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The Rake’s Progress à Angers, une course effrénée vers la folie

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Angers. Grand Théâtre. 8-III-2008. Igor Stravinsky (1882-1971) : The Rake’s Progress, opéra en 3 actes et 1 épilogue, sur un livret de Wystan Hugh Auden & Chester Kallman. Mise en scène : Carlos Wagner. Décors & costumes : Conor Murphy. Lumières : Norbert Chmel. Avec : Gilles Ragon, Tom Rakewell ; Gail Pearson, Anne Trulove ; Brian Bannatyne-Scott, Trulove ; Josef Wagner, Nick Shadow ; Linda Ormiston, Mother Goose ; Ann McMahon Quintero, Baba the Turk ; Christopher Lemmings, Sellem. Chœur d’Angers Nantes Opéra (chef de chœur : Xavier Ribes), Orchestre National des Pays de la Loire, direction musicale : Nicolas Chalvin

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Le Rake's Progress est une œuvre d'une actualité brûlante : au même titre que Mahagonny, il dénonce par anticipation les plus sombres dérives de notre société.

Les mirages de l'argent facile, la spéculation, l'évacuation du mal-être dans la dérive alcoolique, la corruption des âmes, tout y est ! en est conscient et réfute l'anecdote ou même le moindre repère local ou temporel, pour peindre la déchéance d'une âme simple confrontée à une société corruptrice agissant comme un rouleau compresseur, une machine à briser les volontés dont Rakewell ne s'évadera que par la folie. Les chœurs, habillés en traders de la City, avec portables et attachés cases, le démontrent : c'est notre société prétendument libérale mais essentiellement capitaliste qui est la cible. Tous les vices de notre époque participent à l'anéantissement de l'individualiste voltairien qu'est Tom : le culte de l'argent pour l'argent, l'amour tarifé, l'illusion de l'oubli dans les pires addictions. Déprimant tableau ? Non, bien heureusement, car apporte toute sa créativité à l'ouvrage dès la scène d'ouverture où un Tom photographe se met en scène au côté d'Anne dans des poses fantaisistes. Le metteur en scène multiplie clins d'œil malicieux, tours de passe-passe et traits d'humour, dans une vision roborative de l'ouvrage. Seul le tableau de l'asile le trouve à cours d'imagination ; il s'en remet alors aux seules qualités vocales de ses interprètes. Le dispositif scénique dépouillé s'articule autour d'un plateau tournant qui exprime tous les vertiges, mais l'essentiel repose sur une direction d'acteurs précise et inventive.

impressionne en Tom Rakewell avec une voix qui s'est élargie et a gagné en puissance, et un timbre qui s'est assombri, sans rien perdre des qualités d'émission héritées de sa formation baroque puis mozartienne. Le ténor entame une nouvelle phase dans sa carrière puisqu'il envisage désormais Hoffmann, Erik et Cavaradossi. Il est aussi à l'aise dans le lyrisme que dans l'expressionnisme. Scéniquement, il traduit parfaitement l'inexorable glissement vers la folie de son personnage, pantin pitoyable tenu en laisse par Nick Shadow. A ses côtés, Gail Pearson est une ravissante Anne à l'allure séduisante, au timbre frais et fruité, à la technique accomplie et à la musicalité raffinée qui lui permettent de remporter un beau succès dans sa cabalette « I go, I go to him ». Moins incisif vocalement, Josef Wagner n'en campe pas moins un Shadow convaincant, diablement à l'aise sur scène.

Les seconds rôles sont inégaux : campe un Trulove adéquat, même s'il peine quelque peu à projeter son grave ; curieusement dépourvue de barbe, la Baba d' ne marque pas ; , en petite forme vocale, nous vaut cependant une hilarante scène de vente aux enchères, assis sur un trapèze suspendu aux cintres ; Linda Ormiston, enfin, nous sert dans Mother Goose une de ces hilarantes compositions qui sont sa marque de fabrique. A la baguette, veille à l'équilibre entre la scène et la fosse et signe une direction efficace même si elle ne sert qu'imparfaitement le néo-classicisme spirituel de Stravinsky. Il peut en revanche s'appuyer sur un orchestre en grande forme, avec mention spéciale à la petite harmonie.

Crédit photographique : (Tom) &  Josef Wagner (Nick) © Jeff Mabillon

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Angers. Grand Théâtre. 8-III-2008. Igor Stravinsky (1882-1971) : The Rake’s Progress, opéra en 3 actes et 1 épilogue, sur un livret de Wystan Hugh Auden & Chester Kallman. Mise en scène : Carlos Wagner. Décors & costumes : Conor Murphy. Lumières : Norbert Chmel. Avec : Gilles Ragon, Tom Rakewell ; Gail Pearson, Anne Trulove ; Brian Bannatyne-Scott, Trulove ; Josef Wagner, Nick Shadow ; Linda Ormiston, Mother Goose ; Ann McMahon Quintero, Baba the Turk ; Christopher Lemmings, Sellem. Chœur d’Angers Nantes Opéra (chef de chœur : Xavier Ribes), Orchestre National des Pays de la Loire, direction musicale : Nicolas Chalvin

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