Évocation par Sandrine Piau du mystère féminin

Le charme et la délicatesse de ces deux artistes est irrésistible. Assurément les deux musiciennes sont à l'aise dans toutes les mélodies choisies par leurs soins. Alternance bienheureuse de mélodies et de lieder de l'entre deux siècles, il existe des résonances communes et inattendues entre des compositeurs pourtant fort éloignés. La voix délicate et suave de Sandrine Piau fait merveille même si le timbre est un peu mince à certains moments. Sa diction est étrangement variable. Précise le plus souvent, parfois elle semble molle et floue.

Et ce n'est pas seulement la tessiture qui est responsable de cet effet. Il semble que l'effort sur les couleurs et la projection du son est la priorité de la cantatrice au détriment des mots. Mais ceci n'est pas de nature à gâcher vraiment notre plaisir car il est clair que Sandrine Piau comprend et aime chaque texte et chaque œuvre.

L'accompagnement du piano amoureux de Susan Manoff est une autre splendeur de ce disque. Leurs dialogues sont nombreux, suggestifs et toujours délicatement phrasés. Une même passion pour cette atmosphère mordorée les rassemble.

La prise de son merveilleusement précise et pourtant légèrement réverbérée est une belle réussite. Des voix plus pulpeuses et plus riches apportent un tout autre format à certaines mélodies, mais le charme de cette interprétation fraîche est bien venu. On se laisse emporter avec ravissement et sans trop chercher à comprendre ce qui se passe, dans cette évocation très personnelle de paysages musicaux féminins, avec de très belles raretés.