènes américains. C'est une œuvre d'introspection, qui bouleverse les habitudes d'écoute. Malheureusement, dans l'acoustique sèche comme un coup de trique de l'auditorium du Louvre, ça ne passe pas. Les longues plages sonores du chœur, les notes isolées à l'alto ou la mélodie répétitive et naïve du vibraphone à la fin tombent à plat en raison de l'absence de résonance des lieux. Quels que soient les efforts des musiciens de cette soirée, la magie incantatoire ne prend pas.
Les œuvres suivantes pâtissent moins des lieux. Über das, über ein verschwinde, sur un texte de Pierre Boulez, signée par le chef de chœur Clytus Gottwald, est un hommage à Adorno. Composée en 1969, au tout début de l'»exil» de Baden-Baden, c'est le genre de pièces qui s'écoutent, sans laisser une impression durable. Des grappes de sonorités, tantôt parlées, tantôt chantées, se succèdent et naviguent d'un pupitre à l'autre. L'esthétique de Boulez y est manifeste, surtout sur la dislocation du texte, éparpillé à tous les chanteurs.
Perché non ricuscamo a vederla ? est d'une autre trempe. Pièce sans texte construit, basée sur des graffitis recueillis, elle est une symbolisation des cris comme moyen de communication. Le chœur, mobile, se déplace selon les sections de l'œuvre, chaque pupitre s'interpellant, de face, de profil ou de dos au public. Point de férocité pourtant, malgré le propos. Le tout se désagrège peu à peu dans une forme d'aléatoire contrôlé, les cris devenant murmures, littéralement auréolés par des harmoniques de verres en cristal frottés. Menée de main de maître par Geoffroy Jourdain et ses Cris de Paris, voilà bien une œuvre à mettre au répertoire de tous les chœurs professionnels.
Crédit photographique : © DR
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Paris, auditorium du Louvre. 28-XI-2008. Morton Feldman (1926-1987) : Rothko Chapel ; Clytus Gottwald (né en 1925) : Über das, über ein verschwinde (création française) ; Marco Stroppa (né en 1959) : Perché non ricuscamo a vederla ? (création mondiale). Christophe Desjardins, alto ; Daniel Ciampolini, percussions ; Nicolas Fehrenbach, célesta. Les Cris de Paris, direction : Geoffroy Jourdain.