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La Flûte à Bastille, de l’enchantement au cauchemar

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Paris, Opéra-Bastille. 22-XI-2008. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Die Zauberflöte, Singspiel en deux actes sur un livret d’Emanuel Schikaneder. Mise en scène : Alex Ollé et Carlos Padrissa de La Fura dels Baus. Décors et costumes : Jaume Plensa. Lumière : Albert Faura. Vidéo : Franc Aleu. Avec : Shawn Mathey, Tamino ; Iwona Sobotka, Erste Dame ; Katija Dragojevic, Zweite Dame ; Cornelia Oncioiu, Dritte Dame ; Russel Braun, Papageno ; Maria Virginia Savastano, Papagena ; Kristin Sigmundsson, Sarastro ; Wolfgang Ablinger-Sperrhacke, Monostatos ; Maria Bengtsson, Pamina ; Erika Miklosa, Königin der Nacht ; José Van Dam, Der Sprecher ; Jon Ketilsson, Erster Geharnischter ; Rúni Brattaberg, Zweiter Geharnischter ; Solistes de la Maîtrise des Hauts-de-Seine, Drei Knaben. Orchestre et Chœurs de l’Opéra National de Paris (chef des chœurs : Alessandro Di Stefano), Chœur d’enfants de l’Opéra National de Paris, direction : Thomas Hengelbrock

Ennuyante, monotone et incompréhensible a été la représentation de La flûte enchantée de Mozart, à l’affiche jusqu’à fin décembre à l’Opéra Bastille.

Pas d’enchantement, ni de musique, ni de chant, ni de mise en scène, mais plutôt un cauchemar. L’œuvre presque méconnaissable a été complètement (ré)interprétée selon une lecture psychologique du livret.

L’espace scénique est une reproduction idéale d’un cerveau à entendre comme foyer de la connaissance, créé à l’aide de modules gonflables (sortes de matelas transparents) associés ou bien à des blocs de mémoire artificielle ou à des murs en briques blancs ou encore à des êtres organiques qui laissent entrevoir leur structure interne. La vidéo, support supplémentaire à cette lecture très personnalisée et à une atmosphère déjà très subjective, confond les temps de l’action, détourne et souvent dérange avec des images de tissus cérébraux, micro-organismes, empruntées à la médecine et à la biologie.

Loin de critiquer un tel choix, évidemment très singulier et basé sur une esthétique laide, on soulignera l’effet qu’il a produit sur le plan formel et surtout sur celui de l’acoustique. Le bruit de fond constant de la machine technologique (du projecteur à l’ordinateur) et scénique (gonflage et dégonflage, déplacement et soulèvement des matelas) a énormément dérangé l’écoute et de la musique et du chant. L’attention aux événements dramaturgiques déjà rendue difficile par une représentation ambiguë a été ultérieurement mise à l’épreuve avec la présence constante sur scène et le relatif va-et-vient des techniciens/figurants (idéalement des docteurs) préposés aux changements de scènes.

Dans le cadre du chant, l’utilisation de microphones dans les passages récitatifs, probablement dictée par la structure d’une salle inadéquate à héberger une telle mise en scène, nous sommes pourtant à Bastille, a amplifié le «bruit» des consonnes allemandes «ch», «tsch», «ß», et des sons aphones conférant aux voix une couleur très sombre et un aspect mécanique presque inhumain. La performance des chanteurs est en générale médiocre et assez monotone tout comme celle des musiciens. Pas de personnalité, pas la moindre émotion, pas de simultanéité avec la musique. Les chanteurs souvent en dehors du tempo, manquent de basses, leur chant aphone n’arrive même pas dans la salle.

Les moments clefs de l’opéra sont complètement ratés. L’air de la Reine de la nuit par exemple, précédé d’un duo pathétique entre Pamina et Monostatos (ce dernier sur un lit avec une caméra à la main !) L’air le plus connue de l’œuvre s’est traduit par une série de vocalises accélérées à peine susurrée par une reine habillée en paillettes argentées même pas en colère. Une meilleure performance toutefois celle de Pamina dans le deuxième acte et du chœur supporté par un orchestre précis mais pas exaltant. La flûte n’a pas vraiment enchanté mais comment l’aurait-elle pu avec un fond sonore de bruit ?

Incompréhensibles aussi, les interventions dans le livret de Schikaneder comme l’introduction d’une messagerie vocale (symbole de la conscience de Papageno ?) Ridicule et inutile dans la gestion de l’opéra. Dans ce bazar d’idées «révolutionnaires» la musique et le chant n’ont malheureusement pas trouvé leur place.

Crédit photographique : © Opéra national de Paris

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Paris, Opéra-Bastille. 22-XI-2008. Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Die Zauberflöte, Singspiel en deux actes sur un livret d’Emanuel Schikaneder. Mise en scène : Alex Ollé et Carlos Padrissa de La Fura dels Baus. Décors et costumes : Jaume Plensa. Lumière : Albert Faura. Vidéo : Franc Aleu. Avec : Shawn Mathey, Tamino ; Iwona Sobotka, Erste Dame ; Katija Dragojevic, Zweite Dame ; Cornelia Oncioiu, Dritte Dame ; Russel Braun, Papageno ; Maria Virginia Savastano, Papagena ; Kristin Sigmundsson, Sarastro ; Wolfgang Ablinger-Sperrhacke, Monostatos ; Maria Bengtsson, Pamina ; Erika Miklosa, Königin der Nacht ; José Van Dam, Der Sprecher ; Jon Ketilsson, Erster Geharnischter ; Rúni Brattaberg, Zweiter Geharnischter ; Solistes de la Maîtrise des Hauts-de-Seine, Drei Knaben. Orchestre et Chœurs de l’Opéra National de Paris (chef des chœurs : Alessandro Di Stefano), Chœur d’enfants de l’Opéra National de Paris, direction : Thomas Hengelbrock

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