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L’opéra en France : la répartition géographique

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Leurs disparités en France en font leur force : si aucune maison d’opéra ne se ressemble, leurs saisons sont en tout logique fortement individualisées. Organisation, montage de spectacles, répartition territoriale, modèle économique… Tous les sujets sont abordés dans ce dossier sur le monde lyrique dans l’hexagone. Pour accéder au dossier complet : L’opéra en France

 

Diffusion et coût de l’opéra en France

La carte ci-contre est explicite : l’ouest de l’Hexagone est largement défavorisé. A l’inverse, dans un rayon de moins de 300km peuvent se trouver cinq théâtres.

Certaines capitales régionales en sont dépourvues alors que d’autres villes de moyenne importance ont une scène lyrique. Les raisons d’une telle inégalité sont tout à la fois historiques, politiques et culturelles. Quoiqu’il en soit, dès qu’une ville est siège de pouvoir au XIXe siècle, elle s’est dotée d’un opéra.

Commençons par l’enfant gâté, la région Provence-Alpes-Côte d’Azur : pas moins de quatre opéras. Culturellement nous sommes dans un endroit ou l’art lyrique est populaire, peut-être (et sûrement) en raison de la proximité de l’Italie. La communauté italienne a toujours été importante dans ce coin de la France, aussi bien pour des raisons économiques (ports, banques, commerce, …) que sociales (immigration). De surcroît les quatre villes concernées ont toutes une importance à divers niveaux : Avignon, rattachée à la France depuis 1791, a longtemps été une ville florissante puisque à la croisée des chemins commerciaux (passage entre l’Espagne, l’Italie et le nord de l’Europe par le couloir rhodanien), Marseille est le port de commerce que l’on connaît, Toulon est le port militaire français sur la Méditerranée et Nice, comme toute ville italienne, a connu un développement indépendant et autonome (le Comté de Nice a été intégré à la France en 1860). A cela s’ajoute un cinquième larron, qui n’est pas français certes, l’Opéra de Monte-Carlo. Le climat de cette région, et plus particulièrement la Côte d’Azur, a attiré une forme de tourisme élitiste fin XIXe – début XXe de grands bourgeois et aristocrates d’Europe du nord et de l’est venant passer l’hiver « au chaud ». Curieusement la « capitale culturelle » Aix-en-Provence, malgré son prestigieux festival, n’a ni théâtre lyrique permanent, ni orchestre. Enfin Cannes bénéficie d’un orchestre indépendant de toute scène.

Deux autres régions se voient dotées de deux scènes : l’Alsace et la Lorraine. Lors de la révolution industrielle, Mulhouse (enfin, Mulhausen) a gagné en importance et en richesse, offrant un contrepoids économique à Strasbourg, alors que ces deux villes étaient sous le Reich allemand (depuis tout a été réuni sous le nom d’Opéra du Rhin). Concernant la Lorraine, Nancy est le « bastion » français face à Metz, devenue allemande suite à la défaite de Sedan. L’influence culturelle est très importante : dans un cas il faut contrer la « germanisation », dans un autre il faut « dégalliciser ». Nancy et Metz se regardent donc en chiens de faïence et se dotent chacune d’infrastructures diverses, dont une scène lyrique. Enfin Nancy est la capitale historique de la Lorraine, et un carrefour commercial important. Metz, plus isolée, a profité de l’industrie minière et sidérurgique pour se développer.

Le cas de la région Rhône-Alpes est significatif d’une volonté politique récente de rééquilibrage. Saint-Etienne a pu avoir sa propre scène lyrique puisque c’était une ville industrielle, donc florissante jusqu’au marasme des années 70. Ces trente dernières années, pour ne pas devenir « satellite » de la puissante Lyon voisine, elle s’est dotée de diverses infrastructures, dont une université, et a réorganisé son orchestre et son opéra. A l’inverse, Grenoble, devenue ces dernières années un centre scientifique important, et bien que bénéficiant d’une vie culturelle foisonnante, n’a pas de scène lyrique.

Tous les cas cités dénotent d’une volonté de se démarquer de la capitale régionale, tant au niveau culturel qu’aux niveaux économique et social. Seule exception : l’Opéra du Rhin, répartit sur trois sites. Un exemple concluant de régionalisation, aidé en cela par une population dense, des distances courtes et une infrastructure routière conséquente. Avec deux orchestres attachés (Orchestre Philharmonique de Strasbourg, Orchestre Symphonique de Mulhouse), un chœur, des ateliers de décors et costumes et deux centres de formation (chanteurs et techniciens) l’Opéra du Rhin peut programmer près de 10 représentations par production, un luxe que seul peut se permettre l’Opéra National de Paris.

A l’inverse, l’ouest et le nord sont peu pourvus en scènes lyriques. Lille a tout misé sur son célèbre orchestre. Bien que le bâtiment existe depuis le XIXe siècle, l’opéra de Lille n’a rouvert que récemment. Presque toutes les préfectures de région ont un opéra, plus ou moins important : Rouen, Caen, Rennes, Tours, Nantes, Bordeaux, Limoges, Toulouse et Montpellier. Parfois une seconde scène a ouvert dans une même région : il fut un temps ou Orléans présentait quelques opéras. Quant à Angers, sa saison a été intégrée à celle de Nantes pour créer Angers-Nantes-Opéras. Deux exceptions se situes dans la partie est de la France : Dijon et Besançon, dont les scènes d’opéra ont été revivifiées récemment.

Enfin le Poitou-Charentes, la Corse et la Picardie n’ont pas de structures lyriques permanentes. Il y a bien le Théâtre Impérial de Compiègne, en bien mauvaise passe en ce moment. L’Auvergne est un cas à part. Clermont-Ferrand a un Centre Lyrique à défaut d’un opéra à part entière, qui permet de maintenir une offre culturelle de qualité. Vichy a bien un opéra (en tant que bâtiment), malheureusement sous exploité.

Ne serait-ce que d’un point de vue géographique, on peut être amené à comprendre la réunion de certains opéras, et créer sur le modèle de l’Opéra du Rhin et d’Angers-Nantes-Opéras un « Opéra de Lorraine » (Nancy-Metz) et un « Opéra de Provence » (Avignon-Toulon-Marseille). A condition de ne pas appauvrir l’offre lyrique, ni de mettre musiciens d’orchestre, choristes et techniciens au chômage.

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