Requiem conceptuel

Rencontres Musicales de Calenzana

En visitant l'église baroque de style italien Saint-Blaise de Calenzana, on se demande comment peuvent tenir les forces demandées par le Requiem de Verdi. A moins de se passer de public. Jean-Philippe Sarcos et ses troupes du Palais Royal optent pour une vision chambriste au premier sens du terme : une trentaine de choristes, une quinzaine de cordes, les vents par deux ou trois. Thibault Perrine, le génial arrangeur de la compagnie les Brigands – par ailleurs membre de l'orchestre – adapte la partition, en redistribuant aux bois quelques phrases de cuivres. Le résultat est très curieux. Les effets de contrepoint et les accents les plus indicibles sont ainsi mis en valeur, au détriment d'une certaine majesté propre à l'œuvre. Le faible nombre de cordes surexpose nécessairement les vents. Verdi n'en est pas défiguré pour autant, grâce à l'excellente tenue du chœur (connaissant la partition de mémoire), aidé par un orchestre homogène. A l'exception de la basse, les autres solistes tiennent leurs parties avec maestria – mentions spéciales pour Catherine Manandaza, aux impeccables aigus filés dans l'Offertoire, et à Pierre Vaello, membre du chœur de Radio-France.

Jean-Philippe Sarcos donne ainsi une lecture presque ascétique de l'œuvre, assez droite, loin de l'esprit de « messe en habits d'opéra » que reprochait en son temps Hans von Bülow au Requiem du maître de Bussetto.

Applaudissements nourris de la part du public corse dans une église comble. La partition a eu beau être (bien) triturée, la qualité des interprètes méritait une telle ovation.

Crédit photographique : Jean-Philippe Sarcos – DR