Kinan Azmeh et son ensemble, entre modernisme et tradition orientale
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Paris. Amphithéâtre de l’Opéra-Bastille. 26-I-2008. Kinan Azmeh (né en 1976) : clarinette, composition ; Issam Rafea, oud, chant ; Dima Orsho, chant ; Dinuk Wijeratne, piano ; Rubin Kodheli, violoncelle ; Dave Phillips, contrebasse ; Afra- Mussawisade, percussions.
Invités par la Maison des Cultures du Monde, Kinan Azmeh et son ensemble étaient à l'honneur le week-end dernier de l'Amphithéâtre de l'Opéra Bastille. Encore peu connu en France (son seul concert remontait à octobre 2006), le clarinettiste fait partie de cette génération de musiciens complets qui évolue avec aisance à travers tous les genres musicaux.
Qu'il s'agisse d'un programme de musique classique sous la direction de grands chefs dans des salles prestigieuses ou de musique expérimentale aux côtés d'artistes tels que Francesco Tristano Schlimé et Rhami Khalifé, le jeune syrien affiche sans complexe une maîtrise instrumentale de tout premier plan et un réel talent pour la composition.
Du point de vue du jeu lui-même, Kinan Azmeh substitue sa propre voix au chant de son instrument et se fond avec fluidité dans des sonorités taillées dans le diamant, des pianissimi tamisés où chaque nuance semble habillée de soie et connectée aux éléments qui nous entourent. Tel un maître de cérémonie, il anime les débats et, dans un très bon français, s'adresse avec humour au public enthousiaste, l'invitant même à reprendre un thème aux harmonies « arabisantes ». Autour du clarinettiste, du ‘beau monde'… Des amis virtuoses, instinctifs dans l'instant et terriblement complices. Avec générosité, chacun s'écoute, respire ensemble et nous communique son bonheur d'être sur scène.
L'univers proposé trouve son inspiration à la source : dans l'essence même de la musique orientale traditionnelle mais aussi dans celle du jazz, notamment fusion, et de la pop. Sons nouveaux avec ce violoncelle électrique ou ce Bösendorfer aux esquisses mélodiques diaphanes et souvent utilisé comme instrument percussif avec des cordes pincées et frappées. Complexité rythmique ou décrochages de style sont également de mise. La relance dans l'improvisation est, quant à elle, rendue possible grâce à la présence d'Issam Rafea à l'oud.
Des titres évocateurs comme « le Soir » ou encore « Prières » composent un « set » de plus d'une heure trente marqué par diverses formes d'expression. Clarinette seule ou en duo avec le piano, en trio, en groupe avec ou sans sa chanteuse et son percussionniste. Sensations atmosphériques égrenées dans « Aéroport » avec ses vagues ondulantes ou encore « Mariage », pièce jazzy et colorée qui se distingue par ses ruptures multiples d'écriture et son chant festif.
Seul bémol à cette belle soirée : de longues introductions, un « brin » répétitives, et un fil conducteur qui tarde à se dessiner. Une lenteur structurelle qui surprend compte tenu des amplitudes harmoniques et des crescendos centraux réussis. Extrait d'une musique de film, le duo piano/violoncelle constitua probablement le sommet du concert avec une profondeur immédiate et mélancolique. Kinan Azmeh revint donner un bis avec un souci d'unité dans le choix du morceau juste pour nous rappeler que la scène artistique du Moyen Orient a bel et bien sa place parmi les grands.
Crédit photographique : © DR
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Paris. Amphithéâtre de l’Opéra-Bastille. 26-I-2008. Kinan Azmeh (né en 1976) : clarinette, composition ; Issam Rafea, oud, chant ; Dima Orsho, chant ; Dinuk Wijeratne, piano ; Rubin Kodheli, violoncelle ; Dave Phillips, contrebasse ; Afra- Mussawisade, percussions.